Mémoires du premier valet et exécuteur testamentaire de l’empereur Napoléon, Plon, 1952, 1955
Louis Marchand entra au service de la Maison Impériale en 1811 comme garçon d'appartement, puis il occupa le poste de Premier valet de chambre de l'Empereur. Il suivit Napoléon à l'île d'Elbe et à Sainte-Hélène, et devint ainsi un des mythiques compagnons du monarque déchu. Marchand revint en France en 1821 et coula des lors des jours paisibles entre Paris et Auxerre. Il mourut à 85 ans en 1876.
Ce n'est que 120 ans plus tard que son petit-fils confiera le journal tenu par son grand-père à un imminent spécialiste napoléonien, Jean Bourguignon, conservateur en chef de Malmaison Ce dernier ne put publier que le premier tome en 1952, couvrant la période des Cent jours et de l'Île d'Elbe. Après sa mort, c'est un autre grand nom de l'histoire napoléonienne, le Commandant Lachouque, qui assura la publication du second tome en 1955, relatif à la période de Sainte-Hélène.
L'existence de ces mémoires était connue depuis longtemps. On pensa même que Napoléon III les avait achetés et fait détruire ! Frédéric Masson avait obtenu l'exceptionnelle faveur de les consulter pendant quelques jours. C'est finalement à Jean Bourguignon que revint la tâche de les rendre publiques.
Que le lecteur ne s'attende pas à de fracassantes révélations, car le récit de Marchand est une description sobre et précise de la vie quotidienne de l'Empereur et de son entourage immédiat. Sans jugement excessif, tout en retenu comme il sied à un homme de l'ombre, qui connaît par ailleurs son importance dans le bon déroulement des journées, Marchand décrit les manies et les attitudes des uns et des autres et excelle, surtout dans le monde clos de Sainte-Hélène, à révéler des traits de caractère. On dévore les chapitres, pris par la grande qualité d'évocation de Marchand, entre anecdotes, transcriptions de conversations et relevés des faits. Le lecteur est au plus près de Napoléon et le suit sur les chemins de l'exil. Ces mémoires demeurent une source précieuse pour mieux appréhender qui fût vraiment Napoléon, même si Marchand reste figé dans la pose du serviteur dévoué corps et âme à son empereur.
La description de la lente agonie et de la mort de Napoléon est à bien des égards émouvante.
Avec le récit du général Bertrand publié également dans les années 1950, ce sont là les ultimes mémoires rédigés par les témoins français de l'exil : le comte de Las Cases, le général Gourgaud, le comte de Montholon, le mamelouck Ali, le marquis de Montchenu.
Les lecteurs anglo-saxons ont dû attendre 1998 pour découvrir dans leur langue le récit de Marchand, avec un titre très évocateur In Napoleon'shadow, et un sous-titre flatteur pour le mémorialiste : the complete memoirs of Louis-Joseph Marchand, valet and friend of the Emperor 1811-1821. Être qualifié d'ami de l'Empereur est sans nul doute le plus beau titre de gloire de Louis-Joseph-Narcisse Marchand.