DAVID, Louis, (1748-1825), peintre

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Louis David vit le jour le 31 août 1748 à Paris dans une maison du quai de la Mégisserie (située sur l’emplacement de l’actuel théâtre du Chatelet) où ses parents exerçaient la profession de merciers.

Son père, Maurice, faisait en outre le commerce de fers utilisés pour la construction. Peu après la naissance de son fils, il acquit, sans doute pour s'élever dans la hiérarchie sociale, une charge de « commis aux aydes » dans la région de Pont-l'Evêque, fonction qui consistait à percevoir l'impôt pour le compte d'un fermier général. Malheureusement pour lui, cet homme qui passait pour avoir la tête chaude, fut tué au cours d'une dispute en 1757. Louis, qui se trouvait alors en pension dans une école de Picpus, fut recueilli par un oncle maternel qui le plaça d'abord chez un répétiteur, puis le fit admettre au Collège des Quatre Nations réputé pour la solidité de son enseignement.
Le jeune David ne manifesta que peu de goût pour les études classiques, passant une grande partie de son temps à couvrir de croquis ses livres et ses cahiers à la grande déception de sa mère qui songeait déjà à faire de lui un architecte, un médecin ou un avocat. À toutes ses instances, il opposa un refus énergique en déclarant que « seule la peinture pouvait avoir des charmes pour lui ». En désespoir de cause, son oncle se résigna à demander l'avis du Premier peintre du Roi, François Boucher, auquel il était apparenté. Ce dernier reconnut les bonnes dispositions du jeune homme, mais, invoquant son âge (il avait dépassé la soixantaine) le recommanda à son ami Joseph Vien, professeur à l'Académie de peinture.
Sous la direction de ce maître, David fit de rapides progrès si bien qu'après quelques années passées dans son atelier, il résolut de concourir pour le Grand Prix de Rome. Il se soumit cinq années de suite à cette épreuve avant de décrocher la couronne en 1774 avec une toile intitulée « Erasistrate découvrant la cause de la maladie d'Antiochus dans son amour pour Stratonice ». Il était temps : ses échecs successifs, en dépit d'un second prix obtenu en 1772, l'ayant profondément affecté et l'ayant même amené pendant un certain temps, à refuser toute nourriture.

Le voici donc à Rome dont les merveilles artistiques soulèvent son enthousiasme. En compagnie de Vien, récemment nommé directeur de l'École de Rome, il s'imprègne de la culture antique et rompant ainsi avec « les mièvreries et les fadeurs mises à la mode par ses prédécesseurs », rêve de devenir le promoteur d'un style nouveau, d'une grandeur simple et sévère, que l'on appellera le « néoclassicisme ».
A la fin de l'été 1780, David est de retour à Paris. Ses oeuvres, la « Peste de Saint-Roch », les « Funérailles de Tractole », « Belisaire aveugle » ; « Andromaque pleurant la mort d'Hector » témoignent de la nouvelle orientation de son art. Ses portraits, celui de son oncle Desmaisons, architecte du Roi, du comte de Clermont d'Amboise, Mme Pecoul et de son mari, entrepreneur des bâtiments royaux dont il épousera la fille le rendent célèbre et facilitent son élection à l'Académie royale de Peinture et de Sculpture. Les commandes affluent et malgré d'inévitables critiques, on le reconnaît unanimement comme un véritable chef d'école. Il s'attelle dès lors à la peinture de son « Serment des Horaces » commandée par le marquis de Marigny et pour lequel il retournera à Rome où il sait trouver une atmosphère plus favorable à son inspiration. Viendront ensuite la « Mort de Socrate », une « Vestale couronnée de fleurs », une « Pschyché abandonnée », les « Amours de Paris et d'Hélène », les « Licteurs rapportant à Brutus le corps de ses fils », ce dernier tableau exécuté à la demande de Louis XVI.

A la veille de la Révolution, David, académicien, protégé du Roi, favori de la Cour est donc un homme riche et comblé.

Il se présente sous les traits d'un beau gaillard, vigoureux, avec de beaux cheveux bouclés et un regard perçant. Il présente cependant une déformation de la joue gauche consécutive à un coup de fouet reçu alors qu'il était enfant. De l'avis de tous ses contemporains, il n'en conserve pas moins une allure distinguée et sait, quand il le veut, charmer son auditoire.
Depuis plusieurs années, David était affilié à la Franc-maçonnerie et fréquentait avec autant d'assiduité que d'ambition la loge d'Orléans, connue pour ses critiques acerbes envers la politique de la Cour. Aussi, et malgré son incontestable réussite sociale, s'enflamma-t-il dès les premières manifestations révolutionnaires condamnant sans ménagement les privilèges et les abus de l'Ancien Régime, dénonça la richesse et l'obscurantisme du clergé, exaltant les vertus civiques et célébra le patriotisme. Membre du Club des Jacobins depuis sa fondation, il n'hésita pas un instant à mettre son talent au service des idées nouvelles. C'est ainsi qu'il compose un tableau intitulé « Louis XVI entrant dans le lieu des séances de l'Assemblée Constituante » et que les représentants de la Nation lui commandent une toile de 30 pieds sur 20 (environ 10 mètres sur 7), le « Serment du Jeu de Paume ».

Plus encore : en maintes circonstances David va s'ingénier à afficher son zèle révolutionnaire, notamment en organisant en juillet 1791 le transfert des cendres de Voltaire au Panthéon et la fête donnée en avril 1792 en l'honneur des 40 soldats suisses du régiment de Chateauvieux ayant déserté leur unité pour se mettre au service du nouveau Régime. Il aspire cependant à jouer un rôle politique plus actif. Candidat malheureux en septembre 1791 à l'Assemblée Législative, il est élu député de Paris à la Convention le 16 septembre de l'année suivante par la section du Museum, c'est-à-dire par l'actuel quartier du Louvre où il avait sa résidence. Au lieu de siéger dans les rangs des Girondins auxquels il doit son élection, il préfère rejoindre ceux de la Montagne, en raison sans doute de son amitié pour Robespierre et Marat.
L'une de ses premières prises de position se situe peu après son entrée à la Convention, par son approbation aux Massacres de Septembre. Trois mois plus tard, le 13 janvier 1793, il voit la mort de Louis XVI, son ancien protecteur. La veille de l'exécution du souverain, un des députés régicides, Le Pelletier de Saint-Fargeau est poignardé par un des anciens Gardes du corps. Immédiatement David s'offre pour peindre « le portrait du premier député assassiné pour ses opinions républicaines ». En juillet 1793, la mort de Marat le plonge dans la consternation : pour honorer le mémoire de son ami disparu, il brosse une de ses toiles les plus réalistes, « Marat assassiné dans sa baignoire » et demande que la Convention accorde les honneurs du Panthéon à « cette victime du fanatisme ».

Son ardeur révolutionnaire l’entraîne vers les pires excès.

Nommé membre du « Comité de sûreté nationale » il prend part à l'interrogatoire du petit dauphin essayant de lui faire porter d'infâmes accusations contre sa mère qu'il désigne sous le nom de « veuve Capet » et contre sa tante, la soeur de Louis XVI, Madame Elisabeth. Il assiste au procès de la malheureuse reine et dessine d'elle un croquis saisissant lorsqu'il la voit passer devant lui dans la charrette qui la mène au supplice. Dans le même temps, il poursuit sa tâche d'organisateur des grandes manifestations républicaines, en particulier le 8 juin 1794 (20 prairial an II) pour la célébration du culte de l'Être Suprême et en décembre suivant à l'occasion de la reprise du port de Toulon livré par les royalistes aux troupes anglo-espagnoles.
En raison de la déformation de sa joue gauche qui entraîne une certaine difficulté d'élocution, David ne prend qu'assez rarement la parole à la tribune de Convention, même lorsqu'il en est président en janvier 1794. Ses interventions n'en sont pas moins décisives. C'est ainsi qu'il sera le principal artisan de la suppression de l'Académie de Peinture et de Sculpture dont il est pourtant un des membres les plus éminents et de la réforme de l'instruction publique.
La réaction thermidorienne et la chute de Robespierre mettent un terme à la carrière politique de David. Echappant de justesse à la répression aveugle qui s'ensuivit, il n'en est pas moins poursuivi devant le Tribunal révolutionnaire et interné au Luxembourg pendant plusieurs mois. Libéré en août 1795 après avoir solennellement renié son attitude passée, il retrouve sa place à la Convention où il continue à siéger jusqu'à la proclamation du Directoire.

Dès lors, il se consacre entièrement à son oeuvre et travaille à la composition d'un nouveau tableau, « L'enlèvement des Sabines » lorsqu'il fait la connaissance du général Bonaparte, vainqueur de la campagne d'Italie, dont il entreprend de faire un portrait qui ne sera jamais terminé. Après le coup d'Etat du 18 Brumaire David est un des rares hommes célèbres que le Premier Consul attire dans sa cour naissante. Au lendemain de la bataille de Marengo, alors qu'il a déjà entrepris de peindre « Leonidas aux Thermopiles », le général l'engage à interrompre cette peinture pour immortaliser sa récente victoire. À la suite de cet entretien, David exécute le fameux tableau représentant « Bonaparte franchissant le Saint-Bernard ».

Devenu empereur, Napoléon le nomme son Premier peintre

et lui commande quatre grandes toiles : « Le couronnement », la « Distribution des Aigles », « L'Intronisation de l'Empereur à Notre-Dame » et « L'entrée de l'Empereur à l'Hôtel-de-Ville ». Les deux premières seront réalisées et contribueront à illustrer l'épopée impériale tandis que seules des esquisses des deux autres sont parvenues jusqu'à nous. Par contre, il exécutera de nombreux portraits de personnalités de l'époque, notamment ceux du pape Pie VII et de plusieurs généraux, ministres ou ambassadeurs. Afin de lui témoigner son estime, Napoléon le fera en 1808 chevalier de l'Empire.

Pendant la Première Restauration, David retiré chez lui, cherchera à se faire oublier.

Il se rallie à Napoléon pendant les Cent-Jours et, au retour de Louis XVIII, tombe sous le coup de la loi condamnant à l'exil les anciens régicides. Il se réfugie alors à Bruxelles où il ouvre un atelier dans lequel il va recevoir : visite de tous les personnages importants et forme de nombreux élèves.
Il importe de rappeler que David n'en demeurera pas moins fidèle à la France, refusant de faire le portrait de Wellington, le vainqueur de Waterloo, d'occuper un poste officiel à la Cour du roi des Pays-Bas et surtout d'accepter l'hospitalité du roi de Prusse qui, à plusieurs reprises lui fera des offres alléchantes. David qui n'avait jamais cessé de travailler, meurt le 29 décembre 1825. Il avait demandé que sur sa tombe ne figurât que cette simple mention : Louis David, Premier peintre de l'Empereur Napoléon.

Auteur : Paul Ganière
Revue : Revue du Souvenir Napoléonien
Numéro : 352
Mois : 04
Année : 1987
Pages : 27-28

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