La nuit des hiéroglyphes, ou la victoire de Champollion

Auteur(s) : BRULEY Yves
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Celles et ceux qui ne seront pas trop loin de la ville de Figeac (46), à la fin de ce mois de juillet 2025, ont beaucoup de chance : ils pourront assister à la représentation de La nuit des hiéroglyphes, le vendredi 25 juillet à 22 heures, au Musée Champollion de Figeac.

<i>La nuit des hiéroglyphes</i>, ou la victoire de Champollion
Yves Bruley, photo © Sebastien Soriano/Le Figaro

Écrite par Benjamin Lazar, mis en musique par David Chaillou, avec des vidéos de Joseph Paris, La nuit des hiéroglyphes est une œuvre scénique, musicale et visuelle unique en son genre. Son histoire est elle-même exemplaire. La création a eu lieu le 27 septembre 2022, deux cents ans jour pour jour après le déchiffrement des hiéroglyphes par Jean-François Champollion. Plus précisément, le 27 septembre est le jour où le génial égyptologue, dans l’exaltation des jours et des nuits de travail acharné qu’il venait de passer en son appartement de la rue Mazarine, est venu présenter sa découverte à l’Institut de France, devant l’Académie des inscriptions et belles-lettres. Ce fut un triomphe mémorable. Si mémorable que c’est à l’Institut de France que « La nuit des hiéroglyphes » fut créée en 2022, à la suite d’une commande de France Mémoire, la mission des commémorations nationales. Et ce fut un autre triomphe, cette fois pour les créateurs : pour l’auteur et metteur en scène Benjamin Lazar, dont le texte sur la vie de Champollion est magnifique ; le compositeur David Chaillou, qui est aussi historien (son livre sur Napoléon et l’Opéra a obtenu le prix de la Fondation Napoléon en 2004) et qui a écrit pour l’occasion une partition saisissante, en donnant la plus grande part à la harpe ; pour Joseph Paris, réalisateur en art vidéo qui a su donner vie aux manuscrits de Champollion conservés à la BnF. Mais aussi à la chorégraphe Michèle Delaunay et aux musiciens : Maroussia Gentet, Morgan Mermoud, Pierre Tomassi et Clara Izambert (bien connue de la Fondation Napoléon pour sa mise en valeur de la musique de l’époque napoléonienne).

Enfin reprise, La nuit des hiéroglyphes trouve tout naturellement sa place au festival de Figeac, dans la maison natale de Champollion.
Né à Figeac le 23 décembre 1790, très tôt attiré par l’apprentissage des langues, Jean-François Champollion fait ses études au lycée de Grenoble où le préfet de l’Isère, le mathématicien Joseph Fourier, qui avait participé à l’Expédition d’Égypte, le remarque et décide de le soutenir. Il étudie ensuite à Paris. C’est l’époque où la Pierre de Rosette, découverte par un officier français en 1799 lors de l’expédition de Bonaparte, est examinée en vain par les savants. De la triple inscription d’un même texte du IIe siècle avant J.-C. en hiéroglyphes (l’écriture sacrée), en démotique (la langue cursive courante) et en grec, on attendait enfin la clé des écritures de l’ancienne Égypte.

Sans l’expédition d’Égypte, point de déchiffrement des hiéroglyphes. Il fallait aussi un contexte propice à la formation d’un génie tel que le jeune Champollion. En 1807, à 17 ans, dans la capitale de l’Empire, il peut étudier le persan, le syriaque, le chaldéen, l’hébreu. Il remet le turc à l’année suivante, mais il trouve un certain Don Raphaël qui traduit les Fables de La Fontaine en arabe. Et il peut faire la connaissance de chrétiens coptes : de là viendra, un jour, une partie de la lumière sur les hiéroglyphes.

Chateaubriand plaçait leur déchiffrement parmi les faits les plus importants survenus au cours de sa vie : « Champollion a déchiffré ces hiéroglyphes qui semblaient être un sceau mis sur les lèvres du désert et qui répondait de leur éternelle discrétion. » Aujourd’hui, La nuit des hiéroglyphes, dans les formes artistiques de notre temps, perpétue la mémoire de cette immense conquête sur l’ignorance. Espérons que la représentation de Figeac ne sera qu’une étape et que ce spectacle pourra bientôt se voir en d’autres lieux – théâtres, amphis d’universités, et pourquoi pas au Musée du Louvre ?

Yves Bruley, Correspondant de l’Institut (juillet 2025) 

Pour aller plus loin

Sur le site de France Mémoire, avec la captation vidéo de la création en 2022
Sur le site du Musée Champollion de Figeac, pour la représentation du 25 juillet 2025

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