La brève occupation de l'Italie par les Français (1796-1814) s'est intercalée dans la longue durée de la domination directe ou indirecte des Autrichiens sur une Italie septentrionale et centrale très morcelée (1707-1866) .
Le nouveau Royaume, héritier de la République cisalpine puis italienne (1797-1805) et ayant comme elle Milan pour capitale, comprenait la Lombardie, le Novarais et la Romagne jusqu'alors séparés, plus une bonne partie de l'Emilie et une moindre partie de la Vénétie. Il se trouvait lié à la France en théorie par une simple union personnelle, en fait par une sorte de protectorat avant la lettre. Comme Napoléon, ne pouvant y résider, n'y passerait plus que quelques semaines à la fin de 1807 et que, jusqu'à l'installation du télégraphe Paris-Milan (printemps 1809), les communications seraient peu faciles, il dut y laisser un vice-roi : ce fut son beau-fils, qui ne quitta pratiquement pas l'Italie de juin 1805 à mai 1809 et y vécut par la suite presque la moitié de son temps.
Au fil des années le territoire du Royaume s'agrandit, comme nous l'allons voir, en même temps qu'évoluaient les deux autres groupements de l'Italie napoléonienne :
a) les anciens Etats ou fragments d'Etats absorbés dans l'Empire français. Au Piémont, à la Ligurie, à Parme et Plaisance s'ajoutèrent la Toscane, l'Ombrie, le Latium, constituant un total de 15 départements. Camille Borghèse fut gouverneur à Turin et Elisa Baciocchi grande-duchesse en Toscane, avec des fonctions surtout honorifiques ;
b) les Etats vassalisés : royaume de Naples (Joseph Bonaparte puis Joachim Murat) ; principauté de Lucques et Piombino comprenant Massa, Carrare et l'île d'Elbe (les Baciocchi) ; principautés de Ponte-Corvo (Bernadotte jusqu'en 1810) et de Bénévent (Talleyrand) ; république de Saint-Marin.
La Sardaigne resta aux Savoie et la Sicile aux Bourbons. Quant aux titres de duc de Frioul, Istrie, Montebello, Otrante, Vicence, etc., ils ne donnaient aucun pouvoir territorial.
L'organisation du Royaume d'Italie proprement dit, mise en place de 1802 à 1807 sur le modèle de la France consulaire puis impériale, ne fut guère modifiée jusqu'en 1814. Le Roi et le vice-roi étaient entourés d'une cour dont les principaux personnages étaient le chancelier garde des sceaux de la Couronne (Melzi), le grand aumônier (Codronchi), le grand maître de la maison (Fenaroli), le grand chambellan (Litta), le grand écuyer (Caprara), la dame d'honneur (Mme Litta), l'intendant général des biens de la Couronne (Costabili Containi). Dans l'esprit des monarchies du temps, celle-ci s'appuyait sur un ordre de la Couronne de fer analogue à la Légion d'honneur et sur une noblesse reconstituée. Les nouveaux nobles étaient moins nombreux que dans l'Empire (215 contre 3224) et provenaient plus souvent de l'ancienne noblesse (70% contre 20%). A part quelques militaires, les sujets du Royaume d'Italie qui étaient anoblis l'étaient dans le cadre de ce Royaume et non de l'Empire. Seuls quatre personnages furent comtes des deux pays à la fois.
En matière de gouvernement, Napoléon se réservait la haute main sur les relations extérieures (dont le ministre Marescalchi résidait à Paris), le budget, les travaux publics, les principales nominations, la convocation du corps législatif ou des collèges électoraux. Il correspondait directement avec Eugène et, pendant les absences de celui-ci, avec Melzi. Il était en contact avec les autres ministres par l'intermédiaire d'Aldini, secrétaire d'Etat en poste à Paris.
Le ministre de la Justice (Luosi) était au sommet d'une hiérarchie, comprenant une Cour de cassation, 5 cours d'appel, 24 cours de justice civile et criminelle, des juges de paix, des tribunaux de commerce.
Le ministre de l'Intérieur (de Brême, etc. ) avait sous ses ordres 4 directions générales : eaux et chaussées, instruction publique, police, administration des communes. Les principales institutions culturelles étaient les universités (Pavie, Padoue, Bologne) et les académies des Beaux-Arts (Milan, Venise, Bologne). L'administration locale se répartissait en 24 départements gérés par un préfet assisté d'un conseil général, et en 2155 communes avec podestat ou syndic et conseil communal.
Le ministre du Culte (Bovara) contrôlait les 6 archevêques et les 18 évêques.
Le ministre de la Guerre et de la Marine (Pino, Caffarelli, Fontanelli) était responsable d'une force armée de quelque 70 000 hommes composée de 4 régiments de garde royale, d'une gendarmerie, de 11 régiments d'infanterie, de 6 régiments de cavalerie, plus l'artillerie, le génie, la marine.
Le ministre des Finances (Prina) était à la tête de 9 directions générales : cens, douanes, monopoles, domaine, dette publique, monnaies, postes, loterie, intendance. Comme en France il était flanqué d'un ministre du Trésor public.
Enfin les principaux organes collégiaux étaient les collèges électoraux des propriétaires, des doctes et des commerçants siégeant soit sur le plan national, soit par départements ; le corps législatif puis le Sénat consultatif ; le Conseil d'Etat et la Cour des comptes ; le conseil général du commerce, des arts et des manufactures.