La Campagne de Pologne, nov. 1806-février 1807 : les évènements conduisant à la bataille d’Eylau

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1806

Fin novembre ont lieu les prémices de la Campagne de Pologne :

30 juin et 24 juillet
La Prusse, réalisant qu’elle est complètement isolée, se tourne vers la Russie et signe des accords préliminaires renouant avec l’alliance défensive de 1800. Le 23 juin, Frédéric Guillaume avait envoyé au Tsar une lettre dans laquelle il appelait Napoléon « l’ennemi ».

16 octobre
Le lendemain de la double défaite, Iéna / Auerstedt, Frédéric Guillaume écrit à Napoléon pour lui demander un armistice. Napoléon refuse, craignant l’arrivée des renforts russes.

22 octobre
Napoléon reprend contact avec l’envoyé de Frédéric Guillaume, Lucchesini. Mais voyant ses proposition refusées, Napoléon décide d’occuper la Prusse et ses forteresses, pour forcer le roi de Prusse à négocier.

Novembre
La Russie annexe la Moldavie et la Valachie afin de préserver l’influence russe à Constantinople, faire rentrer le Sultan dans les rangs et, enfin, tenter de faire basculer les chrétiens des Balkans (et notamment les Serbes) du côté des Russes. Mais cette annexion ne sert qu’à rapprocher la France et la Turquie.

7 novembre
Blücher capitule à Lubeck et le lendemain, la place de Magdebourg se rend devant le corps du maréchal Ney.

10 novembre
Mortier occupe Le Hanovre.

16 novembre
Le traité de Charlottenburg est signé par les plénipotentiaires prussiens, mais il ne va pas être ratifié par le roi Frédéric Guillaume. Les conseillers de ce dernier l’ont mis en garde sur le fait que la signature d’un tel traité provoquerait une guerre avec la Russie, et que, si les troupes russes étaient expulsées de la Prusse orientale, il y aurait des révoltes dans les territoires polonais de la Prusse. Fort de la présence de l’armée russe à ses côtés, le roi de Prusse transige, préférant continuer la lutte.
Le 32e Bulletin de la Grande Armée annonce la fin de la campagne de Prusse.

21 novembre
Napoléon décrète depuis Berlin le blocus continental à l’encontre de l’Angleterre.

25 novembre
Napoléon quitte Berlin pour rejoindre la Grande Armée en Pologne.

27 novembre
Napoléon arrive à Posen (à mi-chemin entre Berlin et Varsovie). La ville est décorée d’arcs de triomphe et de nombreuses illuminations et on peut lire sur des panneaux : « Au restaurateur de la Nation polonaise ».
Napoléon reçoit aussi une députation polonaise de dignitaires de la ville.
Le même jour les Russes évacuent Varsovie et se retirent au-delà de la rivière Narew.

28 novembre
Murat et ses troupes font leur entrée dans Varsovie. Poniatowski présente à Murat l’épée du roi Stephan Batory (16e siècle).

6 décembre
Passage en force de la Vistule à Thorn par les corps d’armée de Ney. Le colonel Savary avec le 14e léger, les compagnies d’élite des 76e de ligne et 6e léger traversent le fleuve avec l’aide des bateliers polonais sous les tirs incessants de l’ennemi. « Cette affaire offre un trait remarquable. La rivière, large de 400 toises, charriait des glaçons ; le bateau qui portait notre avant-garde, retenu par les glaces, ne pouvait avancer. De l’autre rive, des bateliers polonais s’élancèrent au milieu d’une grêle de balles pour les dégager. Les bateliers prussiens voulurent s’y opposer : une lutte à coups de poing s’engagea entre eux. Les bateliers polonais jetèrent les Prussiens à l’eau, et guidèrent nos bateaux jusqu’à la rive droite. L’empereur a demandé le nom de ces braves gens, pour les récompenser. »
(IIIe Bulletin de la Grande Armée, Posen, 7 décembre)

11 décembre
L’électeur de Saxe, devenu roi, entre dans la Confédération du Rhin, créée le 12 juillet 1806, et le collège des rois, et à ce titre doit fournir 20 000 hommes.

15 décembre
C’est au tour des ducs de Saxe-Weimar, de Saxe-Gotha, de Saxe-Meiningen, de Saxe-Hilburghaussen, de Saxe-Coburg (collège des princes, total de 2 000 hommes) de rejoindre la Confédération du Rhin.

18 décembre
Après un vif combat, le maréchal Davout s’empare d’une petite île située à l’embouchure de la Ukra. (IVe Bulletin de la Grande Armée, Varsovie, 21 décembre 1806).

19 décembre
Napoléon entre dans Varsovie entre 1h et 4h du matin, précédé de Davout. L’Empereur avait quitté Posen le 16 décembre après avoir reçu la veille la lettre de Murat signalant la présence d’importantes forces russes au nord de la Narew.

22 décembre
Soutenu par Napoléon, le Sultan déclare la guerre à la Russie.

23 décembre
Davout remporte le combat de Czarnowo contre les troupes russes, dirigées par le général Ostermann-Tolstoi. Selon Rapp, l’empereur, après avoir examiné les positions ennemies depuis le toit d’une chaumière, avait dicté lui-même les ordres pour entamer la bataille. Après avoir perdu 1 600 hommes, les Russes battent en retraite et rejoignent les autres forces russes à Pultusk.

25 décembre
Selon le capitaine Coignet, Napoléon surnomme affectueusement les soldats de la Garde les « grognards », pour la première fois. Face aux mauvaises conditions de vie en campagne, notamment le froid, et en raison du versement irrégulier de leur solde, les soldats de la Grande Armée ne cessent de lui exprimer leur mécontentement en « grognant », sans toutefois désobéir.

26 décembre
La Grande Armée remporte plusieurs succès dans des conditions météorologiques extrêmement dures : sur le Nord tout d’abord, où les troupes de Ney repoussent les Prussiens de Soldau et les empêchent de rejoindre leurs alliés russes ; à Golymin, au sud-est de Soldau, où l’avant-garde de la seconde armée de Buxhöwden, sous le commandement du Prince Gallitzin, est repoussée (en revanche Gallitzin put assurer sa retraite vers le nord-est presque indemne) ; enfin, à Pultusk, où le second corps de Lannes fait face, seul, aux troupes russes de Bennigsen. Malgré la boue jusqu’aux genoux et la neige en blizzard, Lannes (finalement épaulé à temps par le général d’Aultane) réussit à contraindre l’ennemi et ses forces à la retraite. Selon les sources, les pertes françaises s’élèvent à 4 000 (Thomas Bugeaud du 64e régiment de Soult raconte les pertes à cause de « feu ami » et des suicides) contre 5 000 pour les Russes. Néanmoins, la manoeuvre d’encerclement voulue par Napoléon échoue et l’ennemi réussit à s’enfuir.

1807

1er janvier
Au relais de Blonie, sur la route de Varsovie, Napoléon voit pour la première fois la comtesse Marie Walewska qui fait partie des Polonais venus acclamer l’Empereur. La retrouvant à Varsovie, Napoléon noue une idylle avec la comtesse qui se poursuit au-delà de la campagne de Pologne. Un garçon naît le 4 mai 1810, Alexandre Walewski, reconnu par l’époux de Marie Waleswka. La comtesse restera toujours attachée à Napoléon et lui rendra visite avec leur fils sur l’île d’Elbe.

7 janvier
En réponse au décret de Berlin, l’Angleterre décide le blocus de tous les ports français en France et dans ses colonies.
La ville de Breslau (Wroclaw), assiégée depuis le 6 décembre par Jérôme Bonaparte et Vandamme, se rend (capitulation officielle le 8). Ordre est donné au prince Jérôme de former trois blocus pour cerner à la fois Brieg, Kosel et Schweidnitz et de conserver à Breslau un corps de réserve d’infanterie, de cavalerie et d’artillerie. (Correspondance, n° 11575)

14 janvier
Un décret organise une administration provisoire polonaise présidée par le maréchal comte Malachowski.

25 janvier
Combat de Mohrungen entre Bernadotte et Benningsen : « une colonne russe s’était portée sur Liebstadt, au-delà de la petite rivière de la Passarge […]. Le prince de Ponte-Corvo (Bernadotte), informé de ce mouvement, quitta Elbing, réunit ses troupes, se porta, avec la division Rivaud, au-devant de l’ennemi, et le rencontra auprès de Mohrungen […] Les ennemis furent battus, mis dans une déroute complète, poursuivi pendant quatre lieues et forcés de repasser la rivière de la Passarge. » (XVIe Bulletin de la Grande Armée, Varsovie, 27 janvier 1807) en effet, Bernadotte poursuivait un mouvement pour rester en contacte avec Ney et le gros de la Grande Armée. A Mohrungen, 24 kilomètres au nord d’Osterode, il tombe sur 10 000 Russes sous le commandement de général Markov (qui fonçait avec Bennigsen vers Dantzig et la ligne du Vistula). Bernadotte réussit à écarter les Russes (perdant 1 000 hommes, blessés ou capturés) et continue sa route vers Lautenberg et le sud. Les pertes russes s’élèvent à 1 500 hommes.

3 février
Napoléon engage et vainc Bennigsen à Olsztyn (Allenstein). Mais Bennigsen peut s’enfuir.

5 février
Napoléon envoie Ney intercepter Lestocq et ses troupes prussiennes. Lestocq arrive à s’échapper avec 7 à 8 000 hommes mais doit sacrifier son arrière garde et beaucoup d’artillerie à Waltersdorf face à Ney.

7 et 8 février
Bataille d’Eylau, terrible mais peu concluant affrontement entre les forces françaises (estimées à 66 500 hommes, Quintin, Dictionnaire biographique des officiers, sous-officiers et soldats tués ou blessés mortellement au combat. Eylau, 7-8 février 1807, 2006) et les forces russo-prussiennes (82 500, Quintin, op. cit.). Malgré de lourdes pertes de part et d’autre (selon Quintin, 4 200 hommes pour la Grande Armée), cette bataille est traditionnellement considérée comme une victoire française, les troupes alliées laissant la maîtrise du champ de bataille aux Français en opérant une retraite. Napoléon rapporte dans une lettre au général Duroc, le 9 février 1807 : « Il y a eu hier à Preussich-Eylau une bataille fort sanglante. Le champ de bataille nous est resté, mais si on a de part et d’autre perdu beaucoup de monde, mon éloignement me rend ma perte plus sensible. Corbineau [aide de camp de l’Empereur] a été enlevé par un boulet ; le maréchal Augereau a été légèrement blessé ; d’Hautpoul, Heudelet, quatre ou cinq autres généraux ont été blessés. » (Correspondance, n°11789).
Les Russes prennent 1 200 prisonniers et 6 aigles, les Français, 2 500 prisonniers (des blessés pour la plus part), 23 canons et 16 étendards.

9 février
Murat, appuyé par Ney, poursuit les alliés. Napoléon parcourt le champs de bataille, abattu par le massacre. Après une semaine en bivouac sur le champ de bataille, l’armée française rentre en quartier d’hiver autour d’Osterode. Les alliés se retirent vers Königsberg.

Auteurs : P. Hicks, E. Papot, février 2007.

Cette chronologie fait partie du dossier spécial bicentenaire : Campagne de Pologne, Eylau (8 février 1807)

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