Document > La dernière lettre du Prince Impérial, lettre à sa mère en date du 1er juin 1879

Auteur(s) : DECAUX Alain
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Document > La dernière lettre du Prince Impérial, lettre à sa mère en date du 1er juin 1879

Entre toutes les précieuses reliques que renferment les archives de S.A.I. le Prince Napoléon, voici assurément l’une des plus émouvantes.
Cette lettre, le Prince Impérial l’a griffonnée sur ses genoux, précipitamment, à Koppie Allein, camp du bush sud-africain, lorsqu’il a su qu’un correspondant de guerre allait regagner Durban et qu’il pourrait emporter du courrier. Dans ces lignes, on sent le frémissement joyeux, l’attente impatiente d’un jeune homme courageux. Si Louis, Prince Impérial de France, a voulu gagner l’Afrique du Sud et participer, avec ses camarades de Woolwich, au combat contre les Zoulous, c’est parce que l’inaction le tuait peu à peu. C’est parce qu’il se souvenait qu’il était Bonaparte : « Lorsqu’on appartient à une race de soldat, avait-il écrit, ce n’est que par le fer qu’on se fait connaître ». C’est parce que, depuis la mort de Napoléon III, son père, il n’a cessé de se préparer, d’abord à devenir un homme, ensuite à servir son pays. Les journaux anti-bonapartistes, avec une cruauté parfaitement stupide – la seule fois que Louis avait été au combat, en 1870, il avait montré un grand courage – le traitaient de lâche. Il a voulu leur répondre. Il a dit à sa mère, qui le suppliait de renoncer à son dessein : « Quand j’aurai fait voir que je sais exposer ma vie pour un pays qui n’est pas le mien, on ne doutera plus que je sache la risquer mieux encore pour ma patrie ».

Et là, maintenant, il écrit à sa mère sa dernière lettre. Quelques heures plus tard, surpris par les Zoulous, abandonné par l’officier anglais chargé de l’escorter, il va périr, seul face à une nuée d’ennemis parfaitement armés. Le rapport du capitaine Molyneux, du 22e régiment A.D.C. dira éloquemment : « Le cadavre portait dix-sept blessures, toutes par-devant, et les marques sur le sol, comme sur les éperons, indiquaient une résistance désespérée ».
Inutile, dira-t-on, cette résistance, Louis savait qu’il s’appelait Napoléon, et ce qu’il devait à son nom.
La vie de cet autre Aiglon n’a duré que vingt-trois ans. Mais aujourd’hui qu’un siècle a passé, nous les voyons, ces années, si droites, si pures, si pleines de lumière qu’elles font naître envers la mémoire du Prince Impérial notre admiration, certes, mais aussi notre affection.

Titre de revue :
Revue du Souvenir Napoléonien
Numéro de la revue :
308
Numéro de page :
2
Mois de publication :
11
Année de publication :
1979
Année début :
1856
Année fin :
1879
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