François-Joseph Gossé, dit Gossec est né à Vergnies dans le Hainaut belge, alors en territoire français, le 17 janvier 1734.
Fils de paysan, il apprend la musique avec son curé, puis à la maîtrise de la cathédrale d'Anvers, où il étudie le clavecin, l'harmonie et la composition.
En 1751, à 17 ans, il vient à Paris, où André Blavier, maître de chapelle à Anvers, l'a recommandé au compositeur Jean-Philippe Rameau (1683-1764). Celui-ci le fait admettre dans l'orchestre du fermier général Le Riche de la Pouplinière, un généreux mécène (1).
En 1754, Gossec prend la direction de cet orchestre. À la mort du fermier général (1762), il passe au service du prince de Conti, puis du prince de Condé, à Chantilly.
Ses fonctions l'amènent à s'intéresser plus particulièrement à la composition instrumentale avec une soixantaine de symphonies et de symphonies concertantes qui font de lui le » père de la symphonie française » (Marie-Claire Lemoigne-Mussat).
Il compose aussi des sonates pour violon, six quatuors avec flûte, six quatuors pour cordes, de la musique religieuse (Messe des morts, 1760, pour 200 exécutants), enfin de la musique pour la Comédie italienne (Le Faux Lord, 1764 ; Le Tonnelier, 1765 ; Toinon et Toinette, 1767 ; La fête du village, 1778 ; Thésée, 1782…).
En 1769, il fonde et dirige le Concert des amateurs jusqu'en 1773. Il le quitte pour prendre la direction du Concert spirituel (1773-1777), avec Gaviniès (1728-1800) et Leduc-aîné (1748-1777), où il fait connaître les compositeurs allemands, notamment Joseph Haydn (1732-1809). Il approfondit son écriture, agrandit l'orchestre au niveau des vents et, avant Berlioz, multiplie les recherches d'effets sonores.
Il est nommé maître de musique (1775), puis sous-directeur (1780), et directeur(1782) de l'Académie royale de musique (Opéra) et directeur de l'École royale de chant et de déclamation (1784) fondée par le baron de Breteuil.
Gossec est franc-maçon, comme Cherubini et Méhul. Membre de la Loge » La Réunion des Arts » à l'Orient de Paris (2), il participe activement à la vie musicale révolutionnaire.
En 1789, il crée avec Sarrette (1765-1858) le corps de musique (militaire) de la garde nationale, qui deviendra l'École de musique de la garde, puis l'Institut national de musique (1793) et, enfin, le Conservatoire national de musique (août 1795, sur le rapport de Marie-Joseph Chénier) (2). Dès la création du Conservatoire, cinq inspecteurs des études sont nommés : Gossec, Méhul, Grétry, Lesueur et Cherubini. Gossec en deviendra le président.
Sous la Révolution, il est le compositeur officiel des fêtes patriotiques (35 pièces lui sont attribuées).En particulier, il compose un Te Deum pour la Fête de la Fédération le 14 juillet 1790, une Marche lugubre jouée pour le transfert au Panthéon des cendres de Voltaire en 1791 et pour les obsèques de Hoche (1797), le Chant du 14 juillet, des hymnes à la Liberté, à l'Égalité, à la Nature, à l'Humanité, à l'Être suprême, des chants pour la Patrie, la Victoire ou la Vertu, des cantates funèbres. On lui doit la version définitive de La Marseillaise (1793).
Assez justement, on a parfois résumé la Révolution comme un grand drame lyrique, paroles de Marie-Joseph Chénier, musique de Gossec, décors de David.
Toutefois, il faut retenir sa Symphonie concertante pour onze instruments à vent (concert Feydau, 1793). Membre de l'Institut à sa création en 1795 (Académie des Beaux-Arts, section de la Musique), il est fait chevalier de la Légion d'honneur lors de la création de l'Ordre (1804).
Professeur d’harmonie et de composition au Conservatoire (1802-1814), il a publié les "Principes élémentaires de musique" (1800), des solfèges et une "Méthode de chant" (1803).
En principe, dans les concerts privés donnés aux Tuileries à la demande de Napoléon, on joue essentiellement de la musique vocale ; cependant, on trouve la trace, en 1806, de l'exécution de la Symphonie en ut de Gossec, preuve de l'estime de l'Empereur pour le compositeur.
En 1809, au moment où l'on découvre à Paris, les symphonies de Beethoven (il a composé la 6e, La Pastorale, en 1808) (4), Gossec renoue avec ce genre et, à 75 ans, écrit sa Symphonie en fa, à dix-sept parties. En 1813, c'est son ultime composition : la Dernière messe des vivants.
Après l'Empire, il se retire dans sa propriété à Passy (Paris 16e), il en sort seulement pour les séances de l'Institut et meurt le16février 1829, à quatre-vingt-quinze ans. Il est inhumé au cimetière de l'Est, dit du Père Lachaise, 13e division (Répertoire mondial des souvenirs napoléoniens, p. 297).
En France, on estime que Gossec a été le fondateur de la symphonie, en introduisant dans la masse orchestrale de nombreux instruments à vent mis à la mode pendant la Révolution pour leurs timbres martiaux.
Comme l'écrit Mme Marie-Claire Lemoigne-Mussat :
» Par sa production symphonique, son rôle dans l'élargissement de l'orchestre et la constitution d'ensembles d'instruments à vent, son goût pour les effets de spatialisation du son, Gossec a exercé une grand influence sur le développement de la musique instrumentale en France. Beethoven l'a admiré. Berlioz sera son héritier ».
Ces références n'empêchent pas que l'oeuvre de Gossec est aujourd'hui bien oubliée (5).
Auteur : Marc Allégret
Revue : Revue du Souvenir Napoléonien
Numéro : 414
Mois : Août-Sept
Année : 1997
Page : 39
Notes
(1) Rappelons que par la suite le fermier général recevra, dans sa maison de Passy, Mme de Saint-Aubin et sa fille Félicité, future comtesse de Genlis.
(2) Voir Michel Gaudart de Soulages, Hubert Lamant, Dictionnaire des Francs-Maçons français, J.Cl. Lattès, 1995, p. 438.
(3) Voir Napoléon, éd. Rencontre, t.5, p. 61
(4) Voir la notice sur Beethoven (1770-1827), par Mme Marie-Claire Lemoigne-Mussat : Dictionnaire Napoléon, p. 181. Le compositeur, favorable à la Révolution, voulait dédier sa 3e Symphonie, L'Héroïque (1804) à Bonaparte, Premier Consul. Après l'instauration de l'Empire, il se ravise et adopte le titre suivant : Grande symphonie, eroïka, pour célébrer la mémoire d'un grand homme. En 1809, il écrit son 5e Concerto pour piano, à la gloire des combattants de Wagram. Lors de son exécution à Vienne, un officier français, bouleversé, se leva et s'écria : L'Empereur, d'où le nom donné à ce concerto.
(5) Sources : Roman d'Amat, Dictionnaire de biographie française, t.16, p. 648 ; Michaud, Biographie universelle, t.17 (1857) p.202 ; Dictionnaire de la Révolution, p. 854 ; Dictionnaire Napoléon, p. 811, notice Marie-Claire Lemoigne-Mussat.