Compte rendu du catalogue d’exposition « L’aigle et le papillon, symboles des pouvoirs napoléoniens ».

Auteur(s) : LERNER Elodie
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Compte rendu du catalogue d’exposition « L’aigle et le papillon, symboles des pouvoirs napoléoniens ».
Déjeuner des "Peines et des Plaisirs de l'Amour", 1809-1812, Manufacture de Sèvres

L’art décoratif en question

 
Une bibliographie actualisée, deux index (des noms propres et iconographique) et des essais accompagnent les notices d'oeuvres insérées dans le catalogue de l'exposition qui s'est tenue d'abord au Saint Louis Art Museum, ensuite au Museum of Fine Arts de Boston et qui se trouvait au Musée des Arts décoratifs à Paris jusqu'au 5 octobre 2008. Sans doute peut-on s'étonner du contenu presque philosophe de ces études qui portent sur les significations possibles de la symbolique impériale. L'intérêt se concentre plus sur l'analyse du sens des motifs que sur leur style ou bien encore sur leur contexte de création.
Un rappel historique peut manquer au lecteur peu renseigné sur cette période, mais l'angle d'approche privilégié a le mérite de permettre de poser des questions souvent éludées auparavant : un pouvoir politique fort s'appuie t-il nécessairement sur un vocabulaire décoratif bien établi ? Comment et par qui les emblèmes sont-ils choisis ? Pourquoi sont-ils répétés de façon aussi systématique ? 

Des emblèmes empruntés à l’antiquité…

Des éléments de réponse sont avancés. Les idées véhiculées au travers des arts décoratifs apparaissent comme essentielles pour effacer les motifs révolutionnaires, précédemment si omniprésents, afin d'établir de nouvelles valeurs. Par un regard neuf sur le modèle antique, les architectes de Napoléon, Percier (1764-1838) et Fontaine (1762-1853) vont permettre ce renouveau. Ils publient en 1801 le Recueil de décorations intérieures comprenant tout ce qui a rapport à l'ameublement, accompagné de planches gravées qui serviront de source d'inspiration dans bien des décors d'édifices au début du XIXe siècle. Le livre fait d'ailleurs le point sur ces recueils d'ornements dans lesquels les artisans puisent pour travailler et met aussi l'accent sur les modèles antiques du style empire.

L'Egypte est bien sûr au goût du jour depuis l'expédition napoléonienne de 1798, tout comme l'antiquité classique au travers des objets d'art anciens prélevés en Italie lors des campagnes militaires de 1796 et 1797, admirés par les visiteurs au Musée Napoléon (actuel musée du Louvre). Le dépouillement des décors antiques correspond au goût prononcé de l'Empereur pour la sobriété. 
 

… entre pouvoir et sensualité.

Pour expliquer le développement ultérieur des arts décoratifs, le goût personnel de Napoléon est à prendre en compte, mais s'y ajoute aussi la nécessité de définir les emblèmes du pouvoir. Le Sacre de Napoléon le 2 décembre 1804 apparaît comme un moment clef dans l'adoption définitive de symboles tels que l'aigle et l'abeille. Ils sont complétés par les figures allégoriques guerrières de la Victoire et de la Renommée, le foudre ailé et le motif floral de la fritillaire. L'Empereur fait preuve de dirigisme concernant le choix de ces motifs, mais laisse en même temps une latitude d'exécution à ses subordonnés, que ce soit Denon (1747-1825) ou Brongniart (1739-1813), directeurs du Musée Napoléon et de la Manufacture de Sèvres, qui marquent les productions de l'époque de leur empreinte.

En parallèle de ces éléments intimement liés au pouvoir, d'autres fleurissent, plus proches du registre de la sensualité, inspirés des récits mythologiques des amours des dieux de l'antiquité. L'histoire de Léda, aimée par Zeus qui s'était transformé en cygne pour la séduire, est à l'origine de la multiplication de la représentation de cet oiseau. Autre figure allégorique du désir, le papillon est aussi très présent. Ces différentes thématiques sont abordées dans le décor très bien conservé de l'hôtel de Beauharnais acheté par Eugène en 1803 : la part guerrière, avec la mise en avant des qualités militaires d'Eugène et sa position en tant que membre de la famille régnante, comme la place réservée aux plaisirs mettant l'accent sur les dispositions musicales du prince.


Une collaboration internationale

Le goût de Napoléon en matière d'arts décoratifs, mais aussi celui de la famille impériale et au-delà de toute la société du Premier Empire est ainsi dévoilé dans ce catalogue, élaboré avec l'aide de l'American Federation of Arts, organisation gouvernementale américaine dont le but est d'initier et d'organiser des expositions. Des membres du Museum of Fine Arts de Boston, d'Hartford dans le Connecticut et du Centre allemand d'histoire de l'art à Paris se sont également joints à l'entreprise. Du côté français, des conservateurs des musées nationaux et des musées de la ville de Paris, du Musée des Arts décoratifs, de la Fondation Napoléon et des chercheurs ont également pris part au projet.
 
Fruit d'une collaboration américano-germanico-française efficace, ce livre est sans conteste une réussite.
 

Lieu et année de parution :
Paris, 2007.
 
Maison d'édition :
Les Arts décoratifs et American Federation of Arts.

Nombre de pages : 
351.
 

Pour en savoir plus sur l'exposition, cliquez ici.
 
Pour en savoir plus sur le Musée des Arts décoratifs, cliquez ici.

Pour en savoir plus sur un objet exceptionnel exposé, la Nef de l'Empereur d'Auguste Henry, cliquez ici.


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