Le 2 avril 1810, c’est dans le Salon carré du Louvre transformé en chapelle par les architectes Percier et Fontaine qu’eut lieu la cérémonie religieuse du mariage de Napoléon 1er et de Marie-Louise. Le cortège, qui venait du palais des Tuileries, avait dû traverser toute la Grande Galerie avant d’atteindre la grande salle d’ordinaire réservée à l’exposition des peintures. Fontaine nous révèle dans son Journal que Denon s’était opposé à faire déplacer les plus grands formats, gênant ainsi les projets d’élever deux étages de tribunes destinées à l’assistance. Informé, l’Empereur donna « avec humeur l’ordre d’enlever les tableaux et dans le cas où l’enlèvement serait impossible de les brûler » ! La menace porta ses fruits, le Salon carré fut vidé de ses chefs-d’œuvre, les tribunes construites, l’autel dressé face à l’entrée de la Galerie et paré d’une grande croix et de six candélabres de vermeil ciselés par Odiot, les murs tendus d’étoffes et de draperies brodées d’or.
Le peintre George Rouget a fidèlement restitué le Salon carré métamorphosé. Le moment représenté est celui de la bénédiction nuptiale donnée par le cardinal Fesch à un couple impérial se tenant par la main droite, entouré des princes, des princesses et des dignitaires de la Cour. Très inspiré par le Sacre de David auquel il avait collaboré, Rouget en a répété la solennité mais, en resserrant la scène autour d’un plus petit nombre de personnages groupés dans une irradiante lumière autour de l’autel, il lui a conféré une intimité que ne peut posséder dans sa démesure le tableau du couronnement à Notre-Dame. L’œuvre montre toutefois une réelle monumentalité avec un cadrage volontairement surélevé haut dessus des tribunes, offrant ainsi l’illusion d’un lieu cultuel. La division bipartite de la composition opposant l’espace vide et sombre de la moitié supérieure à l’espace plein et lumineux de la moitié inférieure, accentue la majesté d’un tableau célébrant une union porteuse de l’avenir de l’Empire.
En 1835, Louis-Philippe commanda pour les galeries historiques de Versailles une réplique de cette peinture, une version recadrée et agrandie comportant de nombreuses variantes.
Karine Huguenaud
avril 2010
Cette œuvre a été présentée dans l’exposition « 1810, la politique de l’amour. Napoléon et Marie-Louise à Compiègne » au musée national du Palais de Compiègne (28 mars – 19 juillet 2010).