Les auxiliaires de l’Armée d’Orient (1798-1801). L’armée d’Orient de Toulon au Caire

Auteur(s) : SPILLMANN Georges
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Les auxiliaires de l’Armée d’Orient (1798-1801). L’armée d’Orient de Toulon au Caire

Le 15 mai 1798, la majeure partie de l'aile droite de l'Armée d'Angleterre, aux ordres de Bonaparte, commence à embarquer à bord de la flotte de l'amiral Brueys d'Aigelliers, en rade de Toulon.
Le 19 mai, la nouvelle Armada lève l'ancre et fait voile sur la Corse pour rallier en mer Tyrrhénienne les autres éléments venus des ports d'Italie, dont la division Desaix. Le doute est enfin levé, Malte, puis l'Egypte, sont visés.
Par une chance extraordinaire, qui se renouvellera à deux reprises durant la traversée, Nelson, toujours aux aguets sur les côtes de Provence avec trois navires seulement, malmené par une récente tempête, a levé la croisière pour réparer ses avaries. Sir William Pitt, Premier ministre, Lord Grenville, ministre des Affaires Etrangères, redoutent au premier chef un débarquement franco-espagnol en Irlande, voire en Ecosse ou même en Angleterre. Seul le ministre de la Guerre britannique craint une invasion de l'Egypte, mais on se gausse à Londres de ses folles visions.

En conséquence, le gros de la flotte de Lord Saint-Vincent bloque Cadix et surveille les parages du détroit de Gibraltar. C'est seulement dans les derniers jours du mois d'avril ou les tout premiers jours du mois de mai que les yeux des dirigeants de Londres se dessillent enfin. Aussitôt alerté, Lord Saint-Vincent envoie treize vaisseaux de haut bord à Nelson lequel a repris la mer après réparation. Mais, quand ce dernier se présente devant Toulon, le 31 mai, le nid est vide. Où sont donc les Français? Nelson part à leur recherche du côté de Naples, ce qui est avisé.
Cependant, le 10 juin, Bonaparte a déjà reçu la capitulation de Malte après un simulacre de résistance. Il en repart en hâte le surlendemain, laissant une garnison dans l'île, de tout temps très fortifiée.

Voici les effectifs et les moyens de l'Armée d'Orient, nouvelle appellation de l'Aile droite de l'Armée d'Angleterre, et de la Flotte qui la transporte.
Forces terrestres:
– Etat-Major Général, dont Bonaparte, commandant en chef, 11 généraux de division, 20 généraux de brigade 143
– Savants, écrivains, artistes 167
– Infanterie légère 5.403
– Infanterie de bataille 19.669
– Guides (dont 180 à cheval) 480
– Cavalerie (en partie démontée) 2.810
– Artillerie et Génie 3.245
– Officiers des Corps (au complet) 2.270
En gros, 35.000 hommes, sans compter le bataillon de la 7e Légère, embarqué in extremis, et le détachement du 49e de bataille, affecté de longue date à la garnison des vaisseaux, soit 1.545 hommes qui composeront en partie la garnison de Malte.
L'effectif total est donc, au départ, de 36.545 hommes. Il atteint environ 38.000 hommes avec le personnel des équipages d'artillerie (conducteurs et charretiers), qui n'est pas militaire.

La répartition est la suivante: 50 bataillons, 28 escadrons (hussards, chasseurs, dragons), de l'artillerie, du génie, des services. Il y a même une compagnie d'aérostiers, avec montgolfières, commandée par Conté.
La Flotte, imposante, comprend l'Orient, vaisseau amiral de 118 canons, douze vaisseaux de ligne armés de 906 canons, trois frégates, une corvette, deux bricks, deux vaisseaux et sept frégates armés en flûte (1). Mais Marmont, artilleur perspicace, observe que « nos vaisseaux étaient mal armés, nos équipages incomplets et peu instruits, nos bâtiments de guerre encombrés de troupes et de matériel d'artillerie qui gênaient la manoeuvre ».

Alors que les 16.000 officiers de l'Armée royale sont restés très nombreux dans les cadres jusqu'en 1796, date à laquelle il n'y en a plus que 2.000, les officiers de la belle Marine de Louis XVI ont, pour la plupart, soit émigré au début de la Révolution, soit démissionné, soit déserté pour rejoindre l'Armée catholique et royale de Vendée, ou les Chouans de Bretagne, de Normandie, du Maine, d'Anjou. De nombreux bas-officiers, des marins d'élite, voire de simples matelots, ont suivi leur exemple. La valeur de nos escadres en est sensiblement diminuée. La Flotte française mettra trente ans à s'en relever.
Le vice-amiral Brueys est secondé par les contre-amiraux de Villeneuve, Decrès, Blanquet du Chayla, commandants de division, et Gantaume, faisant fonction de chef d'Etat-Major.
L'effectif des équipages, canonniers compris, s'élève à 13.000 hommes.
Les convois de la Flotte comportent 309 bâtiments totalisant 47.300 tonneaux, tous nolisés, avec 3.017 hommes d'équipage.

Bonaparte emmène ainsi en Egypte environ 54.000 hommes ; c'était beaucoup pour la France, en guerre avec l'Angleterre – menacée au surplus par l'Autriche et la Russie de Paul Ier – mais néanmoins peu pour une opération aussi lointaine, aussi risquée. L'Egypte, il est vrai, n'était pas alors le pays surpeuplé d'aujourd'hui.
Les orientalistes de l'époque évaluaient sa population entre 2.500.000 et 3.000.000 d'habitants, se répartissant comme suit:
200.000 Coptes environ, de religion chrétienne, anciens autochtones;
quelques milliers de Grecs, généralement orthodoxes;
une petite élite d'Arabes conquérants représentée par l'aristocratie des Chorfa, descendants du Prophète, des cheiks et des oulémas (docteurs de la loi) de la célèbre Université d'El Azhar;
de 100.000 à 125.000 Bédouins (Arabes nomades) pouvant mettre en ligne près de 20.000 cavaliers et possesseurs de nombreux chameaux;
de petits et moyens propriétaires Arabes, en assez grand nombre, entièrement sédentarisés;
beaucoup de musulmans prolétaires, de fellah (paysans) à gages, de petits artisans, d'origine copte le plus souvent, mais convertis à l'Islam;
environ 200.000 Turcs, se divisant en janissaires ou anciens janissaires, venus de l'Epire ou de l'Albanie, et en Mameluks, anciens esclaves de race blanche, natifs du Caucase, musulmans, forts de 12.000 cavaliers, servis chacun par deux fellah ilotes.
Le Caire pouvait avoir 200.000 habitants, Alexandrie, bien déchue de son antique splendeur, 10.000 seulement.
Les Mameluks, milice guerrière, étaient les vrais maîtres du pays qu'ils mettaient en coupe réglée, le pacha représentant le sultan de Constantinople, suzerain nominal de l'Egypte, n'ayant aucune autorité.

Bonaparte continuateur de la politique royale

L'Expédition d'Egypte, concertée entre Bonaparte, alors commandant en chef de l'Armée d'Italie, et Talleyrand, ministre des Relations extérieures, approuvée par le Directoire, qui avait donné à cet effet pleins pouvoirs au jeune général corse, était dans la pure ligne de la politique royale, décidée en pleine connaissance de cause après les graves revers de la guerre de Sept Ans entraînant la perte du Canada et de nos possessions des Indes.
Il ne s'agissait nullement, dans l'esprit de Louis XV et de Louis XVI, comme dans celui de leurs ministres, de prendre une éclatante revanche, mais bien, d'une part, de mettre un frein à l'expansion anglaise dans le monde, de l'autre d'établir en Europe un équilibre satisfaisant entre les Grandes Puissances de l'époque.
Il fallait en effet tenir compte de l'entrée en scène d'une Russie expansionniste et de la nouvelle force militaire prussienne du grand Frédéric. D'où la nécessité d'une bonne entente franco-autrichienne, consolidée par le mariage de l'héritier du Trône de France avec une archiduchesse, fille de l'impératrice d'Autriche, reine de Hongrie et de Bohème.

La France ne se replie pas sur elle-même pour autant. Ayant réorganisé son armée, sa marine, rénové son matériel et adopté la stratégie mondiale préconisée par le maréchal de Castries et par Choiseul, elle a pris une part décisive, sur terre et sur mer, à la guerre d'Indépendance des colonies anglaises d'Amérique du Nord – donc affaibli d'autant le gouvernement de Londres. Et elle entend pratiquer désormais une hardie politique d'expansion dans cette Méditerranée qu'elle veut faire sienne.

Là, en effet, nos chances de succès sont grandes. D'abord, nous sommes riverains d'une partie de la Méditerranée occidentale. Ensuite, l'Espagne et le royaume des Deux-Siciles, où règnent des Bourbons, sont nos alliés. Enfin, nous entretenons de bonnes relations, traditionnelles depuis François Ier, avec l'Empire ottoman du sultan de Constantinople, maître des Balkans, de l'Asie Mineure, de l'Arabie, suzerain de l'Egypte, de la Tripolitaine, de la Tunisie et du dey d'Alger, lequel a une autorité au moins nominale sur les beys de Constantine, de Médéa, d'Oran.
Par l'accord dit des Capitations, nous exerçons la protection des minorités chrétiennes du Proche-Orient et nous avons des consuls ou des agents consulaires dans les Echelles du Levant, c'est-à-dire dans les ports du bassin oriental de la Méditerranée où subsistent de vieilles communautés franques chrétiennes.
Une chaire d'arabe existe au Collège de France, à Paris, et les sujets ottomans, quelle que soit leur confession religieuse, font de longue date leurs études de médecine à la vieille Faculté de Montpellier, célèbre jusqu'au Golfe Persique et même à Téhéran.

Bref, nous jouissons dans cette contrée relativement proche de la France d'une situation privilégiée, à nulle autre pareille. Et le sultan de Constantinople compte au surplus sur nous pour mieux résister aux pressions russes. Car la Grande Catherine ne cache pas sa volonté d'arracher à la Turquie la Bessarabie, la Moldavie, la Valachie, la Dobroudja, et de protéger les Grecs orthodoxes de la péninsule balkanique, afin d'accéder par là à une mer chaude, la Méditerranée, brisant ainsi l'encerclement imposé à son Empire par une situation climatique très défavorable.
Et Magallon, notre consul en Egypte, de suggérer à Versailles d'occuper ce pays, d'y établir l'autorité du Grand Turc de Constantinople, bafouée chaque jour davantage par les Mameluks, et cela avec son assentiment au moins tacite. Or l'Egypte est riveraine de la Mer Rouge. En arrière-plan on voit aussi se profiler une possibilité d'intervention aux Indes où Tippo-Sahib, sultan musulman de Mysore, résiste encore, avec des fortunes diverses, aux Anglais. N'est-ce point là une grande géo-politique susceptible d'intéresser le maréchal de Castries?

Lépisode de Malte

Sentant Nelson à ses trousses, Bonaparte abrège son escale à Malte mais ce qu'il y accomplit en deux jours est une bonne préfiguration de ce qu'il fera bientôt en Egypte. D'abord, il apporte la liberté et l'égalité, avec l'abolition des privilèges. Les bagnes, où les chevaliers de Malte maintenaient en esclavage deux ou trois mille musulmans, souvent employés comme chiourme sur leurs galères, sont ouverts et ceux qui le désirent peuvent rentrer chez eux. Ils le font avec joie. Certains, marins de profession, préfèrent toutefois servir comme volontaires à bord de nos navires. Une parente du sultan du Maroc, Moulay Sliman, est rendue à sa famille à la grande satisfaction de ce prince. Bonaparte émancipe aussi les Juifs maltais, comme il l'avait fait précédemment pour leurs coreligionnaires en Italie, à Ancône notamment.
Il nomme le général de division Vaubois commandant des îles de Malte et de Gozzo, avec le général de brigade Chanez pour adjoint, et une garnison de 3.053 hommes prélevés sur le 7e Léger, les 6e, 19e, 41e et 80e de ligne, qu'appuient 5 compagnies d'artillerie.

Afin de compenser, au moins partiellement, cette perte d'effectifs, il décide d'emmener en Egypte 37 jeunes chevaliers français de l'Ordre de Malte. Ils serviront comme officiers ou employés supérieurs des services administratifs. La même destination est donnée aux grenadiers de la Garde du Grand Maître, peu nombreux, et aux hommes du régiment de Malte, ces derniers de très médiocre valeur. Mais ce seront, pense-t-il, autant de mutins en moins si, d'aventure, les Maltais se révoltaient contre Vaubois, de connivence avec les Anglais.
De toute façon, ces piètes militaires parlent le « sabir » usité dans les ports méditerranéens et ont parfois de bonnes notions d'arabe. Ils pourront donc être utiles. Compte tenu de nombreuses désertions dès l'annonce de cette décision, 358 Maltais seulement partent pour l'Egypte où ils constitueront la Légion Maltaise.
Bonaparte décide aussi l'envoi à Paris de 60 jeunes Maltais de neuf à quatorze ans. Ils seront élevés dans les collèges de la République. Si besoin est, ils serviront d'otages…

La dernière phase de la traversée

Nelson; don du Commandant Pichon. (Archives Musée de la Marine)En mer, tandis que Nelson, toutes voiles dehors, cingle droit vers Alexandrie, Bonaparte fait mettre le cap sur la Crète. Se fiant à son Etoile, il prépare l'action politique et psychologique qu'il entreprendra dès le débarquement effectué. Son Armada vogue à petite vitesse, les transports de troupes, mauvais marcheurs, ralentissant l'allure générale et donnant fort à faire aux frégates et aux bricks chargés de maintenir groupés leur meute. De nuit, Nelson dépasse les Français naviguant tous feux éteints. Ses vaisseaux tracent leur sillon en file serrée et il ne dispose d'aucune frégate pour l'éclairer au loin.

Avant le départ de l'expédition, Bonaparte et Talleyrand se sont répartis la tâche. Dans leur esprit, l'Egypte ne sera pas une colonie française. Elle constituera un condominium franco-turc, partie intégrante de l'Empire ottoman. Notre rôle se bornera à mater les Mameluks usurpateurs et oppresseurs, à rétablir l'autorité du Sultan Selim III, à garantir l'ordre public et à permettre de ce seul fait le retour à l'antique prospérité de la vallée du Nil, compromise par une séculaire mauvaise gestion. En conséquence, les Egyptiens se gouverneront, s'administreront eux-mêmes, selon leurs us et coutumes, sous notre contrôle, avec nos conseils et notre aide. C'est là une conception fort neuve.

Pendant que Bonaparte remplira cette mission, Talleyrand ira à Constantinople exposer nos intentions au sultan Selim III, personnellement bien disposé à notre égard.
Il le rassurera et s'efforcera d'obtenir, sinon son appui, à tout le moins sa neutralité. Nous sommes en Egypte, lui dira-t-il, pour mettre fin à la tyrannie et à la rébellion des Mameluks, ses incorrigibles mauvais sujets. Ceci est clair. D'autre part, nous restons amis de l'Islam et le Commandeur des Croyants qu'est Selim III n'a rien à redouter de nous dans le domaine religieux.
La présence de Talleyrand sur les rives du Bosphore apparaît d'autant plus indispensable que notre ambassadeur en Turquie, le général Aubert-Dubayet, très bien vu dans le pays, est mort à son poste, le 17 décembre 1797, et n'a pas été remplacé. Un chargé d'affaires, Pierre Ruffin, assure seul l'intérim. Il faut donc qu'un grand, qu'un habile personnage donne au sultan, les apaisements nécessaires car les ambassadeurs d'Angleterre, de Russie, vont se déchaîner contre nous et feront couler l'or à flots pour que soit proclamée de Constantinople la Guerre Sainte contre les Français.
Or, Talleyrand ne se rendra pas à Constantinople. Non seulement il sera personnellement défaillant, mais il n'enverra aucun autre ambassadeur auprès de Selim III, laissant ainsi le champ libre aux intrigues conjuguées anglaises et russes. Sa carence est ainsi totale, inexcusable, inexplicable. Dès le départ, l'expédition d'Egypte est donc boîteuse. Elle ne peut réussir.

Quoiqu'il en soit, Bonaparte, confiant en Talleyrand, rédige à bord de l'Orient, avec son interprète en chef Venture de Paradis, une proclamation à ses troupes sur la conduite à tenir à l'égard de la population civile, datée du 28 juin 1798, et une proclamation aux Egyptiens qui se termine ainsi :
« Les cheiks, les cadis et les imans conserveront les fonctions de leurs places; chaque habitant restera chez lui et les prières continueront comme à l'ordinaire. Chacun remerciera Dieu de la destruction des Mameluks et criera: Gloire au Sultan, gloire à l'armée française, son amie! Malédiction aux Mameluks et bonheur au peuple d'Egypte! ».
Les deux proclamations, aussitôt imprimées en français et en arabe par les soins de Gabriel Marcel sur les presses installées à bord, seront distribuées dès le débarquement.

Nelson, sans le savoir, précède de peu Bonaparte à Alexandrie. Ne l'y trouvant pas, il fait voile aussitôt vers Rhodes et Chypre pour le cas où les Français gagneraient la Mer Egée. Les vigies de la frégate La Junon, envoyée reconnaître Alexandrie et y chercher notre consul, aperçoivent du haut des mâts les voiles anglaises s'estompant au loin dans la brume, en direction du nord-est.

Le débarquement et l’organisation de l’Egypte

Sultan Selim III.L'Armada française ne tarde pas à être en vue de l'Afrique. Renseigné par La Junon, Bonaparte fait hâtivement commencer le débarquement dès le soir du 1er juillet, dans l'anse du Marabout, à l'ouest du port.
Le 2 juillet, Alexandrie vivement attaqué, sans artillerie, capitule. Il y installe aussitôt un Divan de sept des cheiks les plus considérables de la ville afin d'y pourvoir à son administration.
Le 21 juillet, Bonaparte remporte sur les Mameluks, les milices égyptiennes et les janissaires la bataille des Pyramides. Le 23 juillet, Le Caire se rend. Le lendemain, le vainqueur y fait son entrée solennelle.

Sans perdre de temps, il procède à l'organisation militaire du pays. Le géant Kléber, blessé au front à l'assaut d'Alexandrie, tiendra le Delta, ou Bahireh, c'est-à-dire la Basse-Egypte. Le fluet, mais indomptable Desaix, d'une valeur hors pair, remontera le Nil à la poursuite de Mourad-bey, chef militaire des Mameluks, et pacifiera la Haute-Egypte, ou Saïd. Lui, Bonaparte, s'occupera au Caire de la Moyenne-Egypte, où Ouestanieh, installera le prestigieux Institut d'Egypte, dont il sera le vice-président, déterminera l'orientation de note politique, dotera enfin le pays d'un système administratif simple, cohérent, peu coûteux.

Au Caire, il institue, comme à Alexandrie, un Divan national composé de représentants des Divans locaux. Bref, il entend nouer un dialogue fructueux avec les Egyptiens et les associer à la gestion de leurs intérêts afin de les habituer à l'exercice d'une certaine forme de la démocratie.

Il obtient aussi des savants ouléma de la mosquée-université du Caire, si réputée dans tout l'Islam, une déclaration à la France. Il témoigne de la plus grande considération aux chorfa et à leur naqib au Caire, le cheik Khelil el Bekri, nommé en remplacement de Seïd Omar qui s'est enfui en Palestine avec le chef mameluk Ibrahim-bey.

Enfin, il envoie au pacha turc, Abou Bekr, réfugié lui aussi en Palestine, la lettre suivante: « Je suis fâché de la violence que vous a faite Ibrahim en vous forçant à quitter le Caire pour le suivre. Si vous en êtes le maître, revenez dans cette ville, vous y jouirez de la considération et du rang dus au représentant de notre ami le Sultan ».

Il libère les Grecs, les Juifs, les Coptes des sujétions qui leur étaient imposées et met fin aux vexations dont ils étaient victimes.
Par contre, les Mameluks, défaits en plusieurs combats, décimés lors de la bataille des Pyramides, sont mis hors la loi, voient leurs biens confisqués, leurs esclaves libérés. Déchus en quelques semaines de leur ancienne splendeur, ils se divisent en deux groupes encore importants, l'un en Palestine avec Ibrahim-bey, l'autre, le plus nombreux, le plus acharné, en Haute-Egypte avec Mourad-bey. Ce dernier luttera contre Desaix près de deux années durant, en dépit de constants revers.

Notes

(1) C'est-à-dire affectés au transport du matériel.
Titre de revue :
Revue du Souvenir Napoléonien
Numéro de la revue :
304
Numéro de page :
2-6
Mois de publication :
mars
Année de publication :
1979
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