L’enseignement de l’histoire des périodes napoléoniennes au lycée : le Second Empire escamoté dans le programme 2011 des classes de Premières

Auteur(s) : REY Jean-Philippe
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La réforme du lycée et des programmes se poursuit. Cette année scolaire 2010-2011 a été celle de l'entrée en application du nouveau programme d'histoire de la classe de Seconde générale. A la rentrée prochaine de septembre 2011, ce sont les nouveaux programmes des classes de Première qui entrent en vigueur. Puisque leur contenu est désormais certain (Bulletin Officiel spécial n°9 du 30 septembre 2010), il est possible de proposer quelques éléments d'analyse en ce qui concerne l'histoire napoléonienne.

Depuis 2002, deux programmes d'histoire pour les classes de Première générale existaient : l'un pour les classes des séries scientifiques (S), l'autre pour les classes des séries économiques et sociales  (ES) ou littéraires (L). Le premier, plus ramassé puisque prévu pour être enseigné en 32 heures, ne comprenait déjà aucune référence explicite au Second Empire. N'abordant le XIXe siècle qu'au travers de l'étude de « l'âge industriel en Europe et en Amérique du Nord » et ne prenant en compte l'histoire de France qu'à partir de la Belle Epoque, il ne permettait que très marginalement aux enseignants de travailler sur les années 1851-1870 alors même qu'elles n'étaient pas vues en classe de Seconde. Le second programme, prévu pour être enseigné en une cinquantaine d'heures, débutait également par une partie consacrée à l'âge industriel mais, l'élargissant à la notion de « civilisation », il comportait davantage d'opportunités de s'intéresser aux années du Second Empire. En outre, la deuxième partie du programme s'attachait à connaître « la France du milieu du XIXe siècle à 1914 » en mettant en évidence que, de 1848 à 1879, le pays était « à la recherche d'un régime politique » ce qui amenait logiquement à étudier la formule institutionnelle impériale.   
 
A partir de septembre 2011, les élèves des classes de Première générale se verront tous enseigner le même programme, quelle que soit leur série (ES, L ou S). Rappelons que les élèves de Première S passeront l'histoire-géographie en épreuve anticipée du Baccalauréat en fin de classe de Première et que, pour eux, ces disciplines deviendront optionnelles en Terminale. On peut d'ailleurs raisonnablement craindre que la mesure soit étendue aux autres séries dans les prochaines années.
 
Un seul programme, donc, qui change résolument de nature. Il n'a plus pour tâche de situer l'histoire de France dans l'histoire du monde et de l'Europe et il n'a plus pour but d'étudier cette période fondatrice du monde contemporain qui  s'étend de la moitié du XIXe siècle à la Seconde guerre mondiale, mais d'amener les élèves à « comprendre le XXe siècle ». On devine dès lors que  la connaissance du Second Empire ne fait plus partie des priorités si tant est que se fût jamais le cas. Prévu pour être traité entre 57 et 62 heures, le programme ne présente plus de continuité chronologique et s'articule autour de cinq thèmes : « Croissance économique, mondialisation et mutations des sociétés depuis le milieu du XIXe siècle », «  La guerre au XXe siècle », « Le siècle des totalitarismes », « Colonisation et décolonisation », « Les Français et la République ». Au sein de chacun des cinq thèmes, les enseignants ont la faculté d'étudier des cas parmi ceux proposés. Extrêmement rares sont les opportunités d'aborder les années napoléoniennes.
 
Ainsi, alors que la figure de Napoléon Ier et les années 1799-1815 étaient largement escamotées dans les nouveaux programmes de Seconde, celle de Napoléon III et le Second Empire sont absents des nouveaux programmes de Première. On ne peut qu'être inquiet face à cette évolution qui voit l'histoire nationale comme telle et l'histoire napoléonienne en particulier disparaître. Dans ces conditions, l'histoire des deux empires a peu de chance d'être familière aux nouvelles générations ! Peut-être une manière de se consoler est-elle de considérer que la mission dévolue aux associations d'histoire napoléonienne et à la Fondation Napoléon n'en devient que plus essentielle…

Titre de revue :
inédit
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