Groupe de chênes, Apremont, Forêt de Fontainebleau

Artiste(s) : ROUSSEAU Théodore
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Après avoir subi l’arbitraire des jurys des Salons sous la Monarchie de Juillet, « l’éternel refusé » Théodore Rousseau accéda à la reconnaissance sous la Seconde République. Le Second Empire lui apporta à son tour la consécration officielle qu’il avait tant attendue. Fait chevalier de la Légion d’honneur en 1852, officier en 1867, il fut même convié à une « série » du château de Compiègne en 1865. Appartenant aux fondateurs de l’Ecole de Barbizon, du nom du petit village en lisière de la forêt de Fontainebleau où il avait commencé à peindre à l’hiver 1836-37, Rousseau était enfin reconnu et respecté comme l’un des grands paysagistes du XIXe siècle. Insatiable observateur de la nature, cet artiste insatisfait mena jusqu’à la fin de sa carrière en 1867 des expérimentations picturales dont certaines annoncent l’impressionnisme.

Groupe de chênes, Apremont, Forêt de Fontainebleau
Théodore Rousseau, Groupe de chênes, Apremont, Forêt de Fontainebleau, 1850-1852
Musée du Louvre, Paris, France. Photo © RMN-Grand Palais (Musée du Louvre) / Angèle Dequier

Se qualifiant lui-même « d’homme des forêts », le peintre n’avait qu’une seule religion, celle la nature qu’il contemplait sans relâche à Fontainebleau, multipliant dessins et études avant de toujours retravailler en atelier ses compositions finales. Les arbres surtout occupent la place centrale de son œuvre. Rousseau les considérait comme des êtres, au point d’appeler les dessins qu’il faisait d’eux des portraits. Et c’est bien un portrait de groupe, celui de quelques chênes dans les gorges d’Apremont, qu’il a mis en scène dans cette toile présentée au Salon de 1852.

Sous un ciel clair pommelé, quelques silhouettes majestueuses se dressent dans la chaleur de l’été offrant leur ombre à un troupeau de bêtes et à leur gardien. L’humain tient une place infime, comme dans tout l’œuvre de Rousseau, mais il n’y a pas d’écrasement dans cette disproportion. La conception romantique du paysage s’efface au profit d’un naturalisme dénué de velléité de séduction. C’est la réalité de la lumière verticale et écrasante du soleil de midi que l’artiste a voulu saisir. Exposée de nouveau avec 12 autres tableaux du peintre à l’Exposition universelle de 1855, cette œuvre faisait partie de la collection du duc de Morny lors de sa vente en 1865.

La communion panthéiste que vivait Rousseau avec la nature s’exprima en 1852 à l’occasion d’une pétition qu’il envoya à Napoléon III par l’intermédiaire du duc de Morny. Il y protestait contre l’exploitation commerciale des arbres et des rochers de la forêt de Fontainebleau, notamment au Bas-Bréau près de sa maison à Barbizon, qualifiant de « carnage » et de « condamnation à mort » les abattages et réclamant la protection du site. Une étude de la forêt suivit la pétition de Rousseau et, en avril 1861, l’Empereur signait un décret réservant 1 097 hectares « au plaisir exclusif du promeneur et de l’artiste », créant ainsi la première réserve naturelle dans la forêt de Fontainebleau.

Karine Huguenaud (mise en ligne : avril 2012 – mise à jour : 7 mars 2024)

Le Petit Palais accueille du 5 mars au 7 juillet 2024 une exposition consacrée à « Théodore Rousseau. La voix de la forêt »

Date :
1850 -1852
Technique :
huile sur toile
Lieux de conservation :
Paris, musée du Louvre
Crédits :
© RMN-Grand Palais (Musée du Louvre)
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