Chronique-témoignage de Timothée Richard > Faire aimer l’Histoire autrement : les enjeux de l’Histoire vivante

Auteur(s) : RICHARD Timothée
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L’Histoire m’a toujours intéressé et ce, quelle que soit la période. Toutefois j’avais parfois le sentiment, au fur et à mesure de mes études, que son enseignement restait trop classique ou trop universitaire. Il me manquait une autre dimension qui me permette de comprendre les enjeux d’un fait historique précis. Je me retrouvais à apprendre machinalement des dates ou les noms de grands traités sans pour autant apercevoir leurs véritables répercussions. Il me fallait mettre une image sur ce que j’apprenais pour mieux comprendre les tenants et les aboutissants d’un évènement en particulier et c’est pour cette raison que j’ai choisi de faire de l’Histoire vivante. Or, il se trouve que cette pratique a tendance à devenir de plus en plus récurrente en France, ce qu’Émile Kern souligne particulièrement dans son dernier livre : Ils rendent l’Histoire vivante.

Chronique-témoignage de Timothée Richard > Faire aimer l’Histoire autrement : les enjeux de l’Histoire vivante
Timothée Richard © Fondation Napoléon / Rebecca Young 2022

En 2021, l’Institut catholique d’études supérieures (ICES) à La Roche-sur-Yon a ouvert un Master entièrement consacré à cette discipline, le deuxième en France après celui de l’université de Nîmes. J’ai eu la chance d’intégrer la première promotion dans laquelle nous n’étions que trois contre une dizaine dès l’année suivante, ce qui témoigne du vif intérêt pour ce domaine d’études : il y a aujourd’hui une sorte de « croisement » entre les pratiques culturelles des nouvelles générations et cette discipline récente. Par ailleurs, la proximité géographique de l’ICES avec le Puy du Fou, et l’université d’été « Devenez créateur » organisée conjointement par les deux entités depuis maintenant deux ans, ont fait naître chez bon nombre d’étudiants, un idéal que je partage largement : démocratiser et faciliter l’accès à l’Histoire en travaillant sur « la reconstitution spectaculaire du passé. »
En effet, l’idée de faire vivre l’Histoire semble intéresser de plus en plus de monde : la popularité des Grands Jeux romains de Nîmes ou la fréquentation grandissante au Puy du Fou en Vendée illustrent bien cette tendance. L’aspect ludique des spectacles permet au public, et surtout aux plus jeunes, d’attiser leur curiosité pour l’Histoire. C’est par ailleurs ce que le parc vendéen m’a apporté : c’est parce que j’aime l’Histoire que j’avais besoin de « vibrer », de voir quelque chose de grand et de plus concret en sortant des manuels d’Histoire. J’avais bien sûr conscience des images d’Épinal et des traits volontairement grossis sur des faits qui ont réellement eu lieu, mais le résultat était là, en tout cas pour ma part. L’Histoire prenait cette autre dimension que je recherchais dans les classes de collège.
Il me paraît intéressant de noter ici une différence entre les Grands Jeux Romains et le Puy du Fou. Le créateur et organisateur des reconstitutions nîmoises, l’historien Éric Teyssier, nous expliquait, durant les enseignements à l’ICES, vouloir s’approcher le plus de la vérité historique, tant au niveau des costumes que dans la chorégraphie des combats, etc. Cependant, le résultat est le même qu’au Puy du Fou : le public est conquis et en redemande. En témoigne cette anecdote que Monsieur Teyssier nous a partagée : celle d’un spectateur qui lui a fait part de ce même enthousiasme une dizaine d’années après avoir découvert les Grands Jeux romains. Cette réaction montre justement l’intérêt que peuvent avoir les jeunes pour ce genre d’évènements.

L’Histoire vivante permet à un certain public de ne pas manquer son rendez-vous avec l’Histoire et inversement : l’historien ne doit pas manquer ou sous-estimer cette rencontre avec cette nouvelle discipline alors en pleine expansion.
Il y a donc ici la concrétisation de ce à quoi toute personne qui se lance dans cette branche de l’Histoire aspire, à savoir attiser la curiosité de l’Histoire et la faire aimer, que celle-ci soit romancée ou au contraire scrupuleusement respectée. L’objectif n’est pas de faire passer la lecture ou des offres muséales pour des activités désuètes, mais il est vrai que les nouvelles générations semblent être intéressées par cette nouvelle façon d’approcher l’Histoire. J’ai eu l’occasion de discuter avec des lycéens si certains n’ont pas d’avis tranchés sur l’Histoire et n’ont pas nécessairement envie de s’y intéresser davantage, . la découvrir par des moyens plus modernes pourrait cependant attirer leur attention. Les jeunes générations, dont je fais partie, vivent dans un monde où le pouvoir de l’image est très important, notamment à travers les réseaux sociaux, les jeux vidéos, les technologies 3D (j’en veux pour preuve le succès de l’exposition virtuelle « Éternelle Notre Dame ») ou encore des productions cinématographiques ; par ailleurs, la popularité de certaines séries comme Peaky Blinders, Viking ou Barbarian le montre bien aussi. Bien entendu, nous savons pertinemment qu’il ne faut pas prendre pour argent comptant toutes les informations qui nous sont transmises dans ces séries. Néanmoins, cela permet d’avoir une première approche et de se faire une idée de ce qui pouvait se passer à une certaine époque.

Finalement, l’Histoire vivante répond à quatre points fondamentaux :
– la transmission qui est la finalité de l’Histoire vivante ;
– la passion de transmettre un héritage à un maximum de personnes ;
– la création spectaculaire autour d’un événement précis, et c’est là que l’on sort du cadre académique et/ou universitaire ;
– la valorisation du patrimoine et de la culture.

C’est dans cet état d’esprit que j’ai postulé pour rejoindre la Fondation Napoléon pour une alternance en deuxième année de Master. La Fondation fait en effet partie de ces organismes qui sont amenés d’une part à faire des recherches sur les périodes des Premier et Second Empires, et d’autre part à informer un large public. Cela me paraît donc intéressant de voir comment la Fondation travaille à la transmission de l’Histoire, comment elle peut la vulgariser via internet, des vidéos, des rencontres, etc.
Précisément, j’ai décidé de consacrer mon mémoire au bicentenaire de la mort de Napoléon et sur toutes les retombées qu’un tel anniversaire a pu engendrer. Il est donc question d’observer les reconstitutions qui ont eu lieu, par exemple la grande exposition sur Napoléon organisée à la Villette, dont la Fondation Napoléon était partenaire par les prêts de ses collections et par ses mécénats.
Ainsi, l’ensemble des actions proposées par la Fondation Napoléon lors de « 2021 Année Napoléon » me permet d’établir un champ de réflexion idéal pour développer l’Histoire vivante dans les années à venir.

Timothée Richard est étudiant en master 2 Histoire vivante à l’ICES et en contrat d’alternance à la Fondation Napoléon.
Novembre 2022

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