CLARY Famille

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Les Clary de Marseille n’ont aucun lien de parenté avec les sires de Clary et, à plus forte raison, avec ce prince de Clary et Aldringen, de nationalité autrichienne, qui fit partie de la suite de Marie-Louise lors de son mariage avec Napoléon.

On trouve d'autres Clary en Dauphiné et en Albigeois, en Amérique ou en Russie. Ceux de Marseille venaient sans doute de Péone, petit village haut perché des Alpes-Maritimes, et n'avaient aucune prétention à la noblesse.

Le premier connu est Jacques Clary, fils d'Antoine Clary et de Marguerite Canolle, qui épousa le 24 novembre 1690, en la paroisse Saint-Martin de Marseille, Catherine Barosse, fille d'Angelin Barosse, jardinier, et de Jeanne Pelissière. Un fils de Jacques, Joseph Clary (22-V-1693-29-VIII-1748) épousa à Marseille le 21-II-1724 Françoise-Agnès Amaurric, fille d'un chapelier, qui lui apporta une dot de 15 000 livres, dont 1 500 en robes et meubles et 13 500 en louis d'or. De ce mariage, naquit à Marseille, paroisse Saint-Ferréol, le 24 février 1725, François Clary, << le père des deux reines>>.
Historiens, journalistes et cinéastes ont contribué à répondre à son sujet les légendes les plus absurdes, faisant de lui un marchand de soieries, de savon ou même de cacahouètes. En réalité, après des débuts fort modestes dans la boutique de son père, il devint armateur, assureur maritime, négociant en ce qu'on appelle aujourd'hui << import-export>>; ainsi, il envoyait aux <<échelles>> (escales) du Levant du blé, des tissus et en ramenait du café-moka, des épices et des matières colorantes. Par un travail acharné, il put doter chacune de ses filles de 50 000 livres et sa fortune fut évaluée à sa mort à un million de livres, mais c'était en 1794 et une partie de ses créances fut réglée en assignats dépréciés.
Selon une mode lancée par les Écossais et suivie par les protestants français et américains, il adhéra avec son gendre Anthoine à la franc-maçonnerie. Le diplôme F… M… servait alors d'introduction dans les ports étrangers; à la Révolution il constituait un brevet de civisme républicain et sur les vingt loges de Marseille, beaucoup se transformèrent en << clubs>>. Lorsque Joseph Bonaparte arriva à Marseille en septembre 1793, avec ses amis Saliceti et Chauvet, tous trois furent aussitôt initiés à la loge << Parfaite Sincérité>> dont faisait partie François Clary.
Ce dernier mourut de maladie pendant la Terreur le 20 janvier 1794; il est probable que s'il avait survécu, il n'aurait pas échappé à une guillotine qui coupa les têtes de la plupart des riches négociants marseillais dont les biens renflouaient les caisses de la République.
Il s'était marié une première fois, à vingt-six ans, le 13 avril 1751, avec Gabrielle Fléchon, âgée de dix-neuf ans, fille de Joseph Fléchon, négociant, et de Marie Guieu.
Épuisée par des maternités successives, Gabrielle mourut à Marseille le 3 mai 1758. Son mari ne pouvait s'occuper seul de l'éducation des trois enfants qu'elle lui laissait et après un an de veuvage, il épousait en secondes noces le 26 juin 1759, en la paroisse Saint-Ferréol, Françoise-Rose Somis (1737-1815), fille de Joseph-Ignace Somis, ingénieur en chef du port de Marseille, chevalier de Saint-Louis, mort tragiquement en 1750, et de Rose Soucheidron.
Par ce mariage, François Clary s'élevait dans l'échelle sociale. La dot de sa première femme était modeste (9 000 livres comptant, 2 000 en trousseau); celle de la seconde se montait à 30 000 livres dont 3 000 en trousseau, 8 500 en argent, 14 500 en une maison, 4 000 payables au décès de sa mère. La famille Somis, d'origine piémontaise, avait dans son ascendance un violoniste célèbre, Jean-Baptiste Somis (1676-1763) qui avait obtenu à Paris de véritables triomphes et dont la fille, cantatrice, avait épousé le peintre Carle Van Loo. Le frère de Rose, Victor (1745-1836), fit une longue carrière dans le corps du génie et la termina comme lieutenant-général, commandeur de la Légion d'Honneur et chevalier de Saint-Louis. C'était lui que le capitaine Buonaparte avait traité d'<< aristocrate avoué>> dans sa brochure du Souper de Beaucaire, rédigée le 29 juillet 1793.
En outre, par les Soucheiron, François Clary entrait dans le cercle des grands << négociants>> marseillais, les Samatan, Payan, Roux, Hugues, Seymandi, etc. Par son habileté commerciale, par sa rectitude en affaires, il acquit la confiance de ses confrères, devint échevin en 1764, membre de la Chambre de Commerce de (1764-1765, 1771-1776, 1780-1782), député du Commerce (1779-1783), marguillier de sa paroisse et fit enregistrer ses armoiries: << D'azur à trois épis d'or défaits, accompagnés d'un soleil d'or en chef et d'une lune d'argent en pointe>>. Ce blason rappelait la clarté d'où les Clary tiraient leur nom et le blé dont ils faisaient commerce.
De Gabrielle Fléchon il eut quatre enfants :
1. François Clary (31-1-1752-4-1-1753).

2. Jeanne Clary (24-IV-1754-2-V-1815), qui épousa d'abord en 1775 Honoré Le Jeans, puis en 1795, devenue veuve, Mathieu Pézenas, baron de Pluvinol, député du Vaucluse en 1815. Elle mourut sans postérité.

3. Catherine Clary (20-IX-1755-1-XI-1818) qui épousa en 1781 Guillaume Le Jeans (1738-1803), frère d'Honoré, d'où :
a) Honorine, mariée au général Mathieu de la Redorte, député, pair de France en 1819, ambassadeur (d'où la descendance Cornudet).
b) Louis (d'où la descendance Soultrait et Balincourt).
c) Virginie qui épousa en 1810 le comte Athanase Clément de Ris (1782-1837), pair de France en 1828.

4. Étienne Clary (8-VIII-1757 – Marseille, 25-III-1823) qui épousa le 3-X-1785 Marcelle Guey, fille de Joseph Guey, ancien échevin, et de Marguerite Fabre. Il fut emprisonné comme suspect du 17 septembre 1793 au 10 mars 1794 mais échappa à la guillotine grâce aux démarches de sa femme auprès d'Albitte.
Étienne Clary était un original, peu ordonné dans ses dépenses, gémissant constamment sur sa misère et ses attaques de goutte. Grâce à la protection de Joseph Bonaparte, il fut pendant cinq ans membre du Corps législatif; mais sa présence à Paris le desservait plutôt car il ne brillait guère par l'esprit et l'élégance. Brave homme, il repartit pour Marseille vivre en solitaire d'une pension que lui firent ses soeurs Julie et Désirée. Candidat au Sénat conservateur désigné par les collèges électoraux de l'Isère et des Alpes-Maritimes, il ne fut pas nommé. Membre du collège électoral des Bouches-du-Rhone, il brigua en vain le titre de baron. En octobre 1808, il hérita de son oncle Fléchon la << campagne>> de Montredon que ses héritiers vendirent en 1839 à Madame veuve Pastré.
Lorsque le roi de Suède Oscar II vint en visite à Marseille en 1892, la municipalité, faute de pouvoir lui montrer une habitation où Désirée Clary ait demeuré, car toutes avaient été détruites, apposa solennellement une plaque de marbre évoquant le souvenir du général Bonaparte et de son ancienne fiancée sur cette << bastide Clary>> où ni l'un ni l'autre n'avaient habité.

Quant à Mme Étienne Clary, elle s'était liée avec Mme Charles Bonaparte et l'accompagna à Rome avec le Cardinal Fesch en 1804 : c'est là qu'elle mourut le 19 septembre dans les bras de << Madame la mère>> comme l'écrivait Étienne.
Elle laissait six enfants :
a) Marius Clary (3-X-1786 – Paris, 27-1-1841). Engagé volontaire au 9e dragons à seize ans et demi, officier aide-de-camp, d'abord de son oncle Bernadotte, puis de son oncle Joseph Bonaparte, à Naples et en Espagne, colonel de hussards en 1813, maréchal de camp le 23 août 1814 et mis en non activité un an après, il commanda à nouveau une brigade de cavalerie en 1829 et fut créé comte par Charles X. Sous Louis-Philippe, il commanda successivement les départements du Nord, de la Somme, du Gers et du Morbihan, jusqu'à sa mort. Il était commandeur de la Légion d'Honneur, chevalier de Saint-Louis… et célibataire. Cavalier émérite et courageux, il avait été blessé de plusieurs coups de lance à Rausnitz en 1806. La position de ses deux oncles par alliance – Joseph Bonaparte et Bernadotte – lui avait valu tour à tour protection et suspicion.

b) Bienvenu Clary (8-II-1788 – Madrid, 8-VIII-181-1). Élève à l'École militaire de Fontainebleau à 17 ans après avoir été destiné à la diplomatie, il fut officier de chasseurs à cheval au royaume de Naples et suivit son oncle Joseph Bonaparte à Madrid où il mourut d'une chute de cheval à vingt-trois ans. Il avait été fait chevalier de la Légion d'Honneur le 1er mars 1807.
c) Marcelle Clary (13-I-1792 – Dammartin, 23-IV-1866). Elle épousa à Paris le 15-VI-1811 Jean-Henri comte Tascher de la Pagerie, cousin germain de l'impératrice Joséphine et général, ayant servi en Espagne sous le roi Joseph. Il décéda à 30 ans à Paris le 17-I-1816, laissant une fille unique Amable née deux mois auparavant et qui épousa en 1838 le baron de Montbrun, préfet du palais sous Napoléon III.

d) Fortuné Clary (20-IX-1793 – 31-V-1829) qui mourut célibataire sans laisser de traces.

e) Amable Clary (5-I-1796 – Paris, 8-I-1875). Elle épousa le 8-IX-1821 le général baron Lejeune (1775-1848), qui tout en faisant les guerres de la Révolution et de l'Empire prenait des croquis grâce auxquels il devint célèbre comme peintre de batailles.
Leur fils unique, Edgar baron Lejeune (1826-1827), fut écuyer de Napoléon III et diplomate.

f) Joachim Clary (1-II-1802 – Paris, 20-IX-1856). Entra à l'École militaire de Saint-Cyr à dix-sept ans, il fit la Campagne d'Espagne en 1823-1826, devint capitaine de carabiniers en 1830, puis conseiller général de Seine-et-Marne, sénateur en 1853. Ami du prince Louis-Napoléon, il lui donna asile en 1848 dans l'hôtel de sa tante Désirée, rue d'Anjou.
Il avait épousé à Florence le 14-X-1832 sa cousine germaine Juliette de Villeneuve. Elle avait trente ans, lui donna une fille, Marie, épouse du vicomte Berthier, neveu du maréchal et chambellan de Napoléon III; et un fils, Adolphe Clary (1837-1877), aide-de-camp du Prince impérial, marié à Angèle Marion, fille du général baron Marion et demoiselle d'honneur de l'impératrice Eugénie. A son tour, Adolphe eut un fils Joachim (1876-1918), sans alliance, et une fille, Louise, baronne de Beauverger.

Auteur : Jean-Marie-Félix Girod de l'Ain
Revue : Revue du Souvenir Napoléonien
Numéro : 290
Année : 1976
Mois : nov.

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