C’est à Médan que Zola composa une grande partie des Rougon-Macquart, Histoire naturelle et sociale d’une famille sous le Second Empire. Il y écrivit, entre autres, Nana, Germinal, La Terre. Acquise en 1878 grâce au succès de L’Assommoir, la maison de Médan permit à Zola d’associer son nom à un lieu géographique, tout comme Flaubert le fit avec Croisset ou Hugo avec Jersey et Guernesey.
Désireux de pas trop s’éloigner de Paris et de la prochaine Exposition universelle, Zola acheta ce qu’il nommait « une cabane à lapins » située à cinquante mètres d’une ligne de chemin de fer qui lui inspirera La Bête humaine. Résidant pendant huit mois de l’année à Médan, du début de l’été au 1er janvier, l’écrivain n’aura de cesse d’agrandir sa propriété qui en vingt-quatre achats passa de 1 200 à 42 000 mètres carrés.
L’adjonction d’un massif bâtiment de briques et de ciment destiné à abriter le cabinet de travail de l’écrivain puis, en 1885, celle d’une tour symétrique à pans coupés, écrasèrent la petite maison d’origine prise en étau. En 1880, Zola acquit l’île de Médan où il fit ériger le chalet norvégien présenté à l’Exposition universelle de 1878. En 1882, il fit construire le « pavillon Charpentier », baptisé du nom de son éditeur, pour y accueillir ses invités. Il reçut en effet nombre de ses relations à Médan : journalistes, écrivains, hommes de théâtre français et étrangers. Ses amis les plus proches venaient régulièrement y séjourner parmi lesquels Vallès, Daudet, Goncourt, Mirbeau, Cézanne (jusqu’à la brouille après la parution de L’Œuvre en 1886) et naturellement les cinq auteurs des Soirées de Médan : Paul Alexis, Henry Céard, Léon Hennique, J.K. Huysmans et Guy de Maupassant. Pour cette œuvre publiée en 1880, chacun d’entre eux écrivit une nouvelle sur un thème commun : la guerre franco-allemande de 1870. Cet ouvrage collectif dont la plus célèbre nouvelle reste Boule de Suif de Maupassant, fut considéré comme le manifeste du naturalisme en raison de son titre, véritable hommage au maître de Médan.
Le 28 septembre 1902, Zola quitta pour la dernière fois sa propriété ; il mourut asphyxié dans son appartement parisien la nuit même. La veuve de l’écrivain fit don de la maison de Médan à l’Assistance publique en 1905. L’association du musée Zola l’ouvrit au public en 1985. Dans la maison primitive, il reste encore la salle à manger et le plafond à caissons commandé par Zola. Dans les bâtiments adjacents construits sur la volonté de l’écrivain, quelques pièces ont gardé leur décor d’origine comme la magnifique cuisine de carreaux de céramique et la salle à manger aux murs recouverts d’un papier imitant le cuir de Cordoue et aux vitraux moyenâgeux.
Le cabinet de travail de l’écrivain reste une des pièces les plus intéressantes de la demeure : immense espace cubique dominée par une large baie donnant sur la Seine, elle possède une monumentale cheminée Renaissance portant sur sa hotte la devise de Zola : Nulla dies sine linea (pas un jour sans une ligne). Enfin, la salle de billard présente un plafond orné des blasons de la famille Zola, une cheminée qui a conservé sa taque fleurdelysée et deux splendides vitraux exécutés par Henri Baboneau d’après les indications de l’écrivain lui-même. De nombreuses photos, passion de Zola, jalonnent ce parcours et témoignent du style particulier d’une demeure où s’entassait une multitude de meubles et d’objets d’art hétéroclites.
Karine Huguenaud