DENON, Dominique-Vivant, baron (1747-1825), directeur du louvre

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DENON, Dominique-Vivant, baron (1747-1825), directeur du louvre
Le Baron Vivant Denon, Pierre Paul Prud'hon © Grand Palais - RMN (musée du Louvre) - Gérard Blot

Denon, Dominique Vivant, né à Givry, près de Châlons s/Saône, le 4 janvier 1747, d’une famille de petite noblesse, alla à l’âge de dix-huit ans terminer son éducation à Paris.

Outre le droit qu’il étudia parce que ses parents le destinaient à la magistrature, il travailla le dessin et la gravure et trouva le temps d’écrire une comédie en trois actes et en prose, « Julie et le Bon Père« , (1769) oeuvre médiocre qui ne fut jamais jouée et à laquelle se borna sa carrière d’auteur dramatique.

On ne sait comment il s’introduisit à la Cour, mais en 1769, il fut chargé de la conservation des pierres gravées collectionnées par la marquise de Pompadour, puis devint gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi, ce qui l’amena à connaître Versailles dont il prit le bon ton. On ignore de même la route qui lui ouvrit la carrière diplomatique. Sa première mission le mena en 1772, à Saint-Pétersbourg, où il passa deux années. La seconde le conduisit à Stockholm où, pendant quelques mois, il fut le secrétaire de l’ambassadeur Vergennes, lequel restera son protecteur quand il deviendra ministre des Affaires étrangères. Une troisième mission, en Suisse, le fit passer en 1775 par Ferney où il fut reçu par Voltaire, dessina son portrait (qu’il grava par la suite) et mérita son amitié.

En 1777, il publia un conte galant bien dans le goût du temps, Point de lendemain, oeuvrette charmante, souvent rééditée, cependant que sa carrière se poursuivait à Naples où il avait été nommé, en 1776, attaché d’ambassade. Promu chargé d’affaires en 1782, il resta dans ce royaume jusqu’en 1785, tout en effectuant plusieurs voyages en Italie méridionale, à Rome, en Sicile et à Malte. Il observait les oeuvres d’art, apprenait à bien les connaître, pratiquait le dessin et la gravure et s’y perfectionnait. Sa carrière diplomatique ayant pris fin à la demande de la reine des Deux-Siciles, il revint à Versailles en septembre 1785. Sa pension de diplomate s’ajoutant à la fortune héritée de son père, assurait son indépendance et lui permit de se consacrer entièrement aux beaux-arts.
Il entra à l’Académie en 1787 en qualité de graveur et, l’année suivante, se rendit en Italie du Nord, où Venise et Florence le retinrent pendant cinq ans. Mais la Révolution lui ayant fait perdre ses revenus français, ainsi que la crainte d’être mis sur la liste des émigrés, l’incitèrent à rentrer en France. C’est en pleine Terreur, le 10 décembre 1793, qu’il arriva à Paris.

L’amitié et l’aide du peintre David, qu’il avait connu à Naples et qui était devenu un farouche sans-culotte, lui facilitèrent et peut-être lui sauvèrent la vie dans ces temps difficiles. Il subsistait grâce à son burin et devint graveur national. Le 9 thermidor changea tout cela et le rendit à la vie mondaine.
Il semble avoir connu le général Bonaparte par l’intermédiaire de son épouse dont il fréquentait le salon. De toute façon, ayant été agréé, il s’embarque à Toulon en 1798 pour participer à l’expédition d’Egypte. Il devient membre de l’Institut fondé au Caire, dessine beaucoup de ruines, et accompagne Desaix en Haute-Egypte, jusqu’aux cataractes du Nil. Sa santé de fer, sa bonne humeur et son courage impressionnent si favorablement le général Bonaparte que Denon sera un des rares membres de l’expédition qu’il ramènera en France en 1799.

Le coup d’Etat du 18 brumaire qui porte Bonaparte au pouvoir va indirectement bénéficier à Denon.

Il commence par composer un ouvrage monumental, enrichi des nombreux dessins qu’il a ramenés d’Egypte et qui fera découvrir cette civilisation antique aux Français, quand il paraîtra en 1802 sous le titre : Voyage dans la Basse et Haute-Egypte.
Le 24 novembre de la même année, Denon est nommé Directeur du Musée central des Arts, nouvellement réorganisé. Peu après, le 28 janvier 1803, il entre à l’Institut dans la classe des Beaux-Arts, section de la peinture. Le voici à la tête d’un domaine très important qui comprend les musées du Louvre (bientôt nommé Musée Napoléon), de Versailles, des Monuments français ; les galeries des Palais du Gouvernement, la Monnaie des Médailles, la Gravure et la Chalcographie, l’acquisition et le transport des oeuvres d’art ; les manufactures de Sèvres, des Gobelins et de la Savonnerie. C’est presque l’ensemble des beaux-arts, il n’y manque que l’architecture !

Mais Denon, avant tout, est et restera jusqu’à la fin de l’Empire, le conseiller très écouté de Napoléon en ce domaine; et l’exécuteur de ses idées, car l’Empereur en a beaucoup, souvent excellentes, parfois moins bonnes. Il distribue aux artistes les commandes décidées par l’Empereur, recommande l’achat de certaines oeuvres exposées au Salon (lequel a lieu tous les deux ans) accompagne l’Empereur dans ses campagnes pour y reconnaître les oeuvres d’art qui seront les trophées de ses victoires et enrichiront le Musée Napoléon, le musée le plus riche et le mieux organisé que le monde connaîtra jamais. Le 5 août 1812, Denon est récompensé par le titre de baron.
La chute de l’Empire et la Première Restauration n’affectent pas la situation du Directeur du Musée, redevenu celui du Louvre. Il n’en sera pas de même après les Cent-Jours, car les Coalisés, vainqueurs à Waterloo, exigeront la restitution des oeuvres d’art conquises par la France: déchirantes négociations que Denon mènera à bonne fin et qui seront les dernières de sa carrière. En octobre 1815, il adressera au roi Louis XVIII une démission devenue inéluctable.

Les dernières années de sa vie s’écouleront paisiblement dans l’aisance matérielle, parmi ses collections d’oeuvres d’art, de sculptures et de tableaux, véritable musée privé d’une très grande richesse. Il assiste aux séances de l’Institut, se montre assidu aux expositions et jouit de nombreuses amitiés. Vie calme mais quand même active qui s’achèvera brusquement le 28 avril 1825, à la suite d’un refroidissement. Ses collections seront dispersées en 1826 et l’ouvrage descriptif qu’il leur avait consacré paraîtra en 1829.

C’était un petit homme très laid, chafouin de visage, avec un menton en galoche et le front dégarni, débordant de vitalité, pétillant d’esprit. Son immense culture, le charme de sa conversation et ses manières affables, faisaient de lui un convive recherché et l’ornement des salons. Napoléon, qui avait découvert en Egypte son exceptionnel courage physique et moral, ainsi que sa grande puissance de travail, se reposait sur son jugement artistique. Le baron Denon sut aussi se faire aimer des artistes de son temps qu’il aida de maintes façons, tout en se montrant très exigeant sur la qualité de leurs travaux.

Auteur : Charles-Otto Zieseniss
Revue : Revue du Souvenir Napoléonien
Numéro : 357
Mois : 02
Année : 1988
Pages : 27

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