Une chronique de Romain Trichereau : la Roche-sur-Yon et sa place Nap’

Auteur(s) : TRICHEREAU Romain
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Qui ne connait pas la place Nap’ de La Roche-sur-Yon ? Oui, bon, quasiment tout le monde ! Et c’est justement la raison de s’y attarder quelques instants, car s’il y a bien un lieu incontournable en pays yonnais, c’est sa place centrale où trône en son centre Napoléon sur son cheval, fier comme un bar-tabac, dirait Coluche ! Cent-cinquante-deux communes vendéennes ont d’ailleurs financé cette statue réalisée par le sculpteur Nieuwerkerke, édifiée en 1854, inscrite depuis 2016 au titre des « Monuments historiques » et classée en 2019. Mais quelle est donc l’histoire de cette place ? Quelle a été son utilité ? Pourquoi Napoléon ? Et pourquoi aujourd’hui trouve-t-on des bassins avec à l’intérieur des poissons rouges, (bien vivants, je vous l’assure) qui pèsent grosso modo deux-cent-dix kilos, et des machines à moitié immergées, articulables de la berge à notre guise ?

Une chronique de Romain Trichereau : la Roche-sur-Yon et sa place Nap’
Romain Trichereau © D R

Remontons le temps ! La Roche-sur-Yon est une ville vendéenne qui émerge véritablement au XIXe siècle sous l’influence de celui qui a récemment été interprété par Joaquin Phoenix (devrais-je dire brillamment ? Eh bien non !), l’inventeur du Code civil (pas Joaquin Phoenix, hein) : Napoléon Ier bien sûr. Alors que Napoléon est tout juste proclamé Empereur par le Sénat, il est décidé, par décret impérial du 25 mai 1804 de déplacer la préfecture de la Vendée de Fontenay-le-Comte, trop excentrée. L’idée d’établir le chef-lieu au centre de la Vendée n’est pas nouvelle, elle avait déjà été évoquée en 1789. Le choix s’est porté sur La Roche-sur-Yon, dont la position centrale au sein du département permet d’être à une journée à cheval, tout au plus, des frontières départementales. Ce modeste bourg va devenir une « nouvelle ville » ! Pour cette préfecture de grande importance administrative sont prévus un hôtel de ville, un tribunal, un hôpital, un lycée, un marché couvert, un hôtel des postes, des casernes, une prison, une place d’armes. Le choix de l’emplacement de l’église, à l’opposé de ceux de l’hôtel de ville et du palais de justice, témoigne de la résolution de l’Empereur de séparer l’Église de l’État.

Vingt-cinq ans de travaux seront nécessaires pour façonner La Roche-sur-Yon suivant les plans des ingénieurs Cormier et Valot. Un modèle urbain napoléonien voit le jour : forme pentagonale, organisation en damier, avec la particularité d’avoir en son centre cette fameuse grande place. Il a été dit qu’elle pouvait rassembler jusqu’à vingt mille soldats. Mais cette place centrale, officiellement appelée « la place Napoléon », n’en déplaise à ses détracteurs tout au long de l’Histoire, avait principalement pour vocation d’être un lieu de rassemblement, de lien social, en somme une place civique d’où partaient toutes les routes. D’aucuns diront que toutes les routes mènent à Rome, d’autres diront, à compter de cette lecture, qu’elles mènent surtout à La Roche-sur-Yon !

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, on entre dans l’ère de l’automobile, l’un des symboles des Trente Glorieuses, et la place Napoléon y prend toute sa part en étant transformée en parking. Divers projets de réaménagement ont émergé dans les années 1970 mais ne verront pas le jour pour des raisons financières. En 1982, la place retrouve son caractère piétonnier, tout en conservant quelques espaces de stationnement. L’histoire de ce lieu tel qu’il se présente aujourd’hui commence en 2010 avec une grande réflexion de réaménagement. Axé sur l’idée de développer des espaces de verdure, des bassins, et de faciliter l’accès aux transports en commun, le projet vise à moderniser intégralement la place, qui prendra en 2014, après deux années de travaux, le visage que nous lui connaissons aujourd’hui. Avec ses animaux mécaniques, la place devient un spectacle que l’on doit à un artiste, François Delarozière, fondateur de la compagnie « La Machine », et à un urbaniste, Alexandre Chemetoff. Si l’on en croit la légende, l’origine de ce zoo, où les bêtes artificielles (crocodile, dromadaire, flamants roses, hippopotame…) proviendrait de l’expédition d’Égypte…

« – Et alors la marmotte, elle met le chocolat dans le papier d’alu !

– Mais bien sûr ! »

Romain Trichereau est maître de conférences à l’ICES-Institut catholique de Vendée

Pour en savoir plus, consultez le site Ville impériale.

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