Passionné par l’histoire napoléonienne, déjà auteur d’un remarquable récit consacré à la Chambre noire de Longwood, Jean-Paul Kauffmann nous invite en compagnie de son épouse et de leurs deux fils (la « famille Fenouillard » selon ses mots, réjouissante de drôlerie et de tendresse abrupte), à les suivre dans la découverte de l’enclave russe de Kaliningrad, de cette Outre-Terre. Îles de Kerguelen, Sainte-Hélène, Kaliningrad… Trois années « d’immobilisme involontaire » (une formule pudique pour l’ancien otage au Liban, de 1985 à 1988, qui parle cependant sans détour de cette période et de ses conséquences), ont accentué le goût des voyages, aux richesses peu évidentes, chez l’ancien reporter qui se décrit désormais comme un « chasseur de traces », pour « les sortir du naufrage du temps ».
Retrouver dans Kaliningrad aujourd’hui un peu d’Eylau, cette victoire napoléonienne du 8 février 1807, au goût amer et métallique de sang, cette entaille secrète dans le succès de la paix de Tilsit. Eylau, pour toujours associée au colonel Chabert, le héros de Balzac, donné pour mort lors de la grande charge de Murat et qui revint d’entre les morts. Enveloppé dans une palette de gris (du ciel, de la neige), Outre-Terre est un livre magnifique sur la nécessité, chaque jour posée, d’exister au monde, quel qu’il fut, quel qu’il soit, en revenant de nos outre-terres. (Irène Delage)
Ce livre a reçu le Prix spécial du Jury 2016 de la Fondation Napoléon.