Né le 22 novembre 1728 à Karlsruhe, Karl Friedrich est le fils du Prince héréditaire de Bade, Friedrich von Baden-Durlach (1703-1732) et de Anne Charlotte von Nassau-Dietz-Orange (1710-1777).
Margrave de Baden-Durlach, Karl Friedrich hérite de la branche de Baden-Baden en 1771, devint Électeur de Bade en 1803 et grand-duc en 1806. Il épouse en premières noces en 1751 la Princesse Caroline de Hesse-Darmstadt (1723-1783), puis en secondes noces, en 1787, Luise Geiger (1768-1820), titrée Comtesse von Hochberg en 1796 et Princesse de Bade en 1817, dont il aura dix enfants.
Quintessence du despote éclairé, Karl Friedrich traverse et participe à tous les bouleversements du mouvement des Lumières, de la Révolution et de la période napoléonienne. Au cours de ces 65 années de règne, il améliore l’agriculture, abolit la torture en 1767 et le servage en 1783. A partir de 1803, guidé par son ministre Brauer, il modernise l’administration.
Bien que faisant partie des vaincus des guerres de 1793 contre la France, Karl Friedrich est bien traité par le gouvernement révolutionnaire et signe un traité avec la France en 1796. Il consent alors, non seulement à la césure des États de la rive gauche du Rhin (immédiatement opposé à Bade sur la rive droite du Rhin), mais aussi à laisser passer librement sur son territoire des troupes françaises. De son côté, la France promet de ne pas apporter son soutien aux Jacobins badois.
Lors de la guerre entre Napoléon et la seconde coalition, Bade applique une neutralité prudente. Malgré le manque de soutien badois, Napoléon augmente le margraviat de nouveaux territoires, afin de compter un allié assez fort pour supporter sa politique dans les États allemands voisins, mais aussi pour l’aider à contrer l’Autriche.
Durant la décennie 1800-1810, Napoléon fait passer le territoire de Bade de 3 600 à 15 000 km2. Karl Friedrich est en effet l’un des grands bénéficiaires de la Reichsdeputationshauptschluss (commission extraordinaire chargée des compensations des princes allemands qui avaient perdu des territoires lorsque la rive gauche du Rhin était devenue française). L’une des raisons de ces avantages se trouve dans le mariage de la petite-fille de Karl Friedrich avec le tsar Alexandre Ier, et dans le fait que les orientations de la commission suivaient les « recommandations » russes et françaises. Karl Friedrich devient Électeur et, proportionnellement parlant, Bade reçoit les meilleures compensations pour ces pertes de territoires et de population.
Deux ans plus tard, Karl Friedrich est de nouveau honoré. Après avoir signé une alliance avec Napoléon en septembre 1805, promettant à l’empereur des Français 3 000 hommes, Karl Friedrich est payé de sa loyauté en voyant son margraviat élevé en grand-duché, et avec la signature d’une alliance perpétuelle avec la France, l’Italie et la Bavière – même si Karl Friedrich espérait devenir roi plutôt que grand-duc. Encouragé par Napoléon, Karl Friedrich médiatise (en d’autres termes, absorbe) de petits états, ecclésiastiques et ceux des chevaliers teutoniques, à la frontière du Bade.
Le 4 janvier 1806, avec la Bavière et le Wurtemberg, le Bade signe une alliance politique et militaire perpétuelle avec la France et rompt définitivement avec le Saint Empire romain germanique (bien que rien ne soit encore légaliser à ce moment).
La pièce finale de ce puzzle est apportée par le mariage en avril de la nièce de l’Impératrice Joséphine, Stéphanie de Beauharnais, avec le fils héritier de Karl Friedrich, Karl Ludwig Friedrich. Ce mariage doit permettre à Bade d’assurer Napoléon de sa loyauté. Et le 12 juillet de cette même année 1806, le grand-duché de Bade fait partie des premiers membres de la Confédération du Rhin. Si le traité accorde certains territoires à Bade (comme le comté de Bonndorf et la ville de Tüttlingen) et lui en retire d’autres (notamment la ville de Biberach), l’essentiel est la mise à disposition de Napoléon, de 8 000 hommes par Bade, pour toute guerre continentale dans laquelle la France s’engagerait.
C’est dans ce cadre que le grand-duché de Bade est sollicité alors la Prusse se mobilise contre la France durant l’été 1806. L’armée badoise sert aussi en Espagne et en Russie, supportant de lourdes pertes et de grandes souffrances, une situation qui fragilise le courant pro-français en Bade.
Comme la première décennie se termine, Karl Friedrich devient peu à peu sénile et les affaires politiques et administratives sont gérées par son ministre Sigismund Freiherr von Reitzenstein.
Karl Friedrich meurt en 1811, peu avant la chute de l’Empire napoléonien, et c’est son fils Karl Ludwig Friedrich qui lui succède.
Peter Hicks, trad. Irène Delage, juin 2006