Femmes au jardin

Artiste(s) : MONET Claude
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Femmes au jardin

Les années de misère que connut Monet sous le Second Empire n’entameront cependant jamais sa foi en une peinture moderne totalement affranchie des maîtres du passé. Celui que Bazille désignait comme le « plus fort de nous tous » pose alors les fondements de l’Impressionnisme. Il est un peintre rebelle, acharné, radical, seulement guidé par une nouvelle perception de la nature faite de sensations et d’impressions visuelles transcrites de manière franche et directe. En 1866, grâce au succès au Salon de Camille ou la femme à la robe verte, un splendide portrait en pied improvisé en quelques jours, la carrière du jeune Monet connaît une courte embellie. Mais, très vite,  les difficultés financières de l’artiste attisées par des relations familiales conflictuelles noircissent à nouveau son existence.

C’est cette année là que Monet s’attaque avec enthousiasme à une composition sensée résoudre les difficultés formelles rencontrées pour le Déjeuner sur l’herbe qu’il n’avait pas réussi à achever. Il y met en scène un même sujet puisé dans le quotidien de la vie contemporaine, une vision sereine de quatre jeunes femmes en crinolines claires cueillant des fleurs dans un jardin éclaboussé de soleil. Ses Femmes au jardin, presque à taille réelle, sont entièrement esquissées en extérieur, rompant ainsi avec le traditionnel processus d’exécution d’un grand format, mais respectant les principes du pleinairisme faits de spontanéité et d’observation directe de la nature. La palette est claire et vive, sans modulation des tons, le réfléchissement de la lumière est éclatant et la coloration des ombres présente une facture large aux touches amples conservant l’idée d’inachèvement de l’ébauche. Autant de provocations pour le jury du Salon de 1867 qui, particulièrement sévère en cette année d’Exposition universelle, refuse la toile.

En dépit d’une pétition adressée par Bazille le 30 mars 1867 au surintendant des Beaux-Arts, le comte de Nieuwerkerke, et signée par une soixantaine de refusés dont Monet, Manet, Renoir, Pissarro, Sisley ou Jongkind, un nouveau « Salon des Refusés » n’est pas autorisé. Et la tentative d’une contre-exposition ayant échoué faute de moyens, Femmes au jardin reste dans l’atelier de Monet. Totalement démuni alors que s’annonce la naissance de son fils Jean, l’artiste quémande l’aide de son ami Bazille qui finit par lui acheter le tableau 2 500 F payables en mensualités de 50 F !

En 1921, l’œuvre revenue entre les mains de Monet sera acquise 200 000 F par l’État pour le musée du Luxembourg.

Karine Huguenaud
octobre 2010

Date :
1866-1867
Technique :
huile sur toile
Dimensions :
H = 255 cm, L = 205 cm
Lieux de conservation :
Paris, Musée d'Orsay
Crédits :
© RMN (Musée d'Orsay) / Hervé Lewandowski
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