FOULD, Achille Marcus (1800-1867), ministre des Finances

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Achille Fould fut ministre des Finances sous la seconde République et le Second Empire.

Origines familiales

La Famille des Fould, illustrée notamment par Achille Marcus Fould (1800-1867), est intégrée à la communauté juive de Metz depuis la seconde moitié du XVIIe siècle. Né à Boulay en 1767 , Berr Lion Fould entre dans l'entourage du plus grand négociant et homme d'affaires juif de l'est de la France. Cerf Berr, à Nancy et en devient le représentant, puis le fondé de pouvoir à Paris e 1787. C'est lui qui établi dans la banque à la faveur des événements révolutionnaires, se trouve à l'origine de la fortune financière des Fould. Celle-ci, malgré certaines difficultés, est définitivement acquise à l'époque de la Restauration, et l'hôtel Fould, rue Bergère, devient l'un des pôles de la vie parisienne sous la Monarchie de Juillet.

Le fils aîné de Berr Lion, Benedict Fould-Oppenheim (1792-1858), étant normalement chargé par son père de lui succéder à la tête des affaires de la banque, le cadet, Achille Marcus peut se tourner plus activement vers une vie plus mondaine, mais aussi vers la politique.

Une carrière remarquable

Intime des princes d'Orléans, grand amateur de chevaux et l'un des fondateurs du jockey-Club, il entre dans la vie publique comme conseiller général de Tarbes (1839). Elu député des Hautes-Pyrénées en 1842, il tend à se présenter progressivement comme un spécialiste des questions relatives aux finances publiques et aux impôts – certains considèrent qu'il vise déjà le portefeuille des finances.

Les événements de février 1848 prennent Fould par surprise. Très proche de la famille royale, il se place d'autant plus volontiers en retrait qu'il lui faut éviter toute répercussion de la crise économique qui sévit alors sur les affaires de la banque familiale. Au cours du printemps 1848, Achille Fould fait cependant paraître deux brochures sur les questions financières, et, après un échec aux législatives du 4 juin, il rentre à la Chambre comme député de la seine le 13 septembre 1848 – en seconde position derrière Louis-Napoléon Bonaparte. Familier de Thiers, ayant conservé en outre des liens avec nombre de ses anciens amis orléanistes, Achille Fould semble pourtant au cours de l'année 1849, se rapprocher peu à peu  du Prince-Président : ile entre avec le portefeuille des Finances dans le ministère du 31 octobre », et est alors très généralement regardé comme l'un des principaux personnages du parti de l'Elysée ».

Achille Fould s'emploie avant tout à ramener la confiance, en rétablissant une administration budgétaire stable et en essayant de réduire la dette flottante. Sa politique est appuyée notamment par la banque Fould et Fould-Oppenheim, que dirige toujours son frère Bénédict (Benoît). Devenu familier de Louis-Napoléon, Fould participe très directement, avec le comte Daru, à la préparation du coup d'Etat, mais il se tient à l'écart lors de l'exécution. Dès le 3 décembre 1851, il retrouve le portefeuille des Finances, avant d'être fait commandeur de la Légion d'honneur (le 11 décembre) et de prendre rang parmi les premiers sénateurs (26 janvier 1852). C'est le Conseil des Hautes-Pyrénées, qu'il préside, qui est le premier à émettre le voeu « que le Sénat propose au peuple français de rétablir l'hérédité de la dignité impériale dans la descendance directe, légitime et adoptive, du prince Louis-Napoléon Bonaparte, président de la République ».
 
Enfin, en tant que Ministre  d'Etat, c'est Fould qui est pratiquement chargé de porter le nouveau régime sur les fonts baptismaux. Son portefeuille de ministre d'Etat, puis de ministre d'Etat et de la Maison de l'Empereur, fait alors d'Achille Fould le second personnage du pays après l'Empereur. En charge de l'administration  générale des revenus de la Couronne, des institutions à caractère « culturel » (théâtres, musées, bibliothèques, archives, aménagements du Louvre…), mais aussi de la Légion d'honneur, de l'Institut etc., il est devenu l'intermédiaire obligé entre les ministres ou les assemblées, et le souverain. Son influence auprès de Napoléon III et son rang de ministre d'Etat lui permettent d'intervenir dans tous les domaines de la politique du Second Empire, et en particulier dans celui de l'économie et des finances. Les années 1852-1857 sont celles de l'euphorie et de la « fête impériale », c'est le temps des grands travaux d'équipement et d'urbanisme et des plus audacieuses combinaisons financières : selon les théories saint-simoniennes, les « dépenses productives » amèneront la création de richesses, et la croissance financera la croissance. Avec le nouveau Crédit mobilier, que préside Benoit Fould-Oppenheim, la « maison Fould » est, pour un temps, devenue  l'un des pivots de cette politique.
Le triomphe atteint en 1859 : alors que Napoléon III est à la tête de l'armée d'Italie, Achille Fould, en tant que secrétaire du Conseil privé, que préside l'impératrice, est en charge de diriger le gouvernement. Et, après la conclusion des préliminaires de Villafranca avec l'Autriche, le couple impérial vient passer quelques semaines dans les  Hautes-Pyrénées, séjournant  à plusieurs reprises à la « Villa Fould » à Tarbes.
 
Pourtant, la conjoncture est alors devenue différente, et la politique financière très orthodoxe d'Achille Fould se heurte à des oppositions de plus en plus importantes, jusque dans l'entourage le plus proche de l'Empereur. La relance des années 1850 tend à s'essouffler et la bourse devient plus hésitante, tandis que se produisent de retentissantes faillites et que l'équilibre financier se trouve menacé par la charge croissante du budget de l'armée. Le régime est à la recherche d'un second souffle et la pression politique est entretenue par les inquiétudes nées des résultats des législatives de 1857 et de l'attentat d'Orsini (1858). Le 5 janvier 1860, Napoléon III, par une lettre au ministre d'Etat publiée dans le Moniteur du 15, lance le « programme de la paix », d'inspiration saint-simonienne. Opposé à la dérive budgétaire qu'il prévoit, Fould, pourtant favorable au libre-échange, quitte le ministère où il est remplacé par Walewski (novembre 1860). Il se retire alors ostensiblement à Tarbes.
 

C'est de Tarbes que l'ancien ministre d'Etat orchestre une campagne active à l'encontre d'une politique économique dont les risques inquiètent les milieux financiers et le Corps législatif : aux yeux d'une majorité croissante, Fould apparait comme « le nouveau Necker », seul en mesure de ramener la confiance en rétablissant les principaux équilibres. Son mémoire à l'Empereur Sur l'état des finances (29 septembre 1861) est le signe de son retour aux affaires : Napoléon III fait publier dans le Moniteur, sa propre réponse, par laquelle il approuve le programme de Fould (13 novembre 1861) et dans une certaine mesure, la liquidation de l'Empire autoritaire. De retour aux finances, Achille Fould conduit pendant six ans une politique budgétaire stricte, qui assure au régime l'appui des milieux financiers, appui que le ministre rend éclatant en organisant la réception de Napoléon III à ferrières, chez le baron de Rothschild (18 décembre 1862). Le succès de Fould est réel – et reconnu des milieux politiques et financiers -, les budgets sont très régulièrement présentés en équilibre (au moins théorique), et le régime bénéficie d'un véritable « plébiscite financier ».

Mais les conditions de la politique générale se font progressivement plus pressantes et le rapport des forces en Europe  est remis en cause par les succès de Bismarck et de la Prusse. En France même l'opposition n'a pas désarmé et Napoléon III semble hésiter sur les orientations à adopter pour restaurer la confiance. A l'automne 1866, il se heurte à Fould, celui-ci toujours opposé à tout accroissement des dépenses publiques alors que l'Empereur souhaitait renforcer le budget de l'armée. Et lorsque, le 17 janvier 1867, Napoléon III communique son programme de réformes au ministère, dont il demande la démission, Achille Fould, sans doute déjà fatigué, ne semble pas regretter d'abandonner les affaires. Après avoir passé une partie  de l'année 1867 en voyage entre Paris, Deauville et la Côte d'Azur, il se retire dans sa villa de Tarbes, où il décède brutalement , le 5 octobre 1867. Ses obsèques, à Paris, le 14 octobre, sont l'occasion d'une grandiose cérémonie. Le service funèbre a lieu au temple de l'oratoire, Fould d'étant converti au protestantisme sans doute une dizaine d'années auparavant.
 
 
 

Cette biographie est un extrait de la notice « Famille Fould » de Frédéric Barbier, in Dictionnaire du Second Empire, Paris Fayard, 1995. Elle est reproduite ici avec l'aimable autorisation des éditions Fayard.

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