Une chronique d’Irène Delage : Le bicentenaire de la mort de Napoléon, un vrai cas d’école

Auteur(s) : DELAGE Irène
Partager

À la mi-juin, je devrais intervenir dans une classe, celle d’une école primaire à la demande de la professeure des écoles : le bicentenaire de la mort de Napoléon est cette année l’occasion d’étudier un peu plus l’Empereur et son époque. La première sollicitation qui m’avait été faite, il y a quelques mois, portait même sur une intervention devant trois classes réunies (abandonnée pour des raisons sanitaires).

Une chronique d’Irène Delage : Le bicentenaire de la mort de Napoléon, un vrai cas d’école

En réfléchissant avec l’enseignante sur ce que je pouvais apporter concrètement à sa classe, en fonction du programme traité et de la connaissance qu’elle a de ses élèves, je pensais également aux polémiques de ces dernières semaines sur la nécessité, ou pas, de « célébrer » ou « commémorer » le bicentenaire de la mort de Napoléon. Les lecteurs de la Lettre d’information du 5 mai dernier auront peut-être pris connaissance des initiatives que deux établissements scolaires nous ont communiquées : notamment, des professeurs et des élèves de 4e ont « profité » de ce bicentenaire napoléonien pour proposer une exposition livrant leurs réflexions sur le Premier Empire et le personnage de Napoléon. Tous les aspects sont passés en revue, les Erreurs de Napoléon figurent entre les Masses de granit et la place des Arts sous l’Empire.

En 2016, un sondage réalisé par BVA dans la presse régionale montrait que la personnalité historique masculine jugée marquante (et non pas « préférée » comme a souhaité le titrer le quotidien Ouest France) était le général de Gaulle, suivi de Napoléon Ier et Louis XIV. Cette même année 2016 paraissait l’étude « Récit du commun. L’histoire nationale racontée par les élèves » (désormais accessible en ligne en son entièreté). Passionnante par son approche et ses résultats, elle s’intéressait à la façon dont des élèves (plus de 5 800 interrogés en France, âgés de 11 à 19 ans) faisaient librement le récit de l’histoire de France, comment ils la percevaient ou s’en souvenaient. Au sein d’une conception linéaire et progressiste de l’histoire, se dégageaient la dominante du « récit national » et de sa dimension guerrière et l’importance des figures du pouvoir (Louis XIV, Napoléon et Charlemagne étaient les trois personnalités les plus citées). L’apprentissage se faisait principalement dans le cadre scolaire, mais aussi avec d’autres sources, familiale, médiatique, communautaire.

Cinq ans plus tard, comment les élèves et les étudiants ont-ils été, ces dernières semaines, confrontés à la façon dont Napoléon Ier et l’histoire napoléonienne ont été présentés dans la presse, les magazines, les émissions télévisuelles, confrontés aux débats et aux polémiques ? Quel savoir et quel savoir faire ont-ils pu acquérir, en termes de connaissances mais aussi en termes de démarche critique et de réflexion documentée ? Tout y fut, pour que les professeurs puissent continuer avec leurs élèves à étudier, aujourd’hui, un chef d’État, son destin et son époque d’il y a deux cents ans, et à dégager un temps pour la compréhension d’une époque passée et pour la définition des valeurs que nous voulons défendre pour notre société actuelle. Le bicentenaire de la mort de Napoléon, un vrai cas d’école.
Dans un article du Figaro Étudiant du 5 mai dernier, (dont, entre autres propos, le sous-titre fait sursauter : parle-t-on encore des « exploits » de Napoléon à des élèves ?), je retiendrai surtout les deux derniers témoignages de professeurs, sur le maintien de l’intérêt des élèves pour l’histoire napoléonienne, mais dans une perspective que ces derniers veulent être nourrie de complexité et de nuance.
C’est ce qu’ils attendent de nous, de nous tous, et ce que nous leur devons.

Irène Delage est chef du service Documentation et Communication numérique de la Fondation Napoléon.
12 mai 2021

Partager