Ce plâtre s’inscrit dans la série des portraits de Napoléon réalisée avec différentes fortunes par Canova entre 1802 et 1822. Il appartient à un réseau complexe d’œuvres de paternité parfois floue, et pour lesquelles les études se poursuivent toujours à Possagno. Dans les évolutions de ce fascinant portrait, proche de la perfection, se reflètent les modifications voulues par le commanditaire parallèlement à l’évolution de son rôle politique.
Antonio Canova avait été invité dès 1802 à Paris pour exécuter l’effigie du Premier Consul en uniforme (plâtres à la Gipsothèque de Possagno et à l’Académie de Saint Luc à Rome). De cette oeuvre dériva un buste à l’antique (Possagno, Gipsotèque), étape intermédiaire entre le portrait de Napoléon en habit consulaire et la statue colossale en marbre de 1806 représentant l’Empereur en Mars pacificateur (Londres, Apsley House, Wellington Museum), dont une version en bronze fut exécutée en 1809 (Milan, Académie de Brera). Aujourd’hui conservé à Chatsworth dans la Devonshire Collection, ce marbre resté dans l’atelier de l’artiste jusqu’à sa mort constitue le référent direct pour le plâtre de Parme. C’est le demi frère de Canova, l’abbé Sartori, qui le vendit après la mort du sculpteur à la marquise d’Aubercorn, laquelle le céda au duc de Devonshire. De nombreuses copies en furent exécutées, d’attribution parfois incertaine, mais celles de la Galerie d’art Moderne de Florence et de l’Ermitage de Saint Pertersbourg, provenant de l’atelier, valent la peine d’être citées.
Le buste ici présenté reprend l’apparence d’un Napoléon idéalisé tel un empereur romain. Sur le cartel se lit d’ailleurs l’inscription « Auguste ». L’œuvre a été acquise en 2007 en même temps qu’un buste en plâtre de Marie Louise identique à un marbre conservé dans la Bibliothèque palatine de Parme. Les deux plâtres faisaient partie des collections du célèbre graveur Paolo Toschi (1788 -1854), directeur de l’académie de Beaux Arts de Parme, conseiller artistique de la souveraine, ainsi que fondateur d’un atelier renommé de gravure, véritable orgueil de la ville ducale. En vertu des rapports qui lièrent les deux artistes – ils se rencontrèrent probablement lors de la formation de Toschi à Paris entre 1809 et 1819, il est vraissemblable que ces œuvres proviennent directement de l’atelier du sculpteur. Canova et Toschi se retrouvèrent d’ailleurs en 1815 au moment de la restitution des œuvres du musée Napoléon.
La restauration exécutée juste après l’acquisition du buste a permis de retrouver la grande qualité d’exécution du modelée du buste, dont la visibilité était devenue difficile à cause des différentes couches de couleur à la détrempe également responsables de la perte de la patine originale. Quant à l’aspect inachevé dans la partie postérieure, il peut laisser supposer que l’œuvre n’a pas été complètement terminée.
Francesca Sandrini
Directrice du Musée Glauco Lombardi
(Traduit de l’italien par K. Huguenaud)
Cette œuvre a été notamment exposée à Melbourne (Australie) au sein de l’exposition Napoléon. Revolution to Empire (2 juin-7 octobre 2012, National Gallery of Victoria).
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