Le retour de Marcus Sextus

Artiste(s) : GUERIN Pierre-Narcisse
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Le retour de Marcus Sextus

Deux ans après avoir obtenu le Prix de Rome, Guérin présente au Salon de 1799 un tableau qui lui vaut un triomphe. Le peintre débutant, élève de Jean-Baptiste Regnault, le grand rival de David, est plébiscité par le public mais aussi par ses pairs qui couronnent l’œuvre de lauriers et célèbrent le talent de l’auteur lors d’un banquet solennel. Le livret présente le sujet en ces termes : « Marcus Sextus, échappé aux proscriptions de Sylla, trouve à son retour sa fille en pleurs auprès de sa femme expirée ». L’épisode est imaginaire. La référence à l’histoire antique n’est qu’un prétexte pour évoquer l’histoire contemporaine. Pour le public qui se presse devant l’œuvre, le message est clair : Marcus Sextus, aristocrate romain victime des proscriptions de Sylla, devient le symbole des émigrés français qui, à leur retour, trouvent leurs propriétés pillées et leurs familles décimées. L’interprétation de la scène est d’ailleurs largement et très explicitement commentée par les critiques ainsi qu’en témoigne cet article paru dans Le Bulletin de l’Europe : « Il n’est pas un coin de la France où le tableau de Guérin ne réveillât des souvenirs, ne rouvrit des cicatrices, ne ranimât des cendres au fond des tombeaux. C’est un feuillet du livre de nos destinées et il condamne également Sylla et Robespierre ! ». Le retour de Marcus Sextus connaît un tel succès que Guérin présentera la toile au Concours décennal de 1812.

L’œuvre appartient au plus pur néoclassicisme. La composition géométrique dessine une croix, formée par la verticale de Marcus Sextus et l’horizontale de son épouse défunte. La frontalité et l’immobilité du proscrit donnent une force dramatique particulière à la scène, dramaturgie renforcée par la vive lumière baignant le corps de la morte et le contre-jour dans lequel se trouve Sextus. Le mélodrame en se faisant l’écho d’une actualité douloureuse se teinte ici d’une portée idéologique. Le tableau de Guérin est une œuvre politique qui répond au sentiment populaire post-révolutionnaire. En dénonçant la Révolution sanguinaire, il confirme que celle-ci est bien terminée et que l’heure est désormais à la réconciliation nationale.

Karine Huguenaud, mai 2002

Date :
1799
Technique :
huile sur toile
Dimensions :
H = 2,17 m, L = 2,43 m
Lieux de conservation :
Paris, musée du Louvre
Crédits :
© RMN
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