Pavillon Flaubert – Croisset

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Pavillon Flaubert – Croisset

De la propriété où vécut et travailla Gustave Flaubert de 1843 à sa mort, il ne reste aujourd’hui que ce pavillon de jardin face à un paysage rouennais quelque peu défiguré par les usines alentour. Au siècle dernier, la propriété des Flaubert se situait pourtant dans un cadre particulièrement agréable, sur un coteau face à la Seine : une aquarelle de Rochegrosse présentée dans le musée porte le témoignage de ce que fut cette demeure, une grande bâtisse du XVIIIe siècle coiffée d’un comble d’ardoise à deux pentes et surmontée d’un fronton. 


Le docteur Flaubert, père de l’écrivain, acquit en 1843 cette résidence qui avait appartenu aux moines bénédictins de Saint-Ouen, après avoir été exproprié de celle de Deville-lès-Rouen suite à la construction de la ligne de chemin de fer, Paris-Rouen. La légende veut que l’abbé Prévost y ait écrit Manon Lescaut. Après la mort de son père, Flaubert continua à passer les mois d’été dans cette maison en compagnie de sa mère et de sa soeur ; il s’y établit définitivement en 1851. Son cabinet de travail était au premier étage et donnait sur le jardin et sur la Seine. C’est là que l’écrivain composa la plus grande partie de son oeuvre.

Rétrospectivement, Flaubert apparaît, avec Baudelaire et les Goncourt, comme l’un des écrivains les plus importants du Second Empire. Son génie fut reconnu de son vivant par le régime impérial : Légion d’honneur, invitations à Compiègne, aux Tuileries et chez la princesse Mathilde en témoignent. C’est pourtant par un immense scandale que la carrière de l’écrivain avait débuté, celui de la parution de Madame Bovary en 1857 et du procès pour outrage « à la morale publique et à la religion » qui suivit. Ce scandale assura immédiatement le succès du roman dont l’action se déroule dans la campagne normande aux environs de Rouen et à Rouen même. C’est un des vitraux de la cathédrale qui inspira d’ailleurs Flaubert pour une des nouvelles des Trois Contes, La Légende de Saint-Julien l’Hospitalier, publiés en 1877. Il est à signaler que l’écrivain prévoyait de rédiger un grand roman décrivant la société du Second Empire : Sous Napoléon III ne vit malheureusement jamais le jour.

Flaubert ne travaillait jamais dans le pavillon de Croisset mais il s’y rendait souvent en compagnie de ses invités et, la nuit, il venait y contempler la Seine sous la lune. Une citation reproduite sur la façade rappelle ces séances nocturnes : « J’ai quelque part une maison blanche, j’ai laissé le mur tapissé de roses et le pavillon est au bord de la Seine ; un chèvrefeuille pousse sur le balcon de fer. A une heure du matin en juillet, par le clair de lune, il fait bon venir voir pêcher« . De nombreux souvenirs de l’écrivain y sont aujourd’hui rassemblés : des portraits, des bustes, des photos de Nadar, un fauteuil, le célèbre perroquet d’Un coeur simple, un encrier et des plumes d’oies, un écritoire, etc.

C’est dans l’allée bordée de tilleuls menant à la maison que Flaubert venait déclamer ses textes si douloureusement composés : il nommait cet endroit son « gueuloir ». A quelques kilomètres de Croisset, Rouen offre elle aussi des souvenirs de l’écrivain et constitue le cadre idéal pour relire Madame Bovary. Flaubert naquit dans cette ville en 1821, dans l’ancien hôpital Saint-Louis et Saint-Roch où son père exerçait. Aujourd’hui transformé en musée Flaubert et d’Histoire de la médecine, l’hôpital conserve la chambre natale de l’écrivain et évoque par différents témoignages son enfance. C’est également au cimetière de Rouen que repose Gustave Flaubert.

Karine Huguenaud

Itinéraire La Route des écrivains

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