Le jeune ingénieur-géographe Edme François Jomard, élève de la première promotion de l'École polytechnique, participe à l'expédition d'Égypte, près de ses maîtres Monge et Berthollet. Membre de la Commission des Sciences et des Arts, puis de l'Institut d'Égypte, il relève notamment les cartes de l'oasis du Fayoum et de la Haute Egypte ; il établit la topographie de la ville du Caire. Il est l'un des derniers ‘‘savants'' à revenir en France et est nommé membre de la Commission chargée de publier les travaux de l'expédition, La Description de l'Égypte. Dès 1807, il en devient le président et consacre vingt-cinq ans de sa vie à ce travail considérable, dont on imagine difficilement les difficultés et les embûches : rassemblement des textes de 43 auteurs, exécution des planches, uniformisation des mesures, translittération des mots arabes, création de machines spéciales pour l'impression, etc. En 1818, il est élu à l'Académie des inscriptions et belles-lettres.
Cette tâche achevée en 1830, il est nommé conservateur du département de la Géographie et des Cartes de la Bibliothèque royale, puis nationale, puis impériale (sous quinze ministres de l'Intérieur successifs jusqu'à sa mort en 1862). Mais il aura bien d'autres activités. Constatant que Napoléon avait négligé l'enseignement primaire, il introduit en France l'apprentissage de la lecture par la ‘‘méthode mutuelle'' ; surfant sur le courant de l'égyptomanie, il se consacre au développement de l'égyptologie dont il fait une véritable science. Jomard prend en charge les jeunes gens que Méhemet-Ali envoie étudier en France pour devenir les cadres de l'Égypte future. Géographe et ethnographe, il est l'un des fondateurs de la toujours active Société de Géographie. Il déborde de centres d'intérêt et d'énergie au point que, dès qu'il adhère à une société, il en devient vite le secrétaire et, au bout de cinq ou sept ans, le président.
En 1828, il achète à Palaiseau, à 20 km au sud de Paris, une maison de campagne avec un parc de deux hectares, le Manoir de Lozère, où il passe deux jours par semaine. Membre actif de la Société d'Acclimatation, il y cultive sous serre des plantes et des légumes du monde entier. Quel serait son étonnement s'il apprenait qu'en 1976 sa chère École polytechnique a quitté Paris et s'est implantée sur le plateau de Palaiseau, à un kilomètre de son Manoir !
A 85 ans, il a encore la joie de voir se réaliser un rêve de sa jeunesse : Lesseps lance le percement de l'isthme de Suez et Jomard est élu président honoraire de la Compagnie universelle du canal de Suez.
Il décède le 23 septembre 1862, et est enterré au cimetière du Père Lachaise, 49e division.
Auteur : Jacques Macé
Notice parue dans la Revue du Souvenir napoléonien, n° 493.