Napoléon l’estimait. Maréchal renommé et invaincu, Louis Nicolas Davout est une figure de l’épopée militaire napoléonienne. Les commémorations du bicentenaire ont relaté le génie militaire de Napoléon, mais c’est oublier les victoires offertes par le « Maréchal de Fer » à son Empereur : Austerlitz, Eylau, Wagram et … Auerstaedt. Si l’Histoire retient les noms des illustres frères d’armes de Davout tels Ney ou Murat, à Savigny-sur-Orge le souvenir de l’officier demeure.
La commune de l’Essonne et le maréchal sont liés. Place, gare, rues et bâtiments … À Savigny, Davout est partout. Même le logo de la ville reprend les armoiries du maréchal. Le militaire et sa famille s’y installent en 1802. Ils acquièrent un domaine de 451 hectares, comprenant le château de Savigny et ses dépendances, le Moulin de Joppelin, le Bois de Sainte-Geneviève à Viry-Châtillon ainsi que plusieurs terres agricoles avoisinantes. Il en deviendra le maire entre 1822 et 1823.
Faire vivre cet héritage. En 2006, à l’occasion du bicentenaire de la bataille d’Auerstaedt, la municipalité créée une exposition retraçant la carrière militaire de Davout. Le projet est lancé sur l’initiative de l’ancien député-maire Jean Marsaudon. Deux ans plus tard, la petite exposition devient musée. Cet espace est pensé par les autorités de l’époque pour créer un lieu de mémoire commun pour tous les habitants de Savigny. Avec ce musée, l’histoire de la ville est valorisée. Cet espace muséographique est un lien qui unit les Saviniens à leur passé.
Toutes authentiques, les pièces exposées ont été touchées ou portées par Davout !
Le musée s’ouvre sur un tableau symbolique : Napoléon conseillé par Davout. Le visiteur s’imprègne alors de la légende du « Maréchal de Fer ». De grands panneaux explicatifs apportent des éléments contextuels et biographiques du militaire à Savigny-sur-Orge. Avec cette contextualisation, le visiteur se saisit de l’importance de cette personnalité au sein de la Grande Armée.
En pénétrant dans la salle principale du musée, les curieux sont accueillis par Davout en personne … Ou plutôt son buste. Imposante réalisation en marbre de François Joseph Bosio – célèbre pour sa copie du quadrige des Chevaux de Saint-Marc au Carrousel du Louvre ou sa statue de Louis XIV sur la place des Victoire (Ier arrondissement) – cette sculpture a été réalisé peu de temps après le mort du prince d’Eckmülh. Ce buste fait la fierté du musée. Mais, celui-ci recèle de pièces d’une grande valeur historique.
Davout était réputé pour son intransigeance et sa sévérité sur les champs de bataille. Le musée du souvenir présente le maréchal sous un aspect plus humain. L’homme se raconte à travers des objets personnels. La scénographie est un fil linéaire qui accompagne l’épopée du maréchal de ses débuts à l’École Royale Militaire d’Auxerre à son poste de Ministre de la Guerre des Cent-Jour. De la copie de la lettre signée par Napoléon lui conférant le titre de duc d’Auerstaedt à son exemplaire Mémoire au Roi offert à l’empereur de Russie Alexandre Ier, les pièces exposées – toutes authentiques – ont été touchées ou portées par Davout !
Au détour des vitrines, le visiteur découvre un manuel sur les éléments de fortifications annotées par Davout, lorsque celui-ci était un tout jeune aspirant. Cet ouvrage est un témoin direct du génie militaire de ce stratège, dont les pages sont entrouvertes sur la construction d’ouvrages de fortification pour défendre une ville … Éléments tactiques que prendra sûrement compte le maréchal lors du siège d’Hambourg en 1813. Une gravure originale (et célèbre) de Davout en Égypte orne les murs du musée. Estimée à plusieurs centaines d’Euros, cette lithographie rare sur le marché des collectionneurs, est une image d’Épinal rendant hommage au courage du commandant en chef du 3e Corps.
Davout le guerrier. Sa vie militaire est à l’honneur dans ce musée. Parmi les pièces exposées, ses épaulettes de maréchal. Une rencontre directe avec l’épopée napoléonienne, puisque Davout les portait durant les combats notamment lors de la bataille d’Eckmühl. Cet autre fait d’armes de Davout trouve également sa place dans la collection. Un plan de bataille et quelques rares illustrations d’époque relatent cette victoire. Le quotidien du maréchal en campagne est également retracé. La chocolatière de Davout est sans aucun doute la pièce la plus singulière du musée. Avant chaque bataille, le maréchal aimait se délecter d’une tasse de chocolat chaud. Son service à chocolat est au complet : tasses, coupelles, petites cuillères. Autre élément d’importance participant à sa renommée, son bâton de Maréchal. Tout, au moins son aquarelle. Offerte par Nikita Khrouchtchev, à la ville de Savigny dans les années 1950, cette peinture est une reproduction du bâton du maréchal perdu par ce dernier lors de la retraite de Russie.
Mais que serait Davout sans Auerstaedt. L’un est indissociable de l’autre. Comme précédemment évoqué, l’exposition a été lancée pour commémorer le deux-centième anniversaire de la victoire d’Auerstaedt. C’est tout naturellement que la bataille occupe une place centrale dans le musée. Le spectateur est immergé au cœur des combats, grâce à la reconstitution en grandeur nature réalisée par le peintre Gaspard Gobaut (Inauguration de l’Arc de triomphe de l’Étoile à Paris ; 1852). Davout trône en maître dans cette œuvre. Au centre de la toile, il fond sur l’ennemi à la tête de ses troupes. De cette bataille, vous pourrez en admirer quelques reliques. Ces objets sont là pour rappeler la violence de l’affrontement ainsi que les histoires des hommes de Davout au cœur des affrontements : étrier de cavalier, fer à cheval, boutons d’uniformes, pipe de grognard, boulet de canon, biscaïens. Riche de ses collections, ce petit musée profite de son aspect pittoresque pour faire perdurer la mémoire d’un des plus fidèles sujet de Napoléon.
Maxime Coupeau
Juillet 2021
Maxime Coupeau est journaliste à Valeurs actuelles.