Du 30 novembre au 2 décembre 1870, la bataille de Champigny, aussi appelée bataille de la Marne, a rassemblé près de 60 000 soldats français qui franchirent la Marne devant les villes de Champigny et de Bry-sur-Marne dans le but de contrer l’armée allemande qui encerclait la capitale depuis plusieurs semaines. Pendant trois jours, les armées françaises et allemandes s’affrontèrent à Bry, à Champigny et à Villiers, abandonnant sur le champ de bataille des milliers de morts et de blessés et laissant des villages en ruines. Édouard Detaille et Alfonse de Neuville, ayant vécu les horreurs de cette guerre, voulurent produire, non pas un tableau anecdotique de la bataille, mais une fresque qui restituerait la réalité de la guerre, intégrant dans les scènes des soldats morts et blessés. Le panorama de la bataille de Champigny, exposé à Paris et à Vienne entre 1882 et 1887, contribua à faire connaître auprès des Français cette bataille, l’une des plus meurtrières de la guerre franco-allemande de 1870.
Après un premier panorama sur la bataille de Rezonville, Detaille et de Neuville produisirent ce panorama sur la bataille de Champigny. Ils ont été assistés pour les paysages par les peintres Mathey, Taylor et Bertrand. C’est une huile sur toile mesurant 120 m de long pour 15 m de haut, qui représente la bataille de Champigny. Version théâtralisée de la bataille, la peinture immortalise un moment bien précis des affrontements : le matin du 2 décembre vers 11h, au moment où les troupes françaises subissaient une troisième attaque des armées allemandes. Le panorama fut inaugurée à Paris le 6 mai 1882 et placé dans une rotonde construite à cet effet, appelée « Panorama national » qui se situait au 5 rue de Berri, près des Champs-Élysées.
Toile-spectacle, la fin de son exposition sonna le glas de son existence. En 1892, la toile fut découpée en 65 fragments, qui furent vendus aux enchères. De nos jours, on retrouve ainsi plusieurs fragments de cette œuvre dispersés dans des musées et collections privées à travers le monde, dont une dizaine au Musée de l’Armée à Paris. Ce destin malheureux du panorama de la bataille de Champigny n’est toutefois pas un cas isolé. Ce phénomène s’explique par le format gigantesque du panorama qui rendait difficile sa conservation sur la longue durée d’une telle œuvre une fois son exposition terminée. Mentionnons à titre d’exemple le panorama de la bataille de Rezonville, qui connut le même sort.
[MAJ décembre 2022] Une brochure détaillée publiée en 1882 lors de son exposition à Paris inclut une reproduction du panorama en noir et blanc : la partie de gauche executée par Edouard Détaille, et la partie de droite executée par Alfonse de Neuville (Source : Gallica).
► Voir la reconstitution animée de ce panorama à partir des croquis des artistes :
Amélie Marineau-Pelletier, octobre 2021
Amélie Marineau-Pelletier est historienne et web-éditrice à la Fondation Napoléon (juillet-novembre 2021)
MAJ en décembre 2022 par Rebecca Young
► Liste des fragments conservés sur les 65 extraits pour la vente aux enchères de 1892
-Musée de l’Armée (Paris) : 10 fragments
-Musée municipal de Sedan : 5 fragments
-Musée Carnavalet : 1 fragment
-Musée de la Cour d’Or (Metz) : 1 fragment
-Musée des Beaux-Arts (Nantes) : 1 fragment
-Musée de la guerre 1870 et de l’Annexion (Gravelotte) : 1 fragment
-Musée de Grenoble : 1 fragment
-Musée d’Orsay (Paris) : 1 fragment
-Musée des Beaux-Arts (Quimper) : 1 fragment
-Musée municipal de Saint-Germain-en-Laye : 1 fragment
-Château de Versailles : 1 fragment
-Hôtel de ville de Vichy : 1 fragment
-Collection privée de Christopher Forbes : nombre inconnu
► Pour en savoir plus
– Pour en apprendre davantage sur la bataille de Champigny, vidéo préparée par la ville de Bry-sur-Marne
– Lire notre article sur les panoramas et l’épopée napoléonienne
– ROBICHON, François. Édouard Detaille. Un siècle de gloire militaire, Paris, L’Artilleur | Bernard Giovanangeli, 2020.