Né en 1762, André-François Miot est entré dans l'administration militaire juste avant la Révolution. Feuillant, suspect il se cache et réapparaît sous le Directoire dans la diplomatie, à Florence, à Rome, en Corse, au Piémont et en Hollande. Réservé devant Brumaire il n'en est pas moins nommé secrétaire général de Berthier, ministre de la Guerre par Bonaparte qui cherche à rallier les compétences. Conseiller d'État il a en charge les radiations d'émigrés. En 1801 il devient administrateur général des deux départements de Corse.
En 1806 sa carrière s'attache à Joseph, roi de Naples où il est ministre de l'Intérieur, et roi d'Espagne où il est intendant de la maison royale jusqu'au départ définitif de Madrid.
En février 1814 il est fait comte de Melito. Sous les Cent-jours il est toujours au Conseil d'État. De 1815 à sa mort en 1841 il vit retiré de la vie publique (son fils et son gendre ont été tués à Waterloo) et se consacre à l'écriture. Ses Mémoires publiés en 1873 sont d'une belle plume et – bien qu'il se donne la part belle – du plus grand intérêt.
L'offre de Napoléon à son frère Joseph de ceindre la couronne des rois lombards est au coeur de la déci¬sion ultérieure de l'Empereur de devenir aussi roi d'Italie. Le futur comte de Melito en est un témoin privilégié. Son récit mérite l'attention.
Les fêtes du couronnement et la solennité de l'ouverture du corps législatif étaient à peine terminées, que l'empereur, poursuivant toujours ses premiers projets, remit sur le tapis l'offre qu'il avait faite au prince Joseph de la couronne de Lombardie. Le motif principal qui le portait à tenir fortement à ce plan, tirait son origine du désir qu'il avait d'écarter de l'hérédité du trône impérial ce frère qui s'y trouvait appelé par le sénatus-consulte du 28 floréal, et de concentrer ainsi la succession dans la branche du prince Louis et, par conséquent, sur la personne du fils de ce dernier : dessein qu'il avait formé depuis longtemps et auquel il ne renonça qu'à la mort de cet enfant.
Les premières ouvertures faites à ce sujet avaient été, comme on l'a vu, mal accueillies par le prince Joseph. L'acte de renonciation au droit de succession, sur lequel l'empereur insistait, était la condition qui inspirait au prince le plus de répugnance et à laquelle il refusait de consentir. Enfin, après une assez longue discussion, M. de Talleyrand, qui s'était chargé de la négociation, rédigea en forme d'articles les bases de la convention comme une sorte d'ultimatum, et voici en quoi elles consistaient :
1°) Napoléon, empereur des Français et roi de Lombardie. 2°) Il cède ses droits à cette couronne, et dans toute leur étendue, à son frère Joseph, comme prince français et grand électeur de l'Empire. 3°) La couronne de Lombardie est héréditaire dans la descendance naturelle et légitime de Joseph Bonaparte. 4°) Si le prince Joseph vient à mourir sans enfants mâles, l'empereur dispose encore une fois du trône de Lombardie. 5°) Si cette mort arrive après celle de l'empereur et qu'un de ses fils naturels ou adoptifs soir sur le trône de France, la couronne de Lombardie passe sur la tête du prince Louis. 6°) Si, du vivant de l'empereur, le prince Joseph laisse un enfant mâle mineur, l'empereur est président du conseil de régence : les grands dignitaires de Lombardie forment le conseil. 7°) Les couronnes de Lombardie et de France ne peuvent, dans aucun cas, être réunies sur la même tête. En conséquence, le prince Joseph renonce pour lui et pour ses enfants à la succession au trône impérial. 8°) Cependant, l'empereur, pour ne pas se priver des avantages que lui donne le sénatus-consulte du 28 floréal an XIII, se réserve la faculté d'adoption que cet acte lui attribue. Mais il est entendu que la succession au trône de France ne passera dans la seconde branche de la famille, qui, par la renonciation du prince Joseph, s'y trouverait naturellement appelée, qu'en vertu d'une désignation spéciale. Ainsi, dans le cas où l'empereur viendrait à mourir sans enfants naturels ou adoptifs et sans avoir fait de désignation, il sera censé avoir appelé le prince Joseph à la couronne de France, par préférence au prince Louis, qui passera alors au trône de Lombardie. Ce dernier article, quoiqu'il parût atténuer l'effet de la renonciation exigée, était néanmoins celui qui devait fixer plus particulièrement l'attention du prince Joseph. Il contenait, en effet, un nouveau système pour la succession au trône de France. Le mot désignation, qui s'y trouvait introduit, changeait tout à fait l'ordre établi par le sénatus-consulte fondamental et renversait le principe de l'hérédité dans l'acception ordinaire de ce mot. Le prince Louis, suivant ce principe, venait immédiatement aux droits du prince Joseph par la renonciation de ce dernier. Ici, au contraire, ce droit n'était plus qu'éventuel et dépendait de la volonté de l'empereur, qui se réservait la liberté de le désigner ou de ne pas le désigner. Et ce qui était plus remarquable encore, c'est que cette faculté de désignation, introduite dans la législation, était illimitée, et que rien ne disait que l'empereur ne pourrait pas l'exercer en faveur d'un individu d'une autre famille. Enfin, cette disposition semblait aussi entraîner la succession dans la famille du successeur désigné ; de sorte que, si la désignation portait sur le prince Louis, elle aurait eu le même effet que l'adoption de ses enfants, quoique mineurs, puisque lui, venant à mourir, leur transmettait ses droits, au préjudice du prince Joseph.
Talleyrand, qui avait communiqué à Joseph les articles de la convention dans la matinée du 26 nivôse an XIII (16 janvier 1805), revint dans la soirée du même jour chercher la réponse. Elle fut évasive, et le prince remit à un autre jour d'en donner une définitive. Il employa ce délai à consulter ses amis, qui tous furent d'avis qu'il devait accepter. « Dans l'ordre naturel des choses, lui disions-nous, l'empereur doit vous survivre. Vous n'avez pas d'enfants mâles, et, votre frère n'en ayant pas non plus et ne pouvant en avoir de l'impératrice, vous devez être certain que tôt ou tard il s'en séparera pour se donner un héritier direct, ou du moins usera de la faculté que lui concède le sénatus-consulte, pour adopter le fils du prince Louis. Vos droits au trône de France et l'espoir d'y monter un jour sont donc plus imaginaires que réels, et une éventualité, celle de la mort prématurée de l'empereur, qui seule leur donnerait quelque consistance, est trop peu probable pour balancer les avan¬tages qui vous sont offerts en ce moment. Vous iriez, en les acceptant, régner sur un très beau pays dont vous parlez la langue et où il vous serait facile de faire beaucoup de bien. Votre sort serait ainsi fixé, et un avenir brillant et solide s'ouvrirait devant vous ».
Ces conseils ne firent aucune impression sur l'esprit du prince Joseph. Il regardait la renonciation qu'on exigeait de lui comme une sorte de lâcheté : il refusa donc nettement d'y consentir et se décida à rester en France. Cette réponse fut portée le 7 pluviôse (27 janvier) à l'empereur, qui s'en montra très mécontent et qui, sur ce refus de son frère Joseph, imagina de donner la couronne de Lombardie au fils aîné du prince Louis, en chargeant celui-ci de gouverner le pays, jusqu'à ce que le jeune prince qui, en attendant, resterait à Paris, eût atteint sa majorité. Mais le prince, à qui il communiqua son dessein, en rejeta formellement la proposition. « Tant que j'existerai, dit-il à l'empereur, je ne consentirai ni à l'adoption de mon fils, avant qu'il ait atteint l'âge fixé par le sénatus-consulte, ni à aucune disposition qui, en le plaçant, à mon préjudice, sur le trône de Lombardie, donnerait, par une faveur aussi marquée, une nouvelle vie aux bruits répandus dans le temps au sujet de cet enfant. Je consens, si vous le voulez, à aller en Italie, mais à la condition que j'emmènerai avec moi ma femme et mes enfants ».
Ce nouveau refus et le ton dont il fut énoncé et soutenu portèrent la colère de l'empereur au dernier excès. Il saisit le prince Louis par le milieu du corps et le jeta avec la plus grande violence hors de son appartement.
Repoussé ainsi de deux côtés par sa propre famille, l'empereur commença à tourner ses vues et son affection sur le jeune Beauharnais. Il l'éleva au rang de prince et le destina à ce trône de Lombardie, avec le projet de lui faire épouser la reine d'Étru-rie, veuve depuis peu de l'infant d'Espagne qui, deux ans auparavant, avait été placé sur le trône de Toscane (1). Il donna également le titre de prince au général Murat, et conféra les deux places de grands dignitaires auxquelles il n'avait pas encore nommé – celle d'archichancelier d'État au prince Eugène, et celle de grand amiral au prince Murat. Les illustrations répandues sur ces nouveaux personnages furent ressenties par les deux frères de l'empereur comme une injure pour eux ; mais ils n'avaient pas le droit de s'en plaindre ; elles étaient une suite nécessaire de leur refus de se prêter aux desseins de Napoléon. Ainsi, les griefs s'accumulaient de part et d'autre ; l'intérieur de la famille Bonaparte fut plus que jamais divisé, et tant de faveurs de la fortune, prodiguées sur elle, n'avaient ni satisfait les ambitions personnelles ni amené la concorde et l'unité des vues. Dès les premiers pas, des résistances inattendues s'étaient rencontrées ; des prétentions s'étaient mon¬trées, et des passions haineuses germaient dans les coeurs que Napoléon avait cru s'attacher par d'éclatants bienfaits dont il était en droit d'attendre de la reconnaissance.
Tandis que des troubles intérieurs jetaient ces tristes ombres sur les succès qui, jusque-là, avaient accompagné l'empereur dans toutes ses entreprises, l'état des relations extérieures prenait chaque jour un aspect plus inquiétant pour le maintien de la paix continentale. L'Autriche, la Russie et même la Prusse prenaient une attitude de plus en plus hostile. Mais, loin de s'en alarmer, l'empereur, comme j'ai déjà eu l'occasion de le faire remarquer, désirait vivement une rupture qui reportât la guerre sur le théâtre où de si grands succès avaient tant de fois illustré sous son commandement les armes françaises, et qui lui donnât un prétexte légitime d'abandonner cette expédition hasardeuse contre l'Angleterre dont les difficultés semblaient augmenter, à mesure qu'on s'approchait de l'époque où elle devait s'exécuter. Il s'en expliqua même assez clairement dans la séance du conseil d'État où l'on discutait la loi des finances, et qu'il vint présider le 28 nivôse (17 janvier). En parlant des ressources de la France, il s'exprima en ces termes : « Depuis deux ans, la France a fait les plus grands sacrifices qu'on puisse lui demander, et elle les a supportés. Une guerre générale sur le continent n'en exigerait pas d'autres. J'ai l'armée la plus forte, l'organisation militaire la plus complète, et je suis déjà dans la même situation où j'aurais à me placer si la guerre sur le continent avait lieu. Mais, pour pouvoir, en temps de paix, rassembler tant de forces, pour avoir vingt mille chevaux d'artillerie, des équipages entiers, il fallait trouver un prétexte de les créer et de les réunir, sans que les puissances continentales puissent s'en alarmer ; et ce prétexte nous a été fourni par le projet de descente en Angleterre. Je sais bien qu'entretenir en temps de paix tous ces chevaux d'artillerie, c'est jeter trente millions dans l'eau ; mais, aujourd'hui, j'ai vingt journées d'avance sur tous mes ennemis, et je serai depuis un mois en campagne, avant que l'Autriche ait acheté ses chevaux d'artillerie. Si je vois même que les événements de l'Italie (2) la mettent en mouvement, je lui déclare la guerre quand elle commencera à faire ses achats.
« Je n'aurais pu vous dire cela, il y a deux ans, et c'était là cepen¬dant mon unique but. Vous le connaissez maintenant et vous voyez l'explication de bien des choses. Mais nous n'aurons pas la guerre, et je viens d'entamer directement avec le roi d'Angleterre une négociation pour traiter de la paix ».
Soit que l'empereur eût, en effet, préparé l'expédition contre l'Angleterre uniquement dans le dessein de cacher aux puissances continentales ses préparatifs militaires, soit qu'il ne se fût rabattu sur ce plan que lorsque l'extrême difficulté de l'entreprise lui fut démontrée, le fait est qu'il avait pris de longue main ses mesures pour une guerre sur terre, et que les puissances qui l'attaquèrent peu après, loin de le trouver en défaut par l'entassement des armées sur les bords de la Manche, furent, au contraire, elles-mêmes prises au dépourvu par la combinaison habile dont il nous dévoila en partie le secret dans la séance du conseil d'État dont je viens de parler.
Mais plus il souhaitait une guerre, plus il était de son intérêt de persuader qu'il voulait la paix, et le but de la démarche qu'il avait faite auprès du roi d'Angleterre à qui il avait écrit directement (3) était de prouver que, s'il se trouvait entraîné dans une nouvelle guerre, il avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour l'éviter. Aussi, dès que la réponse de l'Angleterre qui repoussait cette ouverture (4) parvint à Paris, l'empereur s'empressa de donner solennellement communication de l'une et de l'autre au sénat, au corps législatif et au tribunat. Ces corps se hâtèrent de répondre à cette communication par des adresses obséquieuses qui avaient été précédées, dans la séance du tribunat, de discours non moins serviles. Les adresses furent présentées à l'empereur, qui les reçut le 21 pluviôse, assis sur son trône et entouré des grands officiers de l'Empire et de sa maison, du sénat et du conseil d'État. Le président du tribunat, Fabre (de l'Aude), n'hésita pas cette fois à parler au nom des fidèles sujets, membres du tribunat, et même mit l'épithète au superlatif : les très fidèles sujets. Cette fois, les discours furent insérés sans altération au Moniteur du jour suivant. On remarqua seulement un changement fait dans la réponse de l'empereur à la députation du corps législatif. En la prononçant, il avait employé, dans une des phrases, l'expression d'idées philanthropiques et libérales qui, selon lui, devaient être le caractère du siècle. Mais, comme il se moquait habituellement des hommes à idées libérales, il ne voulait pas paraître revenir sur ses pas et, dans le Moniteur du lendemain, au lieu d'idées philanthropiques et libérales, on lut : idées philanthropiques et généreuses.
Malgré les nuages qui s'épaississaient chaque jour sur l'horizon politique, la guerre n'était cependant pas assez instante, pour ne point laisser à l'empereur le temps de réaliser ses projets sur l'Italie. Un grief de moins, fourni à l'Autriche et aux autres puissances continentales, n'aurait pas prévenu la guerre, et dès lors il ne se faisait aucun scrupule d'avoir un nouveau tort envers elle. D'ailleurs, son esprit ne s'effrayait nullement de l'idée de multiplier les prétextes d'une rupture qui lui devenait nécessaire, et il comptait sur la victoire pour l'absoudre à la fois de tous ses torts et justifier toutes ses ambitions. Les refus de ses frères l'ayant laissé maître de disposer à sa volonté de la Lombardie et des autres conquêtes en Italie, il résolut enfin de placer sur sa tête la couronne qu'il leur avait proposée. Mais il voulait que cette couronne lui fût offerte par la nation même. Il avait donc appelé à Paris une réunion de députés choisis parmi les principaux citoyens de la Lombardie qui, sous le nom de consulte, était censée chargée de réviser la constitution de la république italienne, mais qui avait pour but principal de changer cette forme de gouvernement et de lui substituer une monarchie. Dès que cette assemblée eut terminé son travail, elle en apporta le résultat à l'empereur et fut reçue dans une audience d'apparat qui eut lieu le 26 ventôse (17 mars). Le conseil d'État y fut convoqué. Toute la pompe des cérémonies avait été déployée : l'empereur, qui paraissait se complaire à multiplier les occasions de se montrer avec les attributs de la souveraineté, était assis sur son trône et couvert, lorsque la consulte fut intro¬duite. M. de Melzi portait la parole et soumit à l'empereur la délibération du corps qu'il présidait. Voici quelles en étaient les dis¬positions : la république italienne convertie en monarchie, sous le titre de royaume d'Italie (5) ; l'empereur et ses descendants mâles appelés au trône de cette nouvelle monarchie, avec la seule restriction qu'à l'avenir les deux couronnes de France et d'Italie ne seraient jamais réunies sur une même tête. Il n'y avait d'exception que pour l'empereur et pour cette fois seulement. L'empereur accepta, parla de son affection pour ses peuples d'Italie et promit de se rendre à Milan pour s'y faire couronner. Le lendemain, il alla au sénat annoncer lui-même la nouvelle dignité dont il était revêtu, et dès ce moment il prit le titre d'empereur et roi.
Mais, avant de partir pour l'Italie, il fallait renvoyer à Rome le pape, qui prolongeait son séjour en France, dans l'espoir d'obtenir des avantages qu'on avait laissé entrevoir la disposition de lui accorder pour le prix de sa complaisance. Il demandait qu'on remît le saint-siège en possession des légations de Ferrare, Bologne et Rimini ; qu'on rendît au clergé la tenue des registres de l'état civil, et enfin, que le calendrier républicain fût supprimé et le calendrier grégorien rétabli. De ces prétentions, l'empereur n'accueillit que la dernière, parce qu'il lui convenait pour le moins autant qu'au pape d'abolir tout ce qui rappelait le régime républicain. Cependant, le saint-père partit, sans que ce changement eût été réalisé, et ce ne fut que quelques mois après qu'il s'effectua.
Déçu dans ses espérances et n'attendant rien d'un séjour plus prolongé, Pie VII se détermina à retourner à Rome. Il vint voir pour la dernière fois l'empereur à Saint-Cloud le 9 germinal (30 mars). Le conseil d'État était assemblé lorsqu'il arriva. Il tra¬versa la salle, entra dans le cabinet de l'empereur, avec qui il resta dix minutes et en ressortit. Sa figure portait l'empreinte du mécontentement. Peu de jours après (le 14 germinal), il quitta Paris. On disait qu'on lui avait insinué de s'arrêter à Milan et d'assister à la cérémonie du couronnement de Napoléon comme roi d'Italie ; mais il se refusa à cette nouvelle condescendance, et l'on n'insista pas.
Livre de tout soin pour l'intérieur de la France, l'empereur partit de Paris le 10 germinal (31 mars), pour se rendre en Italie, après avoir demandé et obtenu un sénatus-consulte pour lever vingt mille hommes sur la réserve. Il chargea Cambacérès du travail avec ceux des ministres qui restaient à paris, à l'exception, cependant, de celui de la Police, dont il se réserva la correspondance directe. Le prince Joseph accompagna l'empereur jusqu'à Fontainebleau, et, avant de se quitter, il y eut entre les deux frères une sorte de réconciliation. Dans une assez longue conversation qu'ils eurent ensemble, l'empereur revint sur les reproches qu'il avait adressés au prince et se plaignit, comme de coutume, du peu de part qu'il prenait aux affaires et de sa conduite toujours en opposition avec le système qui venait d'être adopté. Néanmoins, il lui rendit justice sur quelques points et lui témoigna de l'intérêt. Il l'engagea à se rendre à son régiment au camp de Boulogne, à continuer d'y apprendre le métier de colonel et, après s'être occupé de cette étude pendant un mois, à faire une tournée sur les frontières du Nord et du Rhin, accompagné d'officiers du génie et d'artillerie, pour visiter nos principales forteresses et y puiser les connaissances militaires qui lui manquaient. Enfin, ils se séparèrent assez amicalement. Le prince Joseph revint à paris et, après s'être arrêté quelques jours à Mortefontaine, il se rendit à Boulogne et entreprit ensuite une excursion sur la frontière, comme on lui en avait suggéré l'idée.
Quant à l'empereur, il continua sa route, vint à Milan, où il reçut la couronne, et nomma le fils de l'impératrice, Eugène de Beauharnais, vice-roi d'Italie, sous le nom de prince Eugène-Napoléon.