Tarik Bougherira : « Nous n’avons pas la même tradition de dons en France qu’aux États-Unis ou même en Chine » (novembre 2022)

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Tarik Bougherira, fondateur et directeur de la galerie Imperial Art à Paris, fait don en novembre 2022 à la Fondation Napoléon d’un portrait de Napoléon III par l’atelier du célèbre peintre Franz Xaver Winterhalter, portraitiste de nombreuses têtes couronnées européennes notamment durant la période du Second Empire. Il a bien voulu répondre à quelques questions à cette occasion pour les lecteurs de napoleon.org

Propos recueillis par Pierre Branda, novembre 2022.

Tarik Bougherira : « Nous n’avons pas la même tradition de dons en France qu’aux États-Unis ou même en Chine » (novembre 2022)
Tarik Bougherira, collectionneur et galeriste © Imperial Art

napoleon.org – Votre galerie d’art, comme son nom l’indique, est spécialisée dans la période napoléonienne, même si son expertise s’étend au XVIIIe et au XIXe s. D’où vous vient cette passion ?

Tarik Bougherira –J’ai eu la chance dès l’âge de 19 ans de côtoyer de près et même de travailler au quotidien au contact d’objets napoléoniens fabuleux. J’avais pour mission la gestion d’une grande collection napoléonienne ainsi que l’organisation d’expositions partout dans le monde autour de celle-ci, de la Chine au Canada. En admirant ces œuvres uniques, la passion napoléonienne s’est dès lors emparée de moi. Je n’imagine plus vivre sans elle. L’art du Premier Empire est vraiment irrésistible, pour qui s’y intéresse, par son élégance comme par la qualité de ses artistes.

napoleon.org – Imperial Art est logiquement avant tout un lieu de vente des objets d’arts qu’on peut y admirer. Pourquoi faites-vous don aujourd’hui à la Fondation Napoléon de ce portrait de Napoléon III par l’atelier de Winterhalter ?

Tarik Bougherira – À travers mon activité de galeriste, je souhaite faire mieux connaître l’immense patrimoine napoléonien qu’il vienne du Premier comme du Second Empire d’ailleurs. Et surtout je m’emploie à faire revenir en France des œuvres qui en étaient parties afin de les proposer aux musées ou institutions de notre pays. Je veux vraiment que nos collections nationales s’enrichissent le plus possible. Dans cette optique, donner une œuvre à la Fondation Napoléon participe à cette sauvegarde du patrimoine car je suis certain que ce portrait du second empereur des Français pourra être dignement montré lors des expositions que vous organisez. Et sur un plan plus personnel, je voulais aussi faire ce don en hommage à la disparition de mon parrain de cœur, Pierre Crey, un homme de culture et de spectacle qui m’a tant appris.

napoleon.org – Y aurait-il une politique de donation des œuvres d’art privées à inciter en France selon vous ?

Tarik Bougherira – Oui, tout à fait. Malheureusement, nous n’avons pas la même tradition de dons en France que celle qui se pratique aux États-Unis ou même en Chine. Dans ces pays, il est normal pour tout collectionneur de donner à une institution des œuvres importantes à un moment de sa vie. C’est sans doute un déchirement que de s’en séparer mais c’est important pour la postérité de l’œuvre en question, et pour la défense du patrimoine, nous y revenons. Pour cela, il faudrait faciliter mieux encore les dons d’œuvres d’art notamment par des lois plus incitatives. Et puis, nous devons tous, collectionneurs comme galeristes, montrer l’exemple en donnant régulièrement, c’est également ce que j’essaie de faire à travers ce don du portrait de Napoléon III à la Fondation Napoléon.

napoleon.org – Votre galerie accueille des rendez-vous culturels (cycle de conférences, concerts en galerie, expositions, …). Pouvez-vous nous expliquer dans quel but et en quoi elle ne concurrence pas mais complète l’offre publique des musées ?

Tarik Bougherira – Par pur souci philanthropique, j’ai décidé d’ouvrir ma galerie à différents événements culturels, que ce soit des conférences, des expositions ou des concerts. L’entrée est libre. Nous recevons entre 60 et 90 personnes à chaque fois, dont une vingtaine d’étudiants. Il est très important que l’accès au patrimoine napoléonien soit le plus ouvert possible, notamment vis-à-vis de la jeunesse. Le marché de l’art doit servir à cela aussi. C’est encore une démarche de partage que j’entreprends. Et quelque part, je veux rendre ce que l’on a pu m’offrir, donner une chance à celui ou celle qui voudrait la saisir. Et ils sont heureusement plus nombreux qu’on ne le pense généralement.

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