Après sa formation à Brienne, le jeune Bonaparte séjourna à l’Ecole militaire de Paris du 22 octobre 1784 au 28 octobre 1785. Il en sortit lieutenant en second dans l’artillerie, pourvu d’une affectation au régiment de La Fère, à Valence. En 1795, Bonaparte retrouva l’Ecole militaire pour y installer son quartier général et, à partir de 1799, l’Ecole supprimée depuis 1787 servit de caserne à la garde consulaire puis impériale.
L’idée de fonder une école militaire destinée aux jeunes gentilhommes sans fortune naquit au printemps de 1750 à l’instigation de la marquise de Pompadour et du financier Pâris-Duverney.
Louis XV signa le 13 janvier 1751 l’édit de création de la nouvelle institution qui devait se fixer à proximité des Invalides. Jacques-Ange Gabriel fut désigné comme architecte. Rêvant d’un édifice grandiose capable de surpasser les Invalides, Gabriel dut concevoir des projets de plus en plus modestes en raison des guerres et des difficultés économiques. Si les premiers élèves s’installèrent dans des bâtiments annexes dès 1756, ce n’est que dix ans plus tard, en 1766, que le ministre de la guerre, Choiseul, approuva définitivement les dessins de Gabriel.
Le Champ-de-Mars, ensemble de terres réservées à la culture maraîchère qui s’étendait jusqu’à la Seine, commençait à être aménagé à la même époque pour servir de terrains de manœuvres aux élèves de l’école. Gabriel choisit alors de tourner la façade principale du bâtiment vers lui, tandis que la chapelle de l’école, par souci d’économie, était intégrée dans le corps du pavillon central appelé « Château ». En 1773, cette première partie de la construction était achevée. Un avant-corps de huit colonnes corinthiennes y supporte un fronton et un dôme quadrangulaire sur lequel se détache une horloge de Lepaute. Quatre statues se dressent sur l’entablement : la Victoire sous les traits de Louis XV, la France, la Paix et la Force. Les originaux très endommagés de ces figures dues aux sculpteurs Huez et Mouchy sont aujourd’hui exposés sous les portiques de la cour d’honneur. Les deux ailes basses encadrant le corps central sont l’œuvre de Brongniart qui prit la succession de Gabriel. Les ailes plus à l’extérieur portant les inscriptions « Cavalerie » et « Artillerie » ont été ajoutées sous le Second Empire.
La façade sur la cour d’honneur est encadrée par deux élégants portiques doriques. Le pavillon central reprend le shéma de la façade extérieure : colonnes corinthiennes cannelées d’ordre colossal supportant un fronton couronné du même dôme à pans. Il est relié par une double colonnade, dorique au rez-de-chaussée, ionique à l’étage, à deux pavillons d’angle. La grande cour Morland qui fait face à la cour d’honneur sert toujours de manège dans cette école qui fut, dès sa création, un haut lieu de l’équitation française.
Les différentes cours de l’Ecole témoignent de l’épopée napoléonienne par leurs noms de soldats et d’officiers de la Grande Armée : Westel, Garnier, Desjardins, Coquelin de l’Isle, Bernard ou Morland. D’autres portent des noms plus célèbres tels Berthier ou Roederer. Deux chapelles sont accessibles à la visite. La chapelle dite des Elèves aujourd’hui le mess des officiers et la grande chapelle, chef d’œuvre du style Louis XVI, à la composition claire rythmée de colonnes corinthiennes et ornée de neuf tableaux évoquant la vie de Saint-Louis. Elle servit de salle de bal sous l’Empire, notamment lors d’un anniversaire de l’Empereur organisé par Bessières. Le grand escalier d’honneur et le salon des Maréchaux ne sont aujourd’hui plus accessibles aux visiteurs mais la bibliothèque de la DEMSAT (Direction de l’enseignement militaire supérieur de l’Armée de terre) leur reste ouverte. On peut y admirer des boiseries et des peintures d’époque ainsi qu’une cheminée de marbre portant les représentations de deux cadets dans leur costume. Des expositions d’ouvrages rares ou anciens sont régulièrement organisées. Ainsi, l’année 1998, année de l’Egypte, a mis à l’honneur les campagnes d’Egypte et de Syrie de Bonaparte et des restaurations effectuées sur La description de l’Egypte. Ajourd’hui, l’Ecole militaire est le siège des établissements militaires d’enseignement supérieur.
L’histoire du Champ-de-Mars reste liée à celle de l’Ecole militaire. Terrain d’exercice pour les élèves, il pouvait cependant recevoir dix mille hommes rangés en bataille. Un tableau d’Hubert Robert, La fête de la Fédération, témoigne de son aspect à la fin du XVIIIe siècle : aplani, entouré de fossés maçonnés et fermé de grilles, il dépassait alors largement ses actuelles dimensions. Ce même tableau de Robert rappelle la destination du Champ-de-Mars sous la Révolution : accueillir les grandes manifestations républicaines telles cette Fête de la Fédération le 14 juillet 1790 ou la Fête de l’Etre suprême le 8 juin 1784. On y vit également les premiers essais d’aerostat en 1783 ou la première exposition des produits de l’Industrie en 1798. L’Empire fit du Champ-de-mars un lieu privilégié pour ses grandes cérémonies militaires : remise des Aigles le 5 décembre 1805 ou cérémonie du Champ de Mai le 1er juin 1815. Dès 1780, des courses de chevaux y furent organisées et cette habitude perdura jusqu’à la création de l’hippodrome de Longchamp en 1857. D’ailleurs, le prix de l’Horloge qui se court toujours tient son nom de l’horloge de Lepaute qui domine le Champ-de-Mars sur le dôme de l’Ecole militaire. Le Champ-de-Mars accueillit encore les grandes Expositions universelles du XIXe siècle (1867, 1878, 1889 et 1900) avant d’être transformé en parc de 1908 à 1928 et de voir sa taille considérablement réduite par le percement de deux avenues résidentielles, l’avenue Charles Floquet et l’avenue Emile-Deschanel.
Karine Huguenaud (janvier 2001)