Le baptême du roi de Rome (9 juin 1811)

Auteur(s) : FONDATION NAPOLÉON
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Pourquoi le baptême du Roi de Rome a-t-il été reporté ?

Prévu initialement pour le 2 juin 1811, dimanche de la Pentecôte, le baptême du Roi de Rome fut reporté au samedi suivant, le 9 juin, Fête de la Trinité.

Depuis l'emprisonnement du pape à Savone (lieu où il résida jusqu'en 1812), les relations entre Napoléon et l'Eglise catholique s'étaient largement détériorées. L'Empereur s'inquiétait en particulier du problème de l'institution canonique (« Acte par lequel un supérieur ecclésiastique met un clerc en possession d'un office et de la juridiction qui y est attachée », Larousse), une responsabilité qui appartenait uniquement au pape. Depuis 1809, Napoléon étant excommunié, Pie VII refusait de reconnaître comme valables les nominations aux charges ecclésiastiques faites par lui, entraînant, selon Cambacérès, la vacance de vingt-sept évêchés dans l'Empire. Une solution à ce désordre devait être trouvée…

Un conseil national fut prévu pour le 9 juin afin d'aborder, dans un premier temps le transfert de l'institution canonique entre les mains de l'évêque métropolitain, et dans un second temps la fin du pouvoir temporel du pape. Ces questions prirent le pas sur le baptême impérial, qui fut donc, dès la mi-mai, repoussé au 9 juin 1811, faisant écrire à Cambacérès que des « motifs d'une légère importance avaient fait retarder de sept jours la cérémonie du baptême »… Si Napoléon se réjouit à l'idée de célébrer le baptême de son fils et l'ouverture d'un conseil tellement important le même jour, les évêques, eux, d'après Adolphe Thiers, « prétendirent que le plus grand nombre d'entre eux étaient trop âgés pour suffire à la fatigue d'une double cérémonie dans le même jour » (Histoire du Consulat et de l'Empire, vol. 13, p. 109). Il est difficile de savoir si cette plainte était justifiée ou si les évêques cherchaient à éviter à tout prix une cérémonie qui unirait l'Etat et l'Eglise dans la vénération de Napoléon et de son fils. Quoi qu'il en soit, Napoléon céda de nouveau et le conseil lui aussi fut reporté… au 17 juin.

Les célébrations du baptême du Roi de Rome

Le dimanche 9 juin a donc lieu la célébration du baptême de l'héritier de la dynastie napoléonienne, le Roi de Rome.

Le Moniteur du 9 juin en ce jour de cérémonie fit un long compte rendu des célébrations non-catholiques qui devaient avoir lieu le même jour en l'honneur du Baptême de l'impérial enfant. Ainsi le Temple luthérien évangélique, situé rue des Billettes à Paris, devait fêter l'événement en chantant un Te Deum et en récitant des prières publiques. Le Consistoire israélite de la circonscription de Paris avait décrété que des prières seraient chantées dans le temple de la rue Sainte-Avoie à Paris. Dans son édition du 10 juin, le quotidien relata les grandes cérémonies officielles et catholiques qui se déroulèrent solennellement et en grande pompe à Notre-Dame.
 
A l'occasion de cette cérémonie officielle, prévue en fin de journée ce dimanche 9 juin 1811, les rues furent sécurisées par la garde impériale et les troupes de ligne formant la garnison de Paris dès 14h.  Un coup de canon annonça à 17h30 le départ du couple impérial du Palais des Tuileries. A leurs passages retentissaient de nombreux « Vive l'Empereur ! Vive l'Impératrice » et « Vive le Roi de Rome ! ». Au même moment, tous les invités institutionnels (du Sénat, Conseil d'Etat, Corps législatif, cour de Cassation, Cour des Comptes, Cour de l'Université, Corps municipal de Paris, maires et députés de 49 « bonnes villes », invités par l'Hôtel de Ville), qui s'étaient rendus sous escorte militaire à Notre-Dame, étaient en place, tandis que le clergé entrait dans la cathédrale en procession. ». Il avait été construit, devant la principale porte de l'église Notre-Dame, pour l'arrivée et le départ du cortège, un portail en forme de tente, soutenu par des colonnes et orné de draperies et de guirlandes ; l'intérieur de l'église était richement décoré. »
 
Le cortège impérial entra un peu avant 19h. L'Empereur et l'Impératrice étaient escortés, sous des dais individuels portés par des chanoines, jusqu'à leurs prie-Dieu situés dans la partie supérieure de la nef. Après que le cardinal Fesch eut entonné le Veni creator, l'Empereur, l'Impératrice, le roi de Rome, dans les bras de sa gouvernante, et le reste de l'entourage impérial se rapprochèrent du choeur pour assister à la cérémonie des catéchumènes. Après quoi leurs Majestés allèrent prendre place sur leurs trônes dans le choeur. On procéda ensuite au baptême à proprement parlé, baptême après lequel l'impératrice tint l'enfant, tandis que Monsieur Duverdier, chef des héraults d'armes, cria trois fois « Vive le Roi de Rome » (un cri gardé par la congrégation pendant une longue période). L'Empereur prit l'enfant à son tour et le souleva, ému devant l'assistance. Les musiciens de la chapelle impériale, conduite par Lesueur, exécutèrent ensuite le Vivat. L'enfant fut ramené aux Tuileries pendant que le choeur chantait le Te Deum, puis le Domine salvum.

Les réceptions qui suivirent

Le couple impérial se dirigea ensuite vers l'Hôtel de Ville pour des célébrations civiques prévues à 20h. Elles incluaient quatre réceptions officielles, un banquet, un concert (une performance du Chant d'Ossian de Méhul, sur un livret d'Arnault, par le célèbre Monsieur Lays, dans le rôle titre). La performance des Ombres héroïques fut particulièrement appréciée.
 
Napoléon Ier reçut ensuite dans la salle du Trône un cercle d'invités. Leurs Majestés ont ensuite été conduites « dans le jardin factice qui avait été formé au-dessus de la cour de l'Hôtel de Ville : la décoration en était très élégante ; au fond du jardin, le Tibre était figuré par d'abondantes eaux, dont le cours était disposé avec beaucoup d'art et répandait une douce fraîcheur. »

Le couple impérial quitta les lieux vers 23h30. Après leur départ, le bal s'ouvrit dans la salle du Trône où il dura jusqu'à une heure.
 
Dans la matinée de ce même jour, « les mariages des jeunes filles pauvres dotées par la ville, et unies à des militaires, ont été célébrés dans chaque arrondissement municipal. Les réjouissances publiques ont consisté en jeux de toutes espèces, et distribution aux Champs-Elysées. ». A quinze heures, des exercices d'équitation commencèrent au milieu du grand carré, avec exercices de voltige et combats à la lance et au sabre.
 
Il y avait aussi des groupes musicaux jouant de la musique de danse le long des Champs Élysées, jusqu'au grand feu d'artifice place de la Concorde qui se termina avec l'envol d'un ballon. Il y avait aussi des illuminations partout sur les bâtiments publics qui, pour certains, portaient des décors allégoriques. Et puisque tout le trafic avait été strictement interdit dans le centre ville, « la population immense de la ville » a pu s'amuser jusqu'à une heure du matin.

Titre de revue :
Inédit
Mois de publication :
juin
Année de publication :
2011
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