Septembre 1803, le Muséum central des arts, rebaptisé Musée Napoléon, ouvrait ses portes au public après l’aménagement d’une nouvelle série de salles présentant les plus célèbres sculptures de l’Antiquité. C’est sur la proposition de Cambacérès, dans une lettre adressée à Vivant Denon le 22 juin précédent, que le Muséum avait reçu ce nouveau nom : » Le titre qui convient le mieux à cette précieuse collection est le nom du héros à qui nous la devons. Je crois donc exprimer le vœu national en vous autorisant à donner pour inscription à la frise qui domine la porte d’entrée ces mots : Musée Napoléon.
Inauguré le 10 août 1793, le Muséum présentait dans le palais du Louvre les anciennes collections royales et les biens saisis au clergé et aux émigrés, auxquels s’ajoutèrent bientôt les butins des conquêtes militaires des armées révolutionnaires puis napoléoniennes. Décidée dès 1795, la création d’un musée des Antiques situé dans l’ancien appartement d’Anne d’Autriche ne fut effective qu’en novembre 1800, après une inauguration officielle en présence du Premier Consul et de son épouse.
Le musée des Antiques s’articulait autour de deux axes perpendiculaires, dont Hubert Robert nous laisse voir ici la première partie, une enfilade de salles, la salle des Saisons, la salle des Hommes illustres, la salle des Romains, qui débouchait sur la salle du Laocoon mettant en scène dans une niche le célèbre groupe sculpté du Vatican, visible au fond du tableau.
Peintre et graveur à la sensibilité pré-romantique, Hubert Robert avait été en charge des tableaux des collections royales avant la Révolution et, à ce titre, avait conçu nombre de projets en vue de l’installation du Muséum au Louvre. Il multiplia ainsi les vues les plus fantaisistes du » palais-musée « , laissant libre court à sa passion des ruines, notamment dans de saisissantes perspectives de la Grande Galerie. Bien moins visionnaire, cette vue des salles des Antiques donne une idée juste de la fréquentation du musée à la fin du Consulat, entre amateurs éclairés et copistes. Elle témoigne aussi du caractère grandiose de ce que fut l’éphémère Musée Napoléon démantelé en 1815, cette concentration unique de chefs d’œuvre que Vivant Denon, son directeur, qualifiait de » colosse qui deviendra encore plus gigantesque dans l’imagination « .
Karine Huguenaud, septembre 2003