Les éléphants de Napoléon III

Auteur(s) : DE BRUCHARD Marie (trad.), MILES Andrew
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Une brève histoire des pachydermes logés dans les jardins zoologiques du Second Empire.
Les éléphants de Napoléon III
L'abattage de Castor le 29 décembre 1870

Jussia et Bangkok, les éléphants siamois

Le Moniteur du 23 novembre 1862 raconta l'acquisition, entre autres animaux, de deux nouveaux éléphants d'Asie, « dons généreux » du roi de Siam dont les ambassadeurs venaient d'arriver à la cour française. Un autre cadeau fait à l'Empereur, un éléphant blanc (l'emblème légendaire du Siam), était quant à lui mort au cours du voyage. Les animaux furent envoyés à la ménagerie du Muséum d'Histoire naturelle dans le Jardin des Plantes à Paris. La ménagerie avait été fondée pendant la révolution quand la collection royale d'animaux avait été déplacée dans la ville. Le Moniteur mentionnait, à l'occasion, l'existence de deux précédents éléphants : Roger, l'éléphant d'Asie, et Chevrette, l'éléphant d'Afrique, dont les différences physionomiques et les caractères étaient décrits en détails. Chevrette avait ainsi été réputée d'un tempérament doux et d'un amour inconditionnel pour le pain de seigle. Sa capacité à charmer même les « coeurs de pierre » en les implorant de sa trompe semblait notable. Les deux nouveaux éléphants du Siam furent nommés Jussia et Bangkok ; ils vécurent respectivement jusqu'en 1882 et 1889.

Le triste sort de Castor et Pollux

Jussia et Bangkok furent conduits à la ménagerie du Jardin des Plantes, et non à la ménagerie du Jardin d'Acclimatation, au Bois de Boulogne. Leurs âges de décès honorables semblent indiquer qu'ils échappèrent au triste sort de leurs congénères, Castor et Pollux.
 
Ces derniers qui furent mangés par les Parisiens pendant le siège de 1870.
L'homme politique et écrivain anglais, Henry Labouchère, était à Paris au moment du siège et indiqua le détail des prix atteints par la charcuterie inaccoutumée : « les troncs de Castor et Pollux se vendirent pour 40 francs la livre, les autres parties intéressantes des jumeaux atteignirent dans les 10 francs la livre ».

Labouchère raconta avoir mangé dans l'un des restaurants qui servirent les malheureux animaux. Il décrivit avoir mangé « une tranche de Pollux pour le dîner », qui était « dure, épaisse et grasse ». Il ne « recommandait pas aux familles anglaises de manger de l'éléphant tant qu'ils pouvaient se fournir en boeuf ou en mouton ». Bien que la viande d'éléphant ait été dévorée en quelques heures, le célèbre restaurant où elle avait été servie, Chez Voisin, continua à présenter sur sa carte de décembre 1870 « un consommé d'éléphant » qui attirait les curieux fortunés.

Victor Hugo nota, en parallèle, peu après dans ses Choses vues, le 11 janvier 1871, qu'alors « un oeuf coûte 2 fr. 75. La viande d'éléphant coûte 40 francs la livre. Un sac d'oignons 800 francs. »

Le « vrai » Jumbo

Un autre résident pachydermique du Jardin des Plantes en ce temps se trouvait être un énorme éléphant d'Afrique nommé Jumbo. Né dans le Soudan français et envoyé à Paris en 1861, il fut transféré au zoo de Londres en 1865. En 1881, il fut vendu pour la somme princière de 10 000 $ au cirque Barnum and Bailey. Au moment de sa mort, Jumbo mesurait quatre mètres de haut, et son nom – dérivé d'un mot swahili signifiant « chef » – est depuis associé à l'animal en général. En anglais courant, il tient d'ailleurs lieu de synonyme à l'adjectif « géant ».
 
Traduit de l'anglais en novembre 2012

Titre de revue :
inédit
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