Loi relative à l’Organisation de la Cour des Comptes du 16 Septembre 1807

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Napoléon, par la grâce de Dieu et les constitutions, EMPEREUR DES FRANÇAIS, ROI D'ITALIE, et PROTECTEUR DE LA CONFEDERATION DU RHIN, à tous présens et à venir, SALUT.
LE CORPS LEGISLATIF a rendu, le 16 septembre 1807, le décret suivant, conformément à la proposition faite au nom de l'empereur, et après avoir entendu les orateurs du Conseil d'état et des sections du Tribunat le même jour.

Titre 1er. Organisation de la Cour des Comptes

                                                       Article premier
Les fonctions de la comptabilité nationale seront exercées par une cour des comptes.
                                                       Article 2
La cour des comptes sera composée d'un premier président, trois présidens, dix-huit maîtres des comptes, de référendaires au nombre qui sera déterminé par le Gouvernement, un procureur général, et un greffier en chef.
 
                                                       Article 3
Il sera formé trois chambres ; chacune composée d'un président, six maîtres aux comptes : le premier président peut présider chacune des chambres.
 
                                                       Article 4
Les référendaires sont chargés de faire les rapports ; ils n'ont point voix délibérative. Les décisions seront prises, dans chaque chambre, à la majorité des voix ; et, en cas de partage, la voix du président est prépondérante.
 
                                                       Article 5
Chaque chambre ne pourra juger qu'à cinq membres au moins.
 
                                                       Article 6
Les membres de la cour des comptes sont nommés a vie par l'Empereur. Les présidens pourront être changés chaque année.
 
                                                       Article 7
La cour des comptes prend rang immédiatement après la cour de cassation, et jouit des mêmes prérogatives.
                                                       Article 8
Le premier président, les présidens et procureur général, prêtent serment entre les mains de l'Empereur.
 
                                                       Article 9
Le prince archi-trésorier reçoit le serment des autres membres.
 
                                                       Article 10
Le premier  président a la police et la surveillance générale.

TITRE II. De la Compétence de la Cour des Comptes

                                                       Article 11
La cour sera chargée du jugement des comptes, des recettes du trésor, des receveurs généraux de département et des régies et administration des contributions indirectes ; des dépenses du trésor, des payeurs généraux, des payeurs d'armées, des divisions militaires, des arrondissements maritimes et des départements ;
Des recettes et dépenses, des fonds et revenus spécialement affectés aux dépenses des départements et des communes, dont les budjets sont arrêtés par l'Empereur.
 
                                                       Article 12
Les comptables des derniers publics en recettes et dépenses seront tenus de fournir et déposer leurs comptes au greffe de la cour, dans les délais prescrits par les lois et réglemens ; et, en cas de défaut ou de retard des comptables, la cour pourra les condamner aux amendes et aux peines prononcées par les lois et réglemens.
 
                                                       Article 13
La cour réglera et apurera les comptes qui lui seront présentés ; elle établira par ses arrêts définitifs si les comptables sont quittes, ou en avance, ou en débet.
Dans les deux premiers cas, elle prononcera leur décharge définitive, et ordonnera main- levée et radiation des oppositions et inscriptions hypothécaires mises sur leur biens à raison de la gestion dont le compte est jugé.
Dans le troisième cas, elle les condamnera à solder leur débet au trésor dans le délai prescrit par la loi.
Dans tous les cas, une expédition de ses arrêts sera adressée au ministre du trésor, pour en faire suivre l'exécution par l'agent établi près de lui.
 
                                                       Article 14
La cour, nonobstant l'arrêt qui aurait jugé définitivement un compte, pourra procéder à sa révision, soit sur la demande du comptable, appuyée de pièces justificatives recouvrées depuis l'arrêt, soit d'office, soit à la réquisition du procureur général, pour erreur, omission, faux ou double emploi reconnus par la vérification d'autres comptes.
 
                                                       Article 15
La cour prononcera sur les demandes en réduction, une translation d'hypothèques, formées par des comptables encore en exercice, ou par ceux hors d'exercice dont les comptes ne sont pas définitivement apurés, en exigeant les sûretés suffisantes pour la conservation des droits du trésor.
 
                                                       Article 16
Si, dans l'examen des comptes, la cour trouve des faux ou des concussions, il en sera rendu compte au ministre des finances, et référé au grand juge ministre de la justice, qui fera poursuivre les auteurs devant les tribunaux ordinaires.
 
                                                       Article 17
Les arrêts de la cour contre les comptables seront exécutoires ; et dans le cas où un comptable se croirait fondé à attaquer un arrêt pour violation des formes ou de la loi, il se pourvoira, dans les trois mois pour tout délai, à compter de la notification de l'arrêt, au Conseil d'état, conformément au règlement sur le contentieux.
Le ministre des finances, et tout autre ministre, pour ce qui concerne son département, pourront faire, dans le même délai, leur rapport à l'Empereur, et lui proposer le renvoi au Conseil d'état ; de leurs demandes en cassation des arrêts qu'ils croiront devoir être cassés pour violation des formes ou de la loi.
 
                                                       Article 18
La cour ne pourra, en aucun cas, s'attribuer de juridiction sur les ordonnateurs, ni refuser aux payeurs l'allocation des paiemens par eux faits, sur des ordonnances revêtues des formalités prescrites, et accompagnées des acquits des parties prenantes et des pièces que l'ordonnateur aura prescrit d'y joindre.

TITRE III. Des Formes de la Vérification et des Jugements des Comptes

                                                       Article 19
Les référendaires seront tenus de vérifier, par eux-mêmes, tous les comptes qui leur seront distribués.
 
                                                       Article 20
Ils formeront sur chaque compte deux cahiers d'observation : les premières, relatives à la ligne de compte seulement, c'est-à-dire, aux charges et souffrances dont chaque article du compte leur aura paru susceptible, relativement au comptable qui le présente ;
Les deuxièmes, celles qui peuvent résulter de la comparaison de la nature des recettes avec les lois, et de la nature des dépenses avec les crédits.
 
                                                       Article 21
La minute des arrêts est rédigée par le référendaire rapporteur, et signée de lui et du président de la chambre ; elle est remise avec les pièces au greffier en chef ; celui-ci la présente à la signature du premier président, et ensuite en fait et signe les expéditions.
 
                                                       Article 22
Au mois de janvier de chaque année, le prince archi-trésorier proposera à l'Empereur le choix de quatre commissaires, qui formeront, avec le premier président, un comité particulier chargé d'examiner les observations faites, pendant le cours de l'année précédentes, par les référendaires. Ce comité discute ces observations, écarte celles qu'il ne juge pas fondées, en forme des autres l'objet d'un rapport, qui remis par le président au prince archi-trésorier, lequel porte à la connaissance de l'Empereur.

TITRE IV. Dispositions transitoires

Il pourra être formé une quatrième chambre temporaire, composée d'un président et six maîtres aux comptes pour les jugements des comptes arriérés.
Il sera pourvu, par des réglemens d'administration publiques, à l'ordre du service de la cour des comptes, et à toutes les mesures d'exécution de la présente.

Collationné à l'original, par nous président et secrétaires du Corps législatif. Paris, le 16 Septembre 1807. Signé FONTANES, président ; MICHELET-ROCHEMONT, CHAPPUIS, J. V. DUMONLARD, MILSCENT, secrétaires.
 
MANDONS et ordonnons que les présentes, revêtues des sceaux de l'Etat, insérées au Bulletin des lois, soient adressées aux Cours, aux Tribunaux et aux autorités administratives, pour qu'ils les inscrivent dans leur registres, les observent et les fassent observer ; et notre Grand-Juge Ministre de la justice est chargé d'en surveiller la publication.
 
Donné en notre palais impérial de Fontainebleau, le 26 septembre 1807.
Signé NAPOLEON.
 
Vu par nous Archi-Chancelier de l'Empire,
Signé CAMBACERES.
Le Grand-Juge Ministre de la Justice,
Signé REGNIER,
Par l'Empereur :
Le Ministre Secrétaire d'état,
Signé HUGUES B. MARET.

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