Aux sources de la politique arabe de la France : le Second Empire et le Machrek

Auteur(s) : ARBOIT Gérald (prés., annot.)
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Aux sources de la politique arabe de la France, pour explorer les origines d’une des questions récurrentes de la période actuelle, les entrées possibles étaient nombreuses, des plus récentes aux plus anciennes : de Gaulle, le Mandat français sur la Syrie et le Liban, les opérations militaires avortées en Égypte. Mais, pour saisir la genèse d’une politique digne de ce nom, c’est-à-dire globale, ces événements ponctuels ne pouvaient être retenus. Pourtant, certains pouvaient apparaître comme fondateurs. Ainsi de Gaulle (1), mais il n’était que l’héritier d’un système de pensée relatif au monde arabe, élaboré bien avant lui. Et nul besoin n’était de remonter à Bonaparte au pied des Pyramides pour en trouver l’origine (2). Malgré les apparences trompeuses que laissa l’historiographie républicaine, la France contemporaine empruntait beaucoup de ses traits au règne de Napoléon III.

Bien plus que ne l’avait fait le Premier Empire, le Second Empire a offert au pays ses cadres politiques et économiques. Dans une certaine mesure, le même constat peut être fait au niveau de la politique étrangère. Malgré l’admiration que l’on peut avoir pour le premier des Napoléon, il laissa à la fin de son règne une France diminuée, territorialement, économiquement et politiquement ; sa vision avait essentiellement été européenne, et le continent se fermait à l’influence de la France. L’issue du Second Empire paraît laisser les pays dans le même état. Mais, à y regarder de plus près, si la république put rapidement aligner ses gloires coloniales qu’étaient Doumer, Gallieni, Lyautey, c’est bien que Napoléon III embrassa le monde entier. On pense aussitôt à l’Algérie, au Sénégal, à l’Indochine.
L’expansion coloniale n’était qu’un des aspects de la politique mondiale de l’Empereur (3). Dans sa biographie politique de Napoléon III, Philippe Séguin n’hésite pas à en faire le premier chef d’état français « à mériter le titre de mondialiste » (4). La révolution et le Premier Empire s’étaient seulement limités à l’Europe. Quant à la Restauration et à la monarchie de Juillet, elles n’eurent guère les moyens d’avoir des ambitions (5). Avec Napoléon III, nous approchions le plus sûrement des sources de la politique arabe de la France.

Entre tradition et opportunité…

Un trait flagrant de la diplomatie de l’Empereur consistait en un tiraillement entre des éléments tirés de la tradition et d’autres offerts par l’action. Les premiers trouvaient évidemment leur origine dans l’histoire de France, ou plutôt dans l’idée que l’Empereur s’en faisait. Son éducation avait été faite en Suisse, au château d’Arenenberg, où il résida auprès de sa mère. De ce fait, sa vision de la France était d’abord celle d’un étranger. Il ne fallait pas oublier la lignée prestigieuse dont il était issu. Ces éléments traditionnels concouraient inévitablement à lui forger une idée de son pays à travers des prismes qui n’étaient plus valables. La nostalgie ne permettait pas de poser un regard cohérent sur les affaires de France. De même, la recherche de propositions pour le présent dans l’exemple qu’offrait le Premier Empire avait conduit le jeune prétendant à formuler un projet romantique. Et cruellement européen.
Parfois, ce romantisme le conduisit à embrasser une vision plus mondiale. Son esprit s’égara à imaginer un canal interocéanique au Nicaragua (6), à prôner une colonisation de l’Algérie et de la Guyane à la course effrénée aux territoires de la monarchie de Juillet (7). Dans ces questions coloniales, il puisait son inspiration dans les travaux saint-simoniens du père Enfantin (8). Son approche était alors plus économique que politique. Aussi, délaissait-il des zones qui n’attiraient pas la convoitise coloniale de la France et de l’Angleterre, parce que dépourvues d’intérêts économiques majeurs. C’était notamment le cas du Machrek, cet Orient proche tant qu’il était envisagé comme le berceau du christianisme, mais si lointain du moment qu’il s’agissait de le percevoir comme une entité politique. De ce point de vue, le futur Napoléon III ne se départissait pas de ses contemporains.

Lorsqu’il eut à prendre en main les affaires du pays dans cette région (située entre Occident et Extrême-Orient), il se souvint de ses idées saint-simoniennes. Il se rappela notamment que le rôle dirigeant devait revenir à une élite d’hommes d’action, l’état ne se contentant que d’un arbitrage. Napoléon Ier n’avait pas agi différemment dans son approche de la question. Il avait laissé faire son représentant près la Porte et ses consuls au Levant (9). Pour établir sa politique levantine, Napoléon III se servit des mêmes instruments. Son attention étant accaparée par les affaires européennes, le Machrek resta l’affaire de quelques spécialistes à Paris, journalistes, politiques et techniciens, et de professionnels sur place, consuls et militaires. Au département des Affaires étrangères (10), les affaires orientales n’intéressèrent vraiment que trois des neuf ministres qui s’y succédèrent ; et encore, seuls deux comptaient parmi les quatre grands ministres qui se succédèrent de 1852 à 1869. Thouvenel (11), Moustier (12) et La Valette (13) avaient une connaissance pratique des questions agitant la région ; ils avaient été ambassadeurs près la Porte avant leur nomination à la tête du Département. Tous trois eurent à affronter, à la tête de la diplomatie française, les emballements politiques du Machrek, tant en Syrie qu’en Égypte. Sur ces affaires, ils semblèrent jouir de plus de libertés que sur celles concernant la politique européenne ou le Mexique. Mais, leur influence restait limitée par le peu de cas que l’Empereur faisait de l’opinion de ses ministres (14).

Par ailleurs, les interférences étaient nombreuses entre les opinions du responsable de la diplomatie française et le souverain. Ce dernier était vulnérable aux influences de son entourage. Face aux pressions de la famille impériale le prince Napoléon à gauche, l’impératrice Eugénie à droite, les interventions du responsable de la politique extérieure de la France avaient peu de poids. Elles n’en avaient guère plus devant l’opinion des représentants des puissances étrangères, notamment Lord Cowley, qui avaient facilement accès à l’Empereur. Enfin, les avis du ministre des Affaires étrangères étaient souvent battus en brèche en conseil par ses collègues de la Guerre ou de la Marine. Pour le premier, l’Orient se limitait surtout à l’Algérie (15) ; lorsqu’il était amené à désigner des officiers pour des missions au Levant, il les prenait dans les contingents de l’armée d’Afrique. Mais, le Maghreb n’était pas le Machrek et les intérêts des militaires se heurtaient forcément à ceux, différents, des diplomates. Pour la Marine, la Méditerranée orientale n’avait guère d’importance stratégique propre, hormis dans le cadre d’initiatives internationales. Ce fut notamment le cas pendant les crises grecque, égyptienne et syrienne sous le règne précédent et au cours de la guerre de Crimée durant celui de Napoléon III. La prochaine ouverture du canal de Suez l’amena à chercher à baliser la mer Rouge ; à l’occasion, elle trouvait l’appui des négociants et armateurs français au Moyen-Orient. Ce fut le cas à la fin de l’année 1868, avec l’offre de développement de Chayk Sa’îd, sur le détroit de Bâb al-Mandab, par un mandataire de la maison Rabaud de Marseille (16).

En d’autres endroits encore, les intérêts de la France rencontrèrent ceux de ses commerçants. Ce fut surtout le cas en Égypte, où le programme de civilisation de Muhammad ‘Alî, soutenu par la monarchie de Juillet, avait permis la constitution d’une forte communauté française. Autrement, la politique française à destination du Machrek n’intéressa guère les milieux économiques métropolitains. Marseille, port de l’Orient, s’intéressait déjà à l’Asie, où l’Angleterre tolérait encore qu’une autre nation partageât les miettes de son empire. Les autres ports français étaient tournés vers les Amériques. Seule la guerre de Sécession détourna les milieux cotonniers des États-Unis pour l’Égypte (17). Mais, cet intérêt ne fut pas durable.
L’action de la France au Machrek restait donc du domaine de la Haute Politique. Contrairement à des questions sensibles pour l’Empereur comme l’Italie ou le Mexique, elle relevait uniquement des ministères et de leurs agents. La population n’en était guère informée. De toute façon, elle ne disposait aucunement de moyen d’agir sur les affaires du pays. Toutefois, son émotion suite aux massacres de chrétiens ou sa participation massive à l’introduction des titres de la Compagnie Universelle du canal de Suez ne manquèrent pas d’influencer l’attitude impériale. Mais, il ne s’agissait que d’interventions ponctuelles.

Or, l’élaboration d’une politique, si elle se faisait à partir de traditions, ne pouvait souffrir l’inconstance, la négligence. En Orient notamment, il était pratiquement exclu que Napoléon III se substituât à sa diplomatie officielle. Le manque de vision d’ensemble du souverain, dans sa définition d’une politique mondiale, laissait ainsi le champ libre aux différents ministères. Ces derniers s’appliquèrent donc à combler le vide idéologique laissé par l’Empereur. La France manifestait l’espoir d’une domination ou, au moins, d’une influence dans le cadre d’une rivalité impériale avec la Grande-Bretagne. D’où une stratégie condamnée à s’appuyer sur une tactique au coup par coup. La France n’entrevoyait de destinées glorieuses qu’en Europe ; les expéditions lointaines, comme celle de Syrie, ne s’engageaient qu’au hasard des événements, selon des vues qui affectaient un certain désintéressement. De plus, les différents ministres ne voyaient pas cette politique arabe du même point de vue. À la guerre, le maréchal Randon était peu favorable au dispersement de ses troupes ; aussi renâcla-t-il à laisser les troupes aux ordres de Thouvenel lors de la crise entre Maronites et Druzes (18). À l’éphémère département des Colonies (19), le prince Napoléon eut à faire face au scepticisme de Walewski, dans le cas du projet d’implantation en mer Rouge. Concernant ces terres vierges de colons, mis à part Britanniques, au débouché du canal de Suez, la diplomatie française semblait à cours d’imagination… En fait, l’extrême prudence du ministère des Affaires étrangères se justifiait par sa longue opposition à toute politique indisposant Londres.

Entre professionnels et amateurs…

La direction de l’action politique en destination du Machreck incombait, seule, au Département des Affaires étrangères. Ce ministère possédait les services nécessaires à la conduite de la politique extérieure décidée par l’Empereur. À Paris, outre le ministre des Affaires étrangères et son cabinet, se trouvaient les services permettant la préparation de la politique à destination du monde arabe : les directions politique et consulaire, l’école des « Jeunes de Langues » formant les interprètes (20). En Orient, il disposait seul de moyens de renseignements et d’action permanents grâce au réseau consulaire. En effet, un décret de la Convention, du 14 février 1793, avait rattaché les consulats au ministère des Relations extérieures. Ainsi prenait fin le privilège du département de la Marine, institué par Colbert. Dès lors, les postes français établis au Levant relevaient de l’ambassade de Constantinople. Ce dernier répondait à une longue tradition, dont l’origine se trouvait dans le régime capitulaire, initié au XVIe siècle dans les échelles du Levant et de Barbarie. Les Français y jouissaient du premier rang (21).

Entre 1848 et 1870, la configuration de la représentation consulaire au Machrek varia peu. Dix consulats y étaient installés ; les consulats généraux de Beyrouth, Jérusalem et Alexandrie commandaient toute l’activité, politique et commerciale, de la France dans la région. La vie dans ces différents postes était variable. Certains échappaient à la chaleur et aux tempêtes de sable, aux épidémies de choléra, aux vols et aux meurtres grâce à un subit intérêt politique, jaillissant à la suite d’un massacre de chrétiens ou d’un bras de fer au sujet des Capitulations. D’autres brûlaient d’ennui sous le soleil, attendant une improbable mission dans quelque contrée du désert arabique, transformant les agents en géographes, en historiens ou en archéologues. Pourtant, tous avaient en commun, du fait du régime capitulaire, la jouissance de nombreuses prérogatives, tant au niveau des immunités et des pouvoirs en matière de police qu’en matière judiciaire.
Les agents étaient donc de vrais ministres publics. Comme tels, leur personne était inviolable. Ils ne pouvaient ni être retenus prisonniers, ni être jugés par une instance judiciaire locale. Leur pouvoir était symboliquement marqué par un droit de préséance dans les églises sur l’ensemble du corps consulaire de la résidence. Et, souvent, le pouvoir des consuls se résumait à cette survivance de l’Ancien Régime. Car, leurs privilèges variaient à travers le Machrek, d’un poste à l’autre, suivant l’usage qu’il avait été fait antérieurement des capitulations. D’une façon générale, ils étaient importants là où le commerce ou les intérêts politiques français l’étaient.
Les exigences propres à l’administration de la justice sur leurs nationaux au Levant et à Mascate leur avaient créé une obligation toute spéciale. Certes, aucun ne jouissait de la juridiction criminelle sur ses nationaux ; seule une exception était tolérée pour les équipages des vaisseaux de commerce faisant relâche dans les eaux levantines. Ils devaient se borner à informer directement l’ambassadeur à Constantinople de toutes les circonstances des affaires judiciaires. Mais, ils bénéficiaient de pouvoirs de police importants pour contrôler la communauté nationale et veiller à l’état sanitaire du pays. Surtout, les consuls français au Levant étaient dotés d’une juridiction civile, commerciale et pénale. Bien que restreinte, se résumant à leurs nationaux et à un simple arbitrage dans les affaires litigieuses, civiles et commerciales, elle offrait à un citoyen français de ne pas être justiciable devant un tribunal arabe, ni pour ses crimes et délits, ni pour ses contestations avec un étranger.

L’action diplomatique de la France échappait aux consuls. Elle était définie par les ministères parisiens, plutôt que par le réseau consulaire au Machrek. Les premiers formaient en effet la ligne décisionnelle d’une politique arabe de la France, tandis que le second en était sans conteste l’épine dorsale. De ces postes disséminés à travers le Proche-Orient émanaient tous les renseignements servant à l’élaboration des orientations diplomatiques de la France. Ils provenaient essentiellement de leurs contacts avec la communauté française de leur ressort. L’évolution des conditions de transport en Méditerranée amenait également de nouveaux Français, parfois auxiliaires de l’influence diplomatique nationale. En effet, parmi les nombreux voyageurs qui débarquaient, de plus en plus nombreux, dans les ports du Machrek, il n’était pas rare que se cachât un agent des Affaires étrangères, de la Guerre, de la Marine ou de l’Instruction publique.
Les premiers venaient explorer le désert syrien, cet hinterland de la Montagne libanaise, véritable enjeu de puissance pour la France et l’Angleterre. Il était aussi un objectif de politique extérieure, depuis que le général Bonaparte avait échoué dans sa conquête de Saint-Jean d’Acre du fait des incursions bédouines. Enfin, il représentait une autre route terrestre pour les Indes. Certains agents français au Levant, comme le jésuite anglais William Palgrave/Michael Cohen, se souvenaient de la mission du chevalier de Lascaris, à la fin du Premier Empire (22). Fin août 1861, il proposa au gouvernement français, soit l’Empereur, soit son ministre des Affaires étrangères, un projet d’union franco-wahhabite (23). Elle se formerait en deux temps : d’abord réunir toutes les tribus du Nadj autour d’un objectif commun, l’expulsion d’Arabie, de Syrie et de Mésopotamie de la Porte et de l’Angleterre ; ensuite l’union, sur la base du christianisme, de ce nouvel empire à la France. Mais ce parrainage n’était que de circonstance. La France qui devait intervenir dans cette entreprise jésuite était la protectrice des chrétiens d’Orient (24). Tentée deux fois, en août 1861 et en février 1862, l’opération échoua deux fois. Inquiété de ces velléités francophile, le pro-délégué apostolique en Syrie, Mgr Valerga, demanda l’éloignement du père jésuite (25).

De même, Paris préférait laisser agir ses propres agents. D’autant qu’elle disposait sur place de spécialistes, ponctuellement comme en Syrie ou en mer Rouge le secrétaire interprète Charmes Scheffer. Elle entretenait également des missions militaires au Machrek pour mener à bien de telles opérations de renseignement. Les vaisseaux mouillant dans les différents ports des échelles du Levant étaient tous à même de procéder à des reconnaissances topographiques ou hydrographiques. En Égypte, malgré les vicissitudes de la succession de Muhammad ‘Alî, des officiers étaient présents depuis la monarchie de Juillet (26). Au Liban, d’autres accompagnèrent la mise en place du nouveau Règlement organique de juin 1861. Dans de nombreux cas, il s’agissait d’offrir les concours de la France à la constitution d’états modernes.

Les missions du ministère de l’Instruction publique tenaient plus du prestige que de la mission civilisatrice. Elles concernaient les vestiges archéologiques de Mésopotamie, de Palestine ou de Phénicie. Elles étaient le fait de scientifiques, comme Caignart de Saulcy (27), Renan (28) ou le duc de Luynes (29). Elles offrirent la gloire à certains fonctionnaires, qu’ils fussent de l’administration des Beaux-Arts comme Mariette (30), ou des Affaires étrangères, comme Delaporte (31) et Fresnel (32). Victor Place, consul à Mossoul, eut moins de chance : les résultats de ses recherches disparurent dans le Tigre et sa carrière se brisa à Calcutta (33)… Ces hommes n’influaient pas directement sur la politique arabe de la France. Mais, ils concourraient utilement à conforter sa position face à l’omniprésence des agents politiques, militaires et scientifiques anglais. De même, la présence d’une forte communauté ouvrière française, ou sous protection française, sur le chantier du canal de Suez agissait favorablement dans le sens des intérêts du pays. Même si la diplomatie officielle s’en tenait à l’écart, cette entreprise était la vitrine idéale de la mission civilisatrice de la France. Cependant, il était vrai que l’attitude de Ferdinand de Lesseps ne plaidait pas toujours en sa faveur.

La définition d’une action publique

La politique arabe du Second Empire était donc la conjonction de différentes influences. Au sommet de l’état, la définition des grandes orientations à destination du Machrek dépendait plus de la bonne entente des ministres des Affaires étrangères, de la Guerre et de la Marine que des grandes orientations de l’Empereur. Aussi sur le terrain, les agents français étaient souvent amenés à élaborer une action sans y être autorisés au préalable. Souvent bien préparés à une mission consulaire ou militaire, ils l’étaient moins pour gérer une crise qui, compte tenu de l’endroit, ne manquait pas de devenir internationale. Ainsi, le consul général de Jérusalem, Paul Émile Botta (34), face à l’affaire des Lieux saints. La question du protectorat religieux de la France avait été posée, à la suite du retour de la Syrie sous l’autorité de la Porte, ouvertement, par la Russie et, de façon détournée, par le Saint-Siège. Cette situation était apparue de façon éclatante à la fin de la Monarchie de Juillet ; elle perdura jusqu’en mai 1850, lorsque la diplomatie de Louis-Napoléon se lança sur une scène orientale, où depuis deux ans elle n’avait guère paru. L’objectif était autant de politique intérieure, l’adhésion des catholiques au régime, qu’internationale, le retour en Orient de la France. Mais cette question de prestige rencontra l’intérêt opposé de Nicolas Ier, dont l’influence s’étendait aux pèlerins de rite grec.

En raison de la valse des ambassadeurs de France à Constantinople et des ministres des Affaires étrangères à Paris, le consul fut amené à définir une réponse. La question portait sur une violation de sanctuaires chrétiens ; la solution se trouvait dans le retour à l’esprit des Capitulations. La France avait été reconnue protectrice des catholiques de l’Empire ottoman. Mais, la faiblesse de la jeune république incitait les puissantes Autriche et Russie à réclamer des droits similaires. Derrière ces velléités égalitaires se cachait en fait la volonté de se partager les dépouilles de la Porte. De fait, les enjeux échappaient largement au consul. Se crispant sur la seule question des Lieux saints, il perdait de vue la dimension internationale de la crise. Quant aux puissances européennes, elles négligeaient la dimension locale de cette « querelle de moines ». De fait, la guerre de Crimée ne résolut en rien la question du protectorat français.

À Jérusalem, un nouvel agent de contestation était apparu. Faisant apparemment jeu commun avec le consul Botta, le patriarche catholique, Mgr Valerga, cherchait en fait à s’imposer sur les représentants français (35). Lui aussi entendait remettre en cause le système capitulaire. Son action témoignait du désir de l’église catholique romaine de jouer toutes les cartes de la protection des chrétiens au Machrek à son seul profit, plutôt qu’au seul bénéfice de la France. Cette alliance de fait cessa avec le renvoi de Botta (36) et la nomination d’un nouveau consul, Barrère (37) ; ce dernier devait rester quatorze ans à ce poste, démontrant la volonté du gouvernement impérial de préserver le statu quo issu de la guerre de Crimée dans la gestion des Lieux saints. Fin janvier 1862, le changement de position de la France apparut clairement, délaissant la crispation sur les avantages du protectorat pour une action concertée avec la Russie (38). L’opposition pontificale, qui commençait à recevoir un appui diplomatique de la part de l’Autriche, n’en fut que renforcée. À la chute de Napoléon III, la France avait cependant résolu la question la plus immédiate, celle de son prestige. Mais, le protectorat restait un édifice fragile, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de Jérusalem. La crise syrienne ne tarda pas à le montrer…

La guerre de Crimée avait contribué à créer une tension, dans l’empire ottoman, entre communautés musulmanes et chrétiennes. L’agression russe était largement perçue comme une attaque occidentale contre le Dar al-Islam, cette terre sacrée aux yeux de tout musulman. Qu’importait que la France et la Grande-Bretagne se fussent rangées aux côtés de la Sublime Porte, tout chrétien apparaissait comme un ennemi. Les concessions arrachées au Sultan lors du Congrès de Paris, en faveur des minorités chrétiennes, et la large opulence dans laquelle elles vivaient, grâce à leurs activités commerciales, renforcèrent ce ressentiment populaire. Il ne tarda pas à se muer en fanatisme, suite à la crise économique qui s’abattit sur le Machrek. Des émeutes eurent lieu d’Alep à Naplouse à compter de la fin 1858. Les puissances européennes considérèrent ces événements comme une simple affaire ottomane, du moment que la Porte semblait gérer cette crise.
Le massacre de Djeddah les poussa à modifier leur façon de voir. Dans la nuit du 15 juin 1858, une insurrection causa la mort des consuls de France et de Grande-Bretagne. La violation de l’intégrité physique de ces représentants consulaires impliquait inévitablement une réaction de leur pays respectif. Une enquête fut diligentée par Paris et Londres afin de régler au mieux, et de concert avec la Porte, ces événements (39). Seulement, les commissaires européens n’étaient pas prêts à imaginer que cette poussée de fanatisme fût le signal d’un embrasement général en Syrie, en Crète et dans les Balkans.
La situation dans la première province ottomane concernait bien évidemment la politique arabe de la France. Les rapports consulaires mentionnaient la montée de la tension chez les musulmans. Ils signalaient aussi l’effort d’apaisement des autorités locales. Puis, ils ne purent que rapporter l’ampleur d’un désastre imminent. À cette instabilité interconfessionnelle s’ajouta au même moment, suite au décès du vieux gouverneur nommé en 1840, Haydar Abîllama’, une lutte d’influence au sein du district chrétien de la Montagne libanaise (40). Compte tenu du contexte, les consuls français et britannique, Edmond de Lesseps et Noël Moore, se gardèrent d’intervenir dans ces querelles de clan. Mais, chacun avait son candidat, comme la Porte et chacun des seigneurs féodaux de la Montagne d’ailleurs.

Le choix du nouveau gouverneur chrétien par Constantinople entraîna immanquablement la sécession d’une partie de la Montagne (41). En cherchant le soutien des paysans, sans lesquels ils ne pouvaient espérer faire valoir leur bon droit, les opposants provoquèrent en fait leur chute. Loin de se rebeller contre l’autorité établie, les ruraux se levèrent contre les privilèges féodaux (42). Cette discorde dans le camp chrétien, de l’automne 1858 aux premiers mois de 1860, servit de détonateur pour un embrasement de toute la Syrie. Les efforts du consul de France, Edmond de Lesseps jusqu’en mai 1859, puis Stanislas Bentivoglio (43), pour ramener la tranquillité dans le camp chrétien se révélèrent vains et ne servirent qu’à renforcer l’antagonisme intercommunautaire. L’assassinat d’un ouvrier chrétien, début mai, suffit à déclencher un massacre général (44). En un mois, il y eut près de six mille tués, des dizaines de milliers de réfugiés, dont le dénuement était un autre facteur de décès (45).
Cette nouvelle flambée de violence provoqua l’indignation de l’Europe. La France était décidée à agir (46). Mais l’équilibre européen commandait une intervention combinée de l’Europe, en fait de la France et de la Grande-Bretagne, avec l’appui de toute autre bonne volonté (47). Deux mois furent nécessaires. Et le résultat n’était pas à la hauteur de la générosité prêtée par Napoléon III à l’Europe. Seule la France fournissait un corps expéditionnaire, la Grande-Bretagne offrant le concours de sa marine. L’Autriche, la Russie et la Prusse ne consentaient qu’à faire partie de la commission européenne qui devait surveiller la pacification du pays. Et réfléchir au nouveau statut de la Montagne, le deuxième en vingt ans.

Pendant ce temps, désirant limiter au minimum la latitude des Européens, la Porte dépêchait son propre corps expéditionnaire pour restaurer l’ordre ottoman en Syrie. L’objectif assigné à son commissaire était de mener sa mission à terme avant le débarquement des troupes françaises. En aucun cas, elle ne devait atteindre Damas (48). Cette mauvaise volonté de la Porte entrava aussi bien l’action du corps expéditionnaire que des commissaires européens. Les militaires furent rapidement contraints à mener garnison à Beyrouth et dans les grandes villes de la Montagne. Leur présence ramenait les habitants. Mais, il est clair que Druzes et chrétiens auraient de grandes difficultés à revivre en bonne intelligence.
Ce constat était également celui des diplomates. Mais, toute la difficulté résidait dans la possibilité à amener la Porte à la même observation. D’autant que le commissaire ottoman, Fu’âd Pacha, s’y entendait pour paralyser leur action, avec le concours actif de son collègue anglais. En face, les représentants français ne semblaient pas en mesure d’offrir une position arrêtée. Le général Beaufort d’Hautpoul, frustré de devoir se contenter d’une simple promenade militaire dans la Montagne, se laissa aller à songer à la Haute Politique. Se souvenant de ses années d’Algérie, il se fit le chantre d’un « Royaume Arabe » de Syrie confié à son ancien ennemi réfugié à Damas, l’émir ‘Abd al-Qâdir (50). Sa conduite magnanime durant les massacres lui valait la reconnaissance de toutes les parties. Mais, il ne se révéla pas à la hauteur des espérances françaises. Quant aux représentants anglais, lord Dufferin, et ottoman, ils préféraient une solution purement syrienne. Alors, l’officier se souvint de son séjour au Liban trente ans auparavant et proposa de confier le gouvernement du Liban au descendant de l’ancien émir de la Montagne (51). Cette fois, ce fut aux diplomates français de rejeter cette proposition (52), contraire à leurs travaux en faveur d’une union de la Syrie. De Paris, le ministre des Affaires étrangères constatait avec dépit cette division (53). Aussi, Thouvenel décida-t-il de pousser son commissaire à faire étudier cette possibilité par la commission (54). Mais les discussions n’avançaient pas. Neuf mois après le début de ses travaux, aucune avancée significative n’était à noter.

Pour sortir de l’impasse, Thouvenel entreprit de transférer la commission de Beyrouth à Constantinople (55). Dans le même temps, il fit pression sur les chancelleries européennes pour qu’elles acceptassent une autonomie de la Montagne libanaise sous la tutelle d’un gouverneur chrétien. En moins d’un mois, les vues françaises triomphaient d’un an d’immobilisme. Le 7 juin 1861, le nouveau Règlement organique du Mont-Liban était signé par toutes les puissances européennes et la Porte. Le lendemain, les premières unités françaises quittaient le Machrek. La promenade militaire, si elle avait été un échec, se terminait politiquement bien. Quant au  » Royaume Arabe « , Napoléon III devait se charger de tenter de lui donner vie en Algérie (56). Bizarrement, il ne chercha pas à tenir le même discours teinté d’arabisme en Égypte, pourtant la seule nation arabe, au sens occidental du terme.

Les contingences d’une définition géopolitique

Pendant que la Syrie oscillait entre crise économique et crise professionnelle, l’Égypte entérinait le plan de civilisation légué par Muhammad ‘Ali. Après un bref intermède défavorable, durant le règne réactionnaire de ‘Abbâs, entre 1849 et 1854, la France était appelée à y jouer un rôle de première envergure. Ses nationaux représentaient la première colonie du pays. Ils occupaient des postes dans toutes les administrations. Ils étaient aussi bien présents dans la finance que dans le commerce. Mais, à force de maladresses, Paris laissa passer sa chance. Les événements révolutionnaires de février 1848 en étaient en partie responsables. Faute de disposer des moyens politiques de s’opposer au projet anglais de chemin de fer, la France ouvrait la porte à l’Angleterre et s’obligeait à abandonner son soutien à l’indépendance politique de l’Égypte (57). Privée de ce moyen d’action, même sous les règnes des francophiles Sa’îd et Ismâ’îl, elle dut se contenter de reprendre son influence culturelle. Ce faisant, elle servait les projets d’émancipation des vice-rois vis-à-vis du sultan. Des architectes du Paris d’Haussmann firent le voyage d’Égypte. Les écoles de médecine et de droit, fondées par des Français sous le règne de Muhammad ‘Ali, rouvrirent leurs portes. Des missions d’étudiants reprirent le chemin de la France où deux écoles, l’une fondée sous le premier vice-roi, la Mission égyptienne (58), l’autre créée ex nihilo en 1869, l’école égyptienne (59), les attendaient. À celles-là s’ajoutait, en Égypte, le réseau des écoles catholiques, largement stipendiées par le gouvernement français. L’Institut d’Égypte, fondé par Bonaparte, fut rétabli. Image culturelle de la nouvelle Égypte, il était aussi le symbole de la primauté culturelle française (60).

Dans cette oeuvre de réorganisation du pays, la France ne sut pas traduire en terme de coopération culturelle officielle les honneurs individuels dont les vice-rois couvaient des citoyens français. La seule exception notoire fut la présence d’une mission militaire, surtout à compter de 1861. Mais, là où les égyptiens attendaient un geste fort, comme la nomination du maréchal Mac-Mahon à sa tête (61), le ministre de la Guerre se contenta de reprendre la politique qui avait présidé avant 1854. Des officiers étaient envoyés à Alexandrie pour s’occuper des fortifications. Seulement, l’Égypte demandait plus. Seule l’action des chefs de mission, le général Princeteau, entre 1863 et 1864, qui avait déjà commandé dans le pays sous l’ancien régime, et le colonel Mircher, à compter de 1864, put faire évoluer ces impératifs (62). Des écoles d’application furent ouvertes. Les officiers français prirent du service dans l’armée égyptienne. Leur influence fut telle qu’en 1863, un contingent de soldats du vice-roi fut envoyé combattre au Mexique.
Cette participation était avant tout une démonstration d’amitié de Sa’îd. Mais, elle témoignait aussi de l’influence de la France dans le pays. D’essence purement culturelle, elle retouchait enfin au politique. Toutefois, ce gage égyptien commandait un geste de Paris. L’affirmation nationale de l’Égypte remettait en cause la vassalité à la Porte. Le soutien d’une puissance occidentale était nécessaire aux vice-rois. L’appui de la France était naturellement souhaité (63). Encore eût-il fallu que Paris disposât d’une politique. Les impératifs de sa politique européenne la contraignaient à une entente avec Londres. Or, placée sur la route maritime des Indes, l’Égypte était une question d’intérêt national en Grande-Bretagne. Face au retour en puissance de la France auprès du vice-roi, elle en était revenue à sa politique traditionnelle d’influence contraire auprès du sultan. Aussi, aurait-il été logique que le gouvernement de Napoléon III soutînt les desseins d’Ismâ’il en faveur de l’indépendance de l’Égypte. La volonté conjuguée d’immobilisme de Paris, de Constantinople et de Londres condamnait le vice-roi à un combat solitaire et, au regard de sa déchéance en 1876, perdu d’avance.

La timidité du soutien politique de la France tranchait avec l’arrogance dont elle faisait preuve dans son concours à la spoliation des richesses du pays. Ses représentants n’hésitaient pas à abuser de la menace pour faire valoir des prétentions financières pas toujours vérifiées (64). En fait, dépourvus d’instructions politiques, ils se bornaient à défendre ses ressortissants (65). Cette attitude valait aussi bien pour les négociants d’Alexandrie, soucieux de compenser leurs pertes commerciales par les largesses du trésor vice-royal, que pour la grande oeuvre du règne de Napoléon III en Égypte, le canal de Suez. Opération éminemment privée pour les diplomates français, elle suscita évidemment l’opposition acharnée de la Grande-Bretagne. Comme des capitaux français étaient engagés, le gouvernement français tenta, chaque fois que cela était possible, des médiations afin de débloquer la situation. En juillet 1865, l’Empereur s’engagea même personnellement pour lever l’hypothèque anglaise (66). Dans le même temps, sa marine cherchait à assurer la pérennité de l’entreprise en tentant de s’implanter sur un de ses débouchés géographiques (67). En mer Rouge, l’assassinat d’un agent consulaire français, Henri Lambert, offrit le prétexte à une installation (68). De par ses activités économiques, il avait été amené à sillonner les rivages du détroit de Bâb al-Mandab. Au point de susciter l’inquiétude des représentants anglais et de précipiter son cruel destin. Cependant, il avait engagé des négociations avec quelques chefs Afars, à propos d’un mouillage en baie d’Obock (69). Géopolitiquement, cette terre n’avait d’intérêt qu’avec l’ouverture du canal de Suez. En 1865, les obstacles étaient encore nombreux dans le désert égyptien. Aussi, le ministre de la Marine jugea-t-il utile de la posséder, mais en aucun cas nécessaire de la protéger par les vaisseaux de l’Empereur. Quatre ans plus tard, lors de l’ouverture du canal, il était trop tard pour changer de position. Les voiles françaises s’étaient faites trop rares et les questions allemandes occupaient dorénavant la diplomatie française.

L’oeuvre de Ferdinand de Lesseps eut deux autres conséquences sur la politique arabe de la France. La première tenait à son appréciation géopolitique. Dans une perspective de soutien au percement du canal, Paris avait été amené à délaisser les régions où sa présence, notamment économique, ne correspondait à aucune réalité. Ainsi, dans le golfe arabo-persique, aucun vaisseau français ne vint croiser entre 1843 et 1865 (70). La seconde conséquence était une nouveauté dans cette seconde moitié du XIXe siècle : l’exportation de capitaux comme arme diplomatique. À la suite de la Compagnie Universelle du Canal de Suez, de nombreux capitaux se déversèrent sur le Machrek. L’Égypte était la destination la plus séduisante, le vice-roi étant toujours à court de liquidités (71). Politiquement, le contrôle de la dette flottante servait la politique française. Mais, la concurrence était rude et la puissance financière des groupes parisiens mal assurée (72). La Syrie ne représentait pas le même attrait spéculatif. Les investissements concernaient seulement la route carrossable reliant Beyrouth à Damas. Le potentiel économique que représentait la soie n’intéressa pas réellement les industriels français.
Assurément, ces initiatives françaises, tantôt diplomatiques, tantôt militaires, tantôt financières, ne formaient pas une réelle politique arabe à destination du Machrek. Elles ressemblaient plus à une série de tâtonnements, plus ou moins chanceux, plus ou moins audacieux, qu’à une réelle politique. Toutefois, deux lignes directrices se dégageaient clairement. La première était résolument chrétienne, l’autre prenait conscience du rôle intermédiaire de cette région, entre Occident et Extrême-Orient. L’unité de cette politique bicéphale tenait à un souci du monde arabe. Cet arabisme avant la date trouva à s’exprimer au Liban. Mais, les contingences géopolitiques de l’action française l’occultèrent en Égypte, cette nation arabe en devenir. Cette pensée formait le cadre de l’action future de la France. Mais, la IIIe République s’en détourna. En fait, elle n’avait guère les moyens d’agir dans cette région stratégique pour la domination mondiale de la Grande-Bretagne. De plus, la politique algérienne la détournait d’une politique de puissance au Machrek. Il fallut attendre le retour au pouvoir de Charles de Gaulle pour en revenir à des cadres, des orientations diplomatiques, une ligne établie un siècle auparavant…

Notes

(1) Voir Gérald Arboit, "De Gaulle et le Liban", in Histoire & Anthropologie, n°4, 1993, pp.73-76 et "De Gaulle au Liban", in Les Cahiers de l'Orient, n°32-33, 1994, pp.209-219.
(2) Jacques Frémeaux, La France et l'islam depuis 1789 (Paris, Presses Universitaires de France, 1991), et Henry Laurens, Le Royaume impossible, La France et la genèse du monde arabe (Paris, Armand Colin, 1990).
(3) Voir Annie Rey-Goldzeiger, Jacques Thobie, "La France coloniale de 1830 à 1914", in Jean Meyer, Annie Rey-Goldzeiger, Jacques Thobie, Histoire de la France coloniale..., I (Paris, Armand Colin, 1991), pp.461-492.
(4) Philippe Séguin, Louis-Napoléon le Grand (Paris, Grasset, 1990), p. 170.
(5) Voir Gérald Arboit, Aux sources de la politique arabe de la France. Le Second Empire au Machrek, doctorat, 1999, Strasbourg III (L'Harmattan, 2000). Nous nous abstiendrons de renvoyer à ce travail au cours de cet article.
(6) Louis-Napoléon Bonaparte, "Projet de jonction des océans Atlantique et Pacifique au moyen d'un canal", in Œuvres de Napoléon III, II (Paris, Plon, 1856), pp.461-543.
(7) Ibid., "Nos colonies dans le Pacifique", Le Progrès du Pas-de-Calais du 14 juin 1841, in Ibid., pp.3-8.
(8) De la colonisation de l'Algérie (Paris, 1843), 2 vol.
(9) Voir Gérald Arboit, "L'impossible rêve oriental", in Revue du Souvenir napoléonien, n°402, 1995, pp.27-36.
(10) André Martel, "Le Second Empire", in Jean Baillou, Les Affaires étrangères et le corps diplomatique français, I (Paris, éd. du CNRS, 1984).
(11) Archives du Ministère des Affaires étrangères (AMAE), Dossiers personnels, 1resérie, vol.306 et Yves Bruley, "Thouvenel (Édouard)", in Jean Tulard, Dictionnaire du Second Empire (Paris, Fayard, 1995), p.1260. Voir aussi Lynn M. Case, Édouard Thouvenel et la diplomatie du Second Empire (Paris, Pédone, 1976).
(12) AMAE, op. cit., vol.239 et Francis Choisel, "Moustier (Desle Marie René François Lionel, marquis de)", in Jean Tulard, op. cit., pp.857-858.
(13) AMAE, op. cit., vol. 193 et Yves Bruley, "La Valette (Charles, marquis de)", in Ibid., p.714.
(14) Voir les propos de Napoléon III au prince Albert de Saxe-Cobourg, en octobre 1862. L'Empereur affirmait que ces "grands rouages" ne devaient "rien faire sans [son] assentiment" [Alain Plessis, De la fête impériale au mur des fédérés (Paris, Points Seuil, 1973), p.38]. Voir aussi Bernard Gaudillière, "Conseil des ministres", in Jean Tulard, op. cit., pp.342-343.
(15) Sur l'histoire des bureaux arabes, voir Jacques Frémeaux, L'Afrique à l'ombre des épées. L'administration militaire française en Afrique blanche et noire (1830-1930) (Paris, 1992).
(16) AMAE, Mémoires et Documents (MD) Turquie, vol.132, lettres de Frédéric Van Den Broek à Moustier du 25 janvier, et réponse du 23 mars 1869, f.22-25 et 26-27.
(17) David S. Landes, Banquiers et Pachas (Paris, Albin Michel, 1993), pp.77-82, 117, 236-237.
(18) Voir ses Mémoires, II (Paris, Typographie Lahure, 1877), p.33.
(19) Jean Martin, "Ministère de l'Algérie et des Colonies (1858-1860)", in Jean Tulard, op. cit, pp.830-831.
(20) AMAE, MD Turquie, vol.170 et 171 ; Maurice Degros, Les Jeunes de Langues de 1815 à nos jours, in Revue d'Histoire Diplomatique, vol. XCIX, 1985, pp.45-68.
(21) Alex de Clercq et M.C. de Vallat, Formulaire des chancelleries diplomatiques et consulaires, 2 (Paris, 1869), pp. 383-384.
(22) Voir Gérald Arboit, Un jésuite au service de la France du Second Empire : les missions du pre Cohen dans les déserts de Syrie et d'Arabie, in Revue d'Histoire ecclésiastique (Louvain-la-Neuve), 2000. Sur Lascaris, voir Gérald Arboit, Le dernier rêve oriental de Napoléon, in Revue de l'Institut Napoléon, 1995, n°163, pp.55-72.
(23) AMAE, MD Turquie, vol. 123, lettres à Napoléon III et à Thouvenel du 31 août 1861, f.33 et 31
(24) Archivum Romanum Societatis Iesu, Syria, 4, VIII (7), claircissement sur la nation arabe... du 19 juin 1861.
(25) Archivio Segreto Vaticano (ASV), Segretaria di Stato, 1864, rubr. 280, fasc.3, lettre à Mgr Barnabo du 19 septembre 1863, f.20-23.
(26) Voir Hugues Mircher, Un officier français, chef de mission de coopération militaire au XIXe siècle, in Revue Historique des Armées, 1986-4, pp.86-96.
(27) F. de Saulcy, Voyages autour de la mer Morte et dans les terres bibliques (Paris, 1853) et F. de Saulcy et l'abbé Michon à Jérusalem et en Terre Sainte, in Revue des Deux Mondes, 1852, pp.401-420; Sur sa mission de 1863, F. de Saulcy, Voyages en Terre Sainte, 2 volumes (Paris, 1865) ; Francis Choisel, "Saulcy (Louis Félicien Joseph, Caignart de)", in Jean Tulard, op. cit., p.1167.
(28) Ernest Renan, Mission de Phénicie, I (Paris, 1865) et Lockroy, Voyage en Syrie. Mission de M. Renan en Phénicie, in Tour du Monde, 1863 ; Henri Tronchon, Ernest Renan et l'étranger (Paris, Les Belles Lettres, 1928), pp.78-88, 91-107, 115-154.
(29) Honoré d'Albert de Luynes, Voyages d'exploration en Mer Rouge, à Pétra et sur la rive gauche de Jourdain. Ouvrage posthume publié par ses petits-fils, sous la direction de M. le comte de Vogué, 4 vol. (Paris, 1871-1876).
(30) AMAE, Affaires Diverses et Politiques égypte, vol. 1_bis, Mariette, expédition scientifique 1852 ; Gilles Lambert, Auguste Mariette. L'Egypte ancienne sauvée des sables (Paris, J.-C. Lattès, 1997)
(31) Ibid., Dossiers personnels, op. cit., vol.95.
(32) Maurice Pillet, L'expédition scientifique et artistique de Mésopotamie et de Médie (1851-1855) (Paris, éd. Honoré Champion, 1922).
(33) AMAE, Correspondance Consulaire et Commerciale (CCC) Bagdad, vol.11, lettre de Place à Turgot du 1er_mars 1852, f.96. Ibid., Correspondance Politique des Consuls (CPC) Bagdad, vol.4, procès-verbal du naufrage, non daté [juin 1855], f.200-202. Ibid., CPC Mossoul, vol.1, lettres de Drouyn de Lhuys à Place du 24 octobre 1852, de Place à Drouyn de Lhuys du 8 novembre 1852, des 10 avril et 20 juin 1853, f.41-42, 45, 58, 60. Archives Nationales, F21, 548, lettre de Place à Fould du 16 mars 1853. Maurice Pillet, op. cit., pp.87, 144.
(34) AMAE, Dossiers personnels, op. cit., vol.41.
(35) Sur l'action du patriarche catholique, voir ASV, Delegazione Apostolica del Libano, rubr.221.
(36) AMAE, op. cit., lettre de Walewski à Botta du 13 mai 1855.
(37)Ibid., vol. 18.
(38) Ibid., Correspondance Politique (CP) Turquie, vol.353, lettre de Thouvenel à Moustier du 31 janvier 1862, f.95.
(39) AMAE, CPC Djeddah, vol.2, rapport du captain de la Royal Navy J.S. Pullen au brigadier Coghlan du 24 juin 1858, f.33-44. CP Turquie, vol.336, lettre de Thouvenel à Walewski du 20 juillet 1858, f.192-196. MD Turquie, vol.104.
(40) Kamal Salibi, Histoire du Liban du XVIIe_siècle à nos jours (Paris, Naufal, 1977), pp.155-157.
(41) AMAE, CPC Beyrouth, vol.11, lettre de Lesseps à Walewski du 11 janvier 1858, f.169-176.
(42) Dominique Chevallier, Aux origines des troubles agraires libanais, in Annales E.S.C., 1959, XIV, pp.35-64.
(43) AMAE, Dossiers personnels, op. cit., vol. 206 et 27.
(44) Service Historique de l'Armée de Terre (SHAT), G4, 1, lettre de Beaufort d'Hautpoul au maréchal Randon du 9 septembre 1860, f.5.
(45) AMAE, CCC Beyrouth, vol.7, lettre de Bentivoglio à Thouvenel du 1er août 1860, f.243-249 ; Ibid., CPC Beyrouth, vol.12, lettres de Bentivoglio à Thouvenel des 23, 26, 27 et 28 juin 1860, f.74-89, 99-98, 99-106, 112-121 ; Ibid., MD Turquie, vol.145, procès-verbal de la 7e_séance de la Commission internationale de Beyrouth du 30 octobre 1860, f.25 ; SHAT, G4, 1, lettre du général Beaufort d'Haupoul au maréchal Randon du 9 septembre 1860, f.6-8.
(46) AMAE, CP Angleterre, vol. 717, lettre de Thouvenel à Persigny du 17 juillet 1860, f.219-221.
(47) Ibid., lettres de Persigny à Thouvenel des 22 juin et 18 juillet 1860, f.155-156 et 226-227.
(48) AMAE, CP Turquie, vol.347, lettre de Thouvenel à La Valette du 28 octobre, f.109-110 et CP Angleterre, vol.718, lettre à Chateaurenard du 29 octobre 1860, f.147-148.
(49) SHAT, G4, 2 divers rapports du capitaine Moch, membre du comité de reconstruction de Dayr al-Qamar.
(50) Ibid., 1, lettre de Beaufort d'Hautpoul à Abd al-Qâdir du 20 août 1860.
(51) AMAE, Papiers d'Agents, Thouvenel, 223, vol.2, lettre de Beaufort d'Hautpoul du 31 août 1860, f.135-140.
(52) Ibid., MD Turquie, vol.139, lettre de Béclard à Thouvenel du 28 décembre 1860, f.457-459.
(53) Ibid., lettres de Thouvenel à Béclard des 26 octobre 1860, vol.139, f.23-24, et du 11 janvier 1861, vol.140, f.20-21.
(54) AMAE, MD Turquie, lettres de Thouvenel à Béclard du 26 octobre 1860, vol. 139, f. 23-24. et du 11 janvier 1861, vol.140, f.20-21.
(55) Ibid., CP Turquie, vol.149, lettre de Thouvenel à La Valette du 29 mars 1861, f.454-455.
(56) Lettre sur la politique de la France en Algérie, adressée par l'Empereur au maréchal Mac Mahon, duc de Magenta, gouverneur général de l'Algérie (Paris, Impr. Impériale [26 juin 1865]).
(57) AMAE, CP Turquie, vol.306, lettre de La Valette à Drouyn de Lhuys du 4 août 1851. CPC Égypte, vol.24, Alexandrie, extrait d'une dépêche de Malmesbury à Cowley du 16 avril 1852, f.65.
(58) Ibid., ADP Egypte, vol.1, lettre de Benedetti à Drouyn de Lhuys du 16 avril 1849.
(59) SHAT, 1_MR 1679, lettre de Mircher à Niel du 22 février 1870.
(60) Henry Laurens, Le Royaume impossible, La France et le genèse du monde arabe (Paris, Armand Colin, 1990), pp.47-48.
(61) AMAE, ADP Egypte, vol.2, lettre de Thouvenel à Mac Mahon du 16 août 1861.
(62) Voir leur abondante correspondance au SHAT, 1_MR 1678.
(63) AMAE, CPC Egypte, vol.38, lettre d'Ismõ'¯l à Drouyn de Lhuys du 25 mars 1866, f.122-125.
(64) Ibid., CPC Egypte, vol.30, Alexandrie, lettre de Beauval à Thouvenel du 10 mai 1862, f.226.
(65) Ibid., vol.45, Le Caire, lettre de Poujade à La Valette du 18 mars 1869, f.210-211.
(66) Archives diplomatiques, 1865, pp.400-413. Ferdinand de Lesseps, Lettres, journal et documents pour servir l'histoire du Canal de Suez, IV (Paris, Librairie Académique Didier et Cie, 1880), pp.476-493.
(67) Voir l'article de Jean Tulard, Napoléon III et Chypre, in Revue de l'Institut Napoléon, 1962, pp.126-128.
(68) Archives Nationales, BB4, vol. 764, rapport de Fleuriot de Langle à Hamelin du 28 juillet 1859, f.148. Sur son action, voir Roger Joint Daguenet, Aux origines de l'implantation française en mer Rouge : vie et mort d'Henri Lambert, consul de France à Aden (1859) (Paris, l'Harmattan, 1992).
(69) AMAE, MD Afrique-Mer Rouge, vol.1, lettre de Lambert à Hamelin du 5 juillet 1858, f.43-44.
(70) Ibid., CPC Bagdad et Mossoul, vol.4, lettre de Tavernier à Drouyn de Lhuys du 31 août 1853, f.109. vol.5, lettre de Peretié à Drouyn de Lhuys du 27 mars 1864, f.229.
(71) Voir le très bon ouvrage de David S. Landes, op. cit.
(72) Voir Gérald Arboit, "L'utilisation de l'arme financière dans les relations internationales au XIXe siècle : l'exemple de l'affaire Cernuschi sous le Second Empire", in Revue d'Histoire moderne et contemporaine, 46-3, juillet-septembre 1999, pp.545-559.

Titre de revue :
Revue du Souvenir Napoléonien
Numéro de la revue :
433
Numéro de page :
39-51
Mois de publication :
févr.-mars
Année de publication :
2001
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