Les conséquences géopolitiques de l’épopée du vainqueur d’Austerlitz furent vraiment mondiales, en particulier sur le continent américain. Et ce n’est point par effet de mode, l’histoire mondialisée étant actuellement en vogue, qu’il faut s’y intéresser de près. Il y eut l’indépendance d’Haïti mais aussi l’écroulement du vieil Empire espagnol assez mal étudiée jusqu’à présent.
Cette lacune est à présent comblée par l’ouvrage majeur de Gonzague Espinosa-Dassonneville La chute d’un Empire – L’indépendance de l’Amérique espagnole paru aux éditions Passé Composés. L’auteur nous montre à quel point les évènements qui conduiront à l’indépendance de nombre de pays d’Amérique latine furent intimement liés à l’histoire européenne. Comme autant de répliques du phénomène napoléonien qui bouleversa l’Europe. De Santiago du Chili jusqu’à Mexico, nous suivons la destinée des révolutions américaines, toutes ou presque fruit de circonstances exceptionnelles.
Loin de suivre la doxa des romans nationaux, Gonzague Espinosa-Dassonneville revisite entièrement cette histoire pour en arriver à une conclusion assez éloignée de la version généralement admise, à savoir l’aboutissement d’une lutte permanente contre un supposé absolutisme espagnol. Profitant du chaos résultant de la guerre d’Espagne (1808-1814), colons et indigènes ont en réalité profité de la situation pour s’emparer d’un pouvoir devenu quasi-vacant. Comme le dit si bien l’auteur « ce ne sont pas les indépendances qui ont brisé l’empire, mais au contraire, c’est la faillite de l’empire qui a déclenché les indépendances ».
Sa belle plume nous fait ainsi revivre les différentes épopées ayant conduit à l’émergence de pays importants. Partant, cela permet aussi de mieux comprendre un continent sud-américain assez mal connu en France. (Pierre Branda, directeur scientifique de la Fondation Napoléon)
Présentation par l’éditeur
Courant entre 1808 et 1825, le temps des indépendances apparaît encore aujourd’hui comme le véritable mythe fondateur des nations issues de la désintégration de l’Amérique espagnole. Ces révolutions restent pourtant méconnues – si ce n’est les figures écrasantes des Libertadores que sont Simón Bolívar ou José de San Martín. La compréhension de ces indépendances n’est possible que dans une perspective globale et atlantique, la crise et l’effondrement de l’empire procédant directement du tumulte politique du Vieux Continent. Quand Napoléon force les Bourbons d’Espagne à abdiquer à Bayonne en 1808 pour les remplacer par son frère Joseph, les réactions dans l’empire sont d’abord unanimes : le Nouveau Monde réaffirme sa loyauté à la nation espagnole et à son souverain légitime, Ferdinand VII. Mais l’incertitude de la situation et les grandes distances que doivent parcourir les nouvelles à l’époque de la marine à voile finissent par faire le jeu des revendications émancipatrices, qui se transforment en véritables guerres d’indépendance.
Maîtrisant la complexité des contextes sociaux et politiques de chaque côté de l’Atlantique, Gonzague Espinosa-Dassonneville déconstruit les « romans nationaux » locaux (l’historia patria) et montre comment ces indépendances, qui étaient loin d’être prévisibles, sont la conséquence du chaos politique qui bouleverse la péninsule Ibérique.