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L'Impératrice Eugénie
Carnet de bord du capitaine de Surville
Alexandrie, le 13 novembre 1869.
A Son Excellence Monsieur l’Amiral
Ministre de la Marine et des Colonies
Paris
Alexandrie, 13 novembre 1869

Monsieur l’Amiral Ministre,




J’ai l’honneur de vous informer que je viens de rentrer à bord de l’Aigle, après avoir effectué, avec l’Impératrice, le voyage de la haute Egypte.

Le paquebot français Le Moeris, à bord duquel a pris passage M. le C. Amiral Dupré, ayant différé son départ jusqu'à demain matin, je profite de ce retard pour rendre compte succinctement à Votre Excellence des principaux incidents de l’excursion de S. M.

L’Impératrice est remontée jusqu'à quelques heures de la 2e cataracte du Nil, et était de retour dans la soirée du 12.

Tout ce voyage s’est accompli dans les meilleures conditions possibles, grâce aux dispositions prises par le Khédive sur tout le parcours de la caravane. Une dizaine de petits bateaux à vapeur ayant chacun une destination spéciale avaient été affectés au service de S. M. qui a paru très satisfaite de tout ce qu‘elle a visité et des égards tout à fait exceptionnels dont Elle a été entourée.

S.M. est revenue aujourd’hui à bord de son yacht qu’Elle a paru heureuse de retrouver.

Suivant ses intentions l’Aigle quittera Alexandrie le 15 pour arriver sans doute à Port-Saïd le 16.

Quelques versions peu favorables à l’inauguration ont couru au Caire et à Alexandrie ; mais il semble certain que l’Aigle pourra traverser le canal dans toute son étendue.

L’Impératrice désirait arriver à Paris avant l’ouverture des Chambres ; mais les fêtes à l’occasion de l’inauguration la retiendront peut-être à Ismaïlia et Suez plus longtemps qu’Elle ne l’avait cru d’abord. Je ferai néanmoins tous mes efforts pour accélérer autant que possible son retour en France.

L’escadre anglaise, composée de cinq frégates cuirassées et de trois petites canonnières et qui était mouillée depuis quelques jours en dehors des passes d’Alexandrie, a appareillé ce soir pour Port-Saïd où l’ont précédée, m’a-t-on rendu compte, les bâtiments des différentes nations.

J’écris à l’amiral Moulac pour lui témoigner le désir de l’Impératrice que le Forbin soit mis à la disposition de l’Emir Abd-el-Kader.

Je suis, avec le plus profond respect, Monsieur l’Amiral Ministre, votre très obéissant serviteur.


 
Le Commandant de l’Aigle
J. de Surville