DESAUGIERS, Marc, (1772-1827), auteur de théâtre

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Il faudrait en réalité parler de la famille Desaugiers, qui comprend le père, Marc-Antoine, (1742-1793) et ses trois fils: Auguste-Félix (1770-1836), Marc-Antoine-Madeleine, le plus célèbre (1772-1823) et Jules-Joseph (1775-1845).

Le père fut un habile compositeur autodidacte, originaire de Fréjus, qui vint à Paris en 1774 et s'y lia d'amitié avec Glück. On lui doit la musique d'opéras et d'opéras-comiques, dont les paroles étaient fournies par des auteurs, comme Quinault et Sedaine ou par son fils Marc-Antoine-Madeleine, et qui, de 1779 à 1791, firent les délices de la capitale. Adepte enthousiaste de la Révolution, il composa un hiérodrame sur la prise de la Bastille, qui fut exécuté à Notre-Dame de Paris, la veille de la fête de la Fédération, donc le 13 juillet 1790, puis à l'Opéra le 25 décembre suivant. Sa musique simple variée et chantante lui valurent de grands succès.

Son fils aîné, Auguste-Félix fut diplomate sous le Directoire, le Consulat et l'Empire ; il resta notamment pendant vingt ans en poste à Copenhague. Il prit sa retraite en 1815 et se mit à composer ses opéras, alors que, précédemment, il n'avait écrit que des tragédies jamais représentées et ses pièces de circonstance comme, en 1798, un ode pour la descente projetée en Angleterre, en 1802 une cantate sur la paix et, en 1809, un chant héroïque à la gloire des armées françaises luttant contre la troisième coalition. Ses opéras furent joués de 1816 à 1819, puis ce fut une tragédie lyrique en 1825. Il écrivit aussi ses cantates pour les fêtes de Louis XVIII et Charles X.

Le plus jeune des trois frères, Jules-Joseph, fut essentiellement diplomate mais, en 1842, il publia une traduction de l'art poëtique d'Horace.

Le second fils, Marc-Antoine-Madeleine, est le plus connu. Il vit le jour à Fréjus le 17 novembre 1772,

vint tout enfant à Paris où il fit ses études au collège Mazarin, puis entra au séminaire Saint-Lazare, où il ne resta d'ailleurs que quelques courtes semaines. Il écrivit alors les paroles de certaines oeuvres musicales de son père, notamment « Bélisaire » et « le Médecin malgré lui« , d'après Molière. Il publia des pièces de vers dans « l'Almanach des Muses ». Monarchiste fervent – il le restera toute sa vie – il émigra à Saint-Domingue, où sa soeur avait épousé un riche planteur, bientôt ruiné par la révolte des Noirs, il passa alors aux Etats-Unis où, pour vivre, il donna des leçons de musique à Philadelphie, puis rentra en France en 1797. Il fut alors successivement musicien, chef d'orchestre, acteur et enfin auteur de comédies et de vaudevilles. Il fut Président du « Caveau moderne » avant de devenir directeur du Théâtre du Vaudeville de 1815 à 1822 puis de 1825 jusqu'à sa mort survenue prématurément à Paris, le 9 août 1827, des suites de l'opération de la pierre.

Ce fut un auteur plein de verve, d'esprit et de gaieté, exempt de toute vulgarité bien qu'il composât nombre de couplets satiriques, grivois, bachiques ou gastronomiques, qui lui valurent, outre la fidélité du public, maints cadeaux, places et décorations. La protection de Louis XVIII et, à un moindre degré, de Charles X lui vint de ce qu'il s'était aliéné la sympathie de Napoléon par de nombreuses maladresses, mais aussi de ce qu'il composa un à-propos, « le Retour des lys » joués au théâtre des Variétés à la fin de 1814 – ce qui l'obligea à fuir la France au retour de l'Aigle – puis une Histoire des Cent-Jours sous forme d'un Vaudeville intitulé, « le terme d'un règne ou le règne du terme« .

Ses chansons et poésies diverses furent publiées en trois volumes de 1808 à 1816 et rééditées plusieurs fois. Ses pièces les plus célèbres s'échelonnent de 1802 à 1822. Parmi elles on droit citer : « le Cadet Buteux« , « la Chatte merveilleuse« , « les deux boxeurs ou les Anglais de Falaise et Nanterre« , « Arlequin musard« , « les trois étages ou l'intrigue dans l'escalier« , « le mariage de Dumollet« , « Monsieur Sans-Gène« , « un Dîner par Victoire« , « la Matrimonio manie« , « Monsieur Vautour« , « Milord Go ou le dix-huit brumaire« , « les nouvelles de Pantin ou le retour inattendu« , « Pierrot ou le diamant perdu« , « l'entresol« , « C'est ma femme« , « le quartier d'hiver ou les métamorphoses« , « Le mari intrigué« , « le valet d'emprunt« , « Ils sont chez eux ou les époux avant le mariage« , « l'Heureuse gageure« , « Bayard à la Ferté« , « l'appartement à deux maîtres« , « Cadet-Roussel esturgeon », « le dîner de Madelon« , « l'hôtel garni ou la leçon singulière« , « l'honnête cosaque« , « les deux voisines« , « les petites Danaïdes », « l'homme aux précautions« , « Paris à cinq heures du matin« , etc., qui ont été parfois composées en collaboration avec d'autres auteurs, comme Gentil.

En définitive, celui qui fut aussi connu en son temps sous le pseudonyme d'Antoine Augier, fut un grand amuseur des Parisiens du premier quart du dix-neuvième siècle. Il les charma par son talent de chansonnier, qui valut en 1864 à la rue des Bons-Enfants, à Auteuil, de prendre le nom de Desaugiers.

Auteur : Colonel Henri Ramé
Revue : Revue du Souvenir Napoléonien
Numéro : 357
Mois : 02
Année : 1988
Pages : 29-30

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