Les guerres de la « Quatrième Coalition » : premier épisode, la Campagne de Pologne

Auteur(s) : DELAGE Irène (trad.), HICKS Peter
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Dans un article important, publié en 1926 dans la Revue des Deux Mondes (XXIV, 824), Gabriel Hanotaux consacrait l'année 1807 comme l'année déterminante du règne de Napoléon. Cet essai analysait la politique internationale, prélude à la bataille d'Eylau. Malgré tous les espoirs, la guerre ne prit pas fin avec la brillante double victoire de Iéna / Auerstedt. L'armée de Napoléon était loin de la France. Les troupes russes se massaient sur les frontières de la Prusse (malgré leur arrivée trop tardive pour sauver la Prusse, elles étaient heureuses de pouvoir assurer un asile sûr au roi Frédéric Guillaume, un ami proche de l'empereur russe). Et dans l'ombre se tenait toujours l'éternel ennemi, l'Angleterre. Napoléon menait une double stratégie, qui consistait à frapper l'Angleterre à travers son commerce dans une sorte de guerre froide (avec les décrets de Berlin), et à faire face à la menace militaire immédiate de la Russie, au cours de ce qui a été appelé la campagne de Pologne. Cependant, cette situation ne relevait pas d'une logique implacable. Après Iéna, Napoléon était en effet le maître de l'Europe de l'Ouest. Comment pouvons-nous alors comprendre ses actes ?

Les relations franco-prusses et le blocus continental

Napoléon expliqua que c'est la constitution de la « Quatrième coalition » qui le conduisit à poursuivre les hostilités après Iéna. Si l'on suit cette vision des choses, la Russie et la Prusse, financées par l'Angleterre, sont les agresseurs, et Napoléon dut riposter, contre sa volonté. Des historiens ont récemment apporté une analyse plus nuancée de ce moment clé de l'histoire de l'Empire. Si, la Prusse a effectivement attisé le conflit, par contre elle se retrouva seule face à la France, sans allié (1) . En septembre 1806, l'Angleterre sut ruiner les efforts des diplomates prussiens pour obtenir une aide financière, et la Russie n'agit pas de manière décisive pour aider son alliée. Aussi, le lendemain de la double défaite, Frédéric Guillaume écrivit à Napoléon pour lui demander un armistice. Napoléon refusa, craignant l'arrivée des troupes russes. Le 22 octobre, voyant sa position stabilisée, Napoléon reprit contact avec l'envoyé du roi Frédéric Guillaume, Lucchesini, pour proposer cette fois ses propres conditions. Face au refus du roi, l'armée française occupa complètement la Prusse et pris ses forteresses, forçant ainsi Frédéric Guillaume à s'asseoir à la table des négociations. Cependant, les termes de l'accord furent plus durs. Le traité de Charlottenburg du 16 novembre fut finalement signé par les plénipotentiaires prussiens, mais il n'allait pas être ratifié par le roi Frédéric Guillaume. En effet, ses conseillers le mirent en garde sur le fait que la signature d'un tel traité provoquerait une guerre avec la Russie, et que, si les troupes russes étaient expulsées de la Prusse orientale, il y aurait des révoltes dans les territoires polonais de la Prusse. A ce point, Frédéric Guillaume (il faut le souligner) était aussi soutenu par l'armée de son allié russe.

Parallèlement au conflit avec la Prusse et la Russie alliées, Napoléon avait entamé une guerre froide avec l'Angleterre (qu'il pensait être l'instigatrice et le financier de l'opposition russo-prussienne). Il s'appuyait sur ce qu'il appelait son « système continental », continental parce qu'il s'agissait de conquérir la mer (dominée alors par l'Angleterre) par la maîtrise de la terre (le continent européen). Dans cette guerre qui se devait d'être fatale à cette nation insulaire, le continent devait être hermétiquement fermé au commerce britannique. Pour que le système continental marcha, il devait couvrir l'ensemble de l'Europe. En battant la Prusse à Iéna, et en occupant le pays, Napoléon put contraindre la Prusse à rejoindre le système. Maintenant, son attention pouvait se tourner vers la Russie.

Les relations « franco-russo-prussiennes »

Comme nous l'avons vu dans notre article consacré à Iéna, les négociations de paix avec la Russie en 1806 furent un échec. En effet, même un rapide coup d'oeil sur les deux années précédant novembre 1806 révèle combien cette période était l'un des plus pauvres dans l'histoire des relations franco-russes. A Saint-Pétersbourg, le pouvoir avait été révolté par l'affaire du duc d'Enghien (été 1804),  offensé par le couronnement et le sacre à Paris (hiver 1804-1805), scandalisé par l'annexion française de la Ligurie et la création d'un royaume d'Italie (été 1805), et horrifié et prêt à une revanche après la défaite cinglante à Austerlitz (hiver 1805-1806). Ainsi, on pouvait raisonnablement douter de la sincérité d'Alexandre (en tandem avec l'Angleterre) dans les négociations de paix à l'été 1806. Mais quand, sans surprise, ces discussions échouèrent, Alexandre se tourna vers son ami personnel, le roi de Prusse Frédéric Guillaume, et devint un allié de la Prusse quand cette dernière décida d'affronter ouvertement Napoléon (2).

Comme il était nécessaire de mobiliser l'ensemble du continent européen pour que son « système » marcha, Napoléon devait faire de la Russie une alliée (3).
 
Pour arriver à ses fins, Napoléon devait séparer la Russie et l'Angleterre, toujours alliées d'un point de vue défensif depuis Austerlitz. Napoléon savait que l'alliance russo-britannique était un mariage « d'inconvenance », que les partenaires connaissaient des relations difficiles, superficiellement amis mais résolument tournés vers leurs desseins respectifs, et que leurs objectifs stratégiques coïncidaient rarement (voire jamais).

Napoléon savait également qu'Alexandre ne portait pas l'Angleterre dans son coeur. L'empereur russe (comme la majeure partie de l'Europe) était particulièrement frustré par le comportement britannique arrogant sur les mers, marqué par la saisie de cargaisons et l'inspection forcée de bateaux, comme les mers leur appartenaient.
Dans le but de forcer la Russie à une alliance, afin de bloquer le continent européen, et de priver l'Angleterre de son principal allié continental, l'empereur des Français décida de provoquer les troupes russes stationnées sur les terres polonaises, espérant prendre avantage du soutien et des ressources polonais, et décourager l'Autriche d'intervenir (4). Ainsi, bien que l'Autriche fut neutre et désarmée, Napoléon écrivit à Eugène pour lui demander, par précaution, de masser ses troupes à la frontière autrichienne, afin de décourager tout action imprudente de l'Autriche (5).
 
Cependant, en dépit des buts stratégiques à long terme du système napoléonien (qui, on doit le dire, restaient cachés aux yeux de tous, excepté pour l'empereur lui-même), à ce point de novembre 1806, les troupes russes positionnées sur la frontière perméable Pologne / Prusse représentaient une véritable menace pour les soldats français disséminés à travers le territoire prussien. Autrement dit, si Napoléon laissait Benningsen prendre l'initiative, il serait en très mauvaise position.
 
En plus de s'attaquer aux Russes en Pologne, Napoléon prit également contact auprès de la Sublime Porte afin de négocier un traité ; l'objectif était d'employer une tactique de diversion, en menaçant aussi la Russie sur ses frontières du sud. A ce moment-là, Alexandre s'apprêtait à entrer en guerre avec l'empire Ottoman. La Russie et la Porte étaient liées par un traité selon lequel le remplacement des hospodars de Moldavie et de Valachie devaient se faire de concert entre les deux parties. Le Sultan avait néanmoins déjà remplacé les hospodars par ses propres candidats. La Russie usa de ce point litigieux comme prétexte pour provoquer une confrontation, bien que ses véritables craintes étaient de voir la France et la Sublime Porte s'allier, et voir ainsi se fermer le détroit des Dardanelles à sa marine.
 
Comme la Porte n'était pas prête à se lancer dans un conflit armée, l'affrontement n'eut pas lieu. Mais le Tsar en profita pour obtenir de nouvelles concessions et obtint d'occuper la Moldavie et la Valachie. Alexandre et son ministre des Affaires étrangères estimaient que cette occupation était nécessaire afin de préserver l'influence russe à Constantinople, pour faire rentrer le Sultan dans les rangs et, enfin, pour tenter de faire basculer les chrétiens des Balkans (et notamment les Serbes) du côté des Russes. Le Sultan répliqua en déclarant la guerre à la Russie le 22 décembre. Sa réaction fut sans doute suscitée par sa correspondance avec Napoléon. Dans deux lettres datées des 9 et 11 novembre 1806 (6), l'une adressée à Cambacérès, l'autre au Sultan lui-même, Napoléon suggérait à Sélim de profiter que les troupes russes étaient en Pologne, pour « faire marcher ses armées pour couvrir Bender, Choczim, toute la ligne du Dniester » afin de reprendre possession de la Moldavie et de la Valachie.

L'objectif général était très clair, il s'agissait de scinder l'armée russe en deux et d'établir de bonne relations avec l'empire Ottoman dans le but de menacer les intérêts britanniques dans le Moyen et l'Extrême-Orient.

La question polonaise

Comme l'historien polonais Andrzej Nieuwazny l'a récemment montré (7), au cours de la décennie précédant Austerlitz Napoléon n'avait aucune vision politique concernant la Pologne. Ce pays ne servait pas alors sa diplomatie et allait contre les intérêts stratégiques de la France. Cependant, après cette bataille clé, des observateurs, comme l'envoyé russe Pierre Dolgorouki (8), ont senti que Napoléon réfléchissait à faire éclater une insurrection en Pologne et à placer Murat sur le trône polonais. Après Austerlitz, Frédéric Guillaume ne s'appliqua pas comme François le fit, à calmer le jeu et porta le conflit sur le territoire polonais, la Pologne devenant alors un enjeu important, presque par accident.

Dorénavant, Napoléon allait utiliser la « question polonaise » comme une arme à la fois contre la Prusse et la Russie.
De nombreux Polonais se rallièrent à Napoléon, comme ce dernier se posait en protecteur de ceux qui s'indignaient de l'injuste partition du territoire polonais, la plus récente étant intervenue en 1795, mais il y avait aussi de notables opposants, comme Tadeusz Kosciuszko (le chef de l'insurrection de 1794), qui se méfiait de Napoléon.

En revanche, l'empereur ne souhaitait pas endosser la re-constitution de la Pologne (9). C'est qu'il avait deux raisons fortes pour préférer garder plusieurs options ouvertes : tout d'abord, vis-à-vis de ses ennemis dans la guerre actuelle – tout soutien apporté sans équivoque à la cause polonaise aurait pour effet de raffermir la fragile coalition contre lui ; d'autre part concernant la paix à venir – s'il ouvrait la boîte de Pandore de la réunification de la Pologne, la paix durable serait compromise. Aussi au cours des 7 mois qui vont conduire au traité de Tilsit, le pays fut organisé sous la protection de la Grande Armée et appelé d'abord « Pologne prussienne », puis « Pologne conquise sur le Roi de Prusse », et gouvernée par une commission ad-hoc.

L’Angleterre et la « Quatrième coalition »

L'on considère généralement la Russie, la Prusse, l'Angleterre et la Suède comme les membres de la Quatrième Coalition. Cependant cette coalition ne fut pas très tangible jusqu'au printemps 1807. Jusqu'à cette époque, l'Angleterre, pour différentes raisons, ne s'investit pas vraiment. Pour commencer, la période préalable à la bataille de Iéna, l'Angleterre et la Prusse s'affrontaient, conformément au traité franco-prussien de Paris signé en février 1806. Alors que la Prusse semblait s'engager dans une guerre contre la France, en août-septembre 1806, la Russie et l'Angleterre entreprenaient des négociations secrètes, et le diplomate prussien, le baron von Jacobi, rencontrait Lord Howick. Suivant les suggestions d'Alexandre, Frédéric Guillaume essayait d'établir des ponts avec la Grande-Bretagne (10), en rouvrant aux bateaux anglais les ports hanséatiques, que la Prusse avait dû fermer au commerce anglais en signant le traité de février 1806 avec la France, mais cette ouverture resta sans effet immédiat. Comme Frédéric Guillaume l'écrivit, dans la même lettre, toute évocation de la question du Hanovre aurait fait échouer les négociations sur-le-champ. Au cours des entretiens, le ministre britannique Grenville n'avait pas été très disert et avait refusé tout d'abord d'approuver l'idée prussienne d'une Confédération des États allemands du Nord – même si cela représentait une barrière aux intérêts français dans cette région.
Grenville voulait que la Russie soutienne la demande britannique sur le Hanovre, en échange de l'aide britannique en faveur de la Prusse. La Russie refusa de soutenir une telle demande. Le 20 septembre 18006, la Prusse offrait le Hanovre, à l'Angleterre. Mais en réalité, elle n'était guère en situation d'honorer une telle proposition concernant un territoire occupé par les troupes françaises. L'Angleterre réagit avec précaution, en envoyant Lord Morpeth comme ambassadeur en Prusse sans instructions pour encourager les Prussiens (11).

Les Anglais firent la sourde oreille aux demandes prussiennes, dans la mesure où, comme le souligna Grenville, ces requêtes ne faisaient aucunement partie d'un traité de subsides qui aurait déterminé des compensations réelles pour l'Angleterre. (Voir ci-dessous le Memorandum de Zastrow) Le 20 octobre, six jours après Iéna, l'Angleterre offrit à la Prusse la promesse d'associer leurs forces sur la côte pour créer diversion, mais en soulignant que, compte tenu de la venue de l'hiver, et de l'incertitude de l'issue de la question du Hanovre, une aide à grande échelle n'était pas envisageable.

L'Angleterre proposa aussi à la Prusse la possibilité d'émettre un emprunt de £ 500 000 mais qui ferait partie d'un futur traité.

De fait, les politiques anglais pensaient que le Trésor prussien n'était pas tombé entre les mains des Français mais comprenait encore £2 millions – l'envoyé anglais Hutchinson fut chargé de vérifier cela en novembre, et pouvait proposer à la Prusse des bons du Trésor pour un montant de £200 000, mais seulement dans le cas d'une absolue nécessité (12).

Cette attitude peu secourable était motivée non seulement peut-être par une certaine joie de voir souffrir le voleur de Hanovre, mais aussi par des craintes de surexposition financière (13).
 
Windham avait observé fin septembre qu'ils ne pouvaient envoyer que peu de chose, et qu'ainsi ils ne feraient que peu de bien. En outre, il était si opposé à une aide à la Prusse, que, lors des discussions concernant une possible expédition continentale, il surévalua délibérément le coût des transports afin de tuer dans l'oeuf toute tentative du Premier ministre Grenville d'être généreux envers la Prusse. La Grande-Bretagne n'avait envoyé encore aucune aide en décembre, quand dans le même temps le Tsar écrivait en faveur d'une diversion dans le Nord de l'Europe, par l'envoi d'une grande expédition sur les côtes françaises ou hollandaises (14). Il était évident que l'Angleterre n'était pas prête à prendre une part active aux côtés de la Russie et de la Prusse contre la France (15). 

 
 

Conclusion

Comme le montre la bataille de Iéna, la campagne de Pologne est marquée par l'absence de toute participation effective de l'Angleterre. Napoléon a tout fait pour soulever le problème polonais mais sans proclamer le retour au royaume de Pologne. Il manoeuvra aussi pour dresser la Turquie contre la Russie afin de contraindre cette dernière à rejoindre le système continental. La Prusse et la Russie poursuivirent la guerre afin de venger à la fois Austerlitz et Iéna. Mais toutes les parties virent leurs actions entravées par l'hiver. Mener la guerre à ce moment de l'année était clairement risqué pour tout le monde.

Comme Napoléon le souligna lui-même, le 8 novembre, alors qu'il demandait de prendre tous les stocks d'alcool à Stettin, « les froids vont devenir vifs, et l'eau-de-vie peut sauver mon armée. (16) » 
Les troupes se déplaçaient au ralenti, et cela allait s'aggraver, les manoeuvres rapides s'avèreraient impossibles. Cela n'allait pas être une campagne facile, préfigurant, finalement sans surprise, l'effroyable bataille d'Eylau. Comme Daru le consigna dans ses mémoires, « c'est en quittant Berlin qu'il [Napoléon] s'est trompé de chemin. » (17).

 
Cet article fait partie de notre dossier spécial bicentenaire : Campagne de Pologne, Eylau (8 février 1807)  

Notes

Notes : 
(1) Voir notre article « Pourquoi Iéna ? »  
(2)  Sur la question des relations entre Alexandre Ier et Frédéric Guillaume, voir Paul Bailleu (éd.), Briefwechsel König Frierich Wilhelm's III und der Königin Luise mit Kaiser Alexander I, Leipzig: S; Hirzel, 1900, et tout particulièrement les lettres datées des 28 et 30 novembre 1806 (dans lesquelles Alexandre assurait le roi que tout serait engagé pour défendre la bonne cause), et la lettre du 23 novembre (par laquelle le roi de Prusse exprimait sa volonté de combattre jusqu'à la mort avec 140 000 soldats russes venus à son secours).
(3) Le 24e Bulletin de la Grande Armée révèle ainsi : « Les Anglais n'ont pas voulu faire la paix ; ils la feront ; mais la France aura plus d'États et de côtes dans son système fédératif. 31 octobre 1806, Correspondance, n° 11135.
(4) Dans sa lettre au Sultan Sélim, datée du 11 novembre 1806, il écrit : « Je les cherche et vais au-devant d'eux ».
(5) Correspondance, 4 novembre 1806, n° 11172.
(6) Correspondance, n° 11216 et n° 11232.
(7) Voir Thierry Lentz, (éd.) Napoléon et l'Europe, Fayard, 2005, p. 84-102.
(8) Correspondance citée in Lentz, op. cit., Grand-duc Nicolas Mikhaïlowitch, Kniazja Dolgorukie, Saint-Pétersbourg, 1901, p. 94-95.
(9)  Le 11 décembre, à Posnan, alors que des députés polonais rencontraient Napoléon, le future ministre de la Justice du Duché de Varsovie répondit à l'empereur qui lui avait demandé s'ils étaient des Varsoviens, « Nous sommes des Polonais qui viennent vous rendre des hommages », ce à quoi Napoléon répondit avec emphase « Oui, oui, vous êtes des Varsoviens. » Cité in Lentz, op. cit., p. 88-89.
(10) Lettre du 6 septembre 1806, in Paul Bailleu, Preussen und Frankreich von 1795 bis 1807. Diplomatische Correspondenzen / herausgegeben von Paul Bailleu, 1880-1887, Leipzig, vol. II, p. 424.
(11) C. D. Hall, British Strategy in the Napoleonic War, Manchester: Manchester University Press, 1992, p. 135.
(12) Hall, op. cit., p. 136.
(13)  Sur l'attitude “utilitaire” de Frédéric Guillaume vis-à-vis de l'Angleterre, voir les lettres des 23 juin et 6 septembre ci-dessous:
Lettre du 23 juin 1806, cité in Paul Bailleu, Preussen und Frankreich von 1795 bis 1807. Diplomatische Correspondenzen / herausgegeben von Paul Bailleu, 1880-1887, Leipzig,, vol. II, p. 474-475 :
« Je vous conjure par tout ce qui vous est sacré, Sire, d'employer tous vos moyens pour forcer le roi de Suède à rester tranquille. Vous ne pouvez croire combien cet état de choses est nuisible et préjudiciable à la bonne cause. N-p-n (sic) ne désire rien davantage que de me voir aux mains avec ce prince, il attend ce moment avec impatience, pour laisser dès cet instant un libre cours à ses projets ultérieurs sur le Nord de l'Europe, que je ne serai plus à même à réprimer et à repousser, si cette affaire odieuse et déraisonnable ne se termine au plus vite. En outre cet état des choses entrave toutes les mesures et tous les arrangements arrêtés depuis longtemps pour consolider mes forces financières et militaires, afin de pouvoir opposer en temps et lieu une barrière suffisante aux vues ambitieuses et incommensurables de mes nouveaux alliés. […]
Pour parler franchement, je vous dirai, Sire, que c'est l'Angleterre qui fomente encore toujours davantage cet esprit de vertige de cette tête exaltée et fanatique, uniquement dans la vue de nous brouiller tous et d'attirer par là l'attention des Français sur les affaires du continent, pour en agir d'autant plus arbitrairement sur mer et dans les autres parties du monde ; ce n'est absolument qu'en faveur de ce système que les affaires du continent intéressent l'Angleterre. »
Cette attitude va changer deux mois plus tard, seulement dans la mesure où de l'argent entre en jeu.

Lettre du 6 septembre 1806, cité in Bailleu, op. cit., vol. II, p. 552 :
“L'essentiel est d'agir, et pour me mettre en état de le pouvoir avec vigueur, il faut surtout que l'Angleterre m'offre de moyens prompts, suffisants, quittes à compter plus rigoureusement ensemble, quand des succès nous en laisseront le temps. »
Memorandum de Zastrow
“Sur la situation dans laquelle la Prusse se trouve aujourd'hui”, écrit à Memel le 16 janvier 1806, cité in Paul Bailleu, Preussen und Frankreich von 1795 bis 1807. Diplomatische Correspondenzen / herausgegeben von Paul Bailleu, 1880-1887, Leipzig,, vol. II, pp. 584-586 :
« Quant à l'Angleterre, elle s'est d'abord montrée disposée non-seulement à un raccommodement avec la Prusse, mais aussi à lui fournir des moyens pécuniaires pour soutenir la guerre, lorsqu'elle pouvait espérer d'en tirer des avantages réels ; mais depuis l'état d'affaiblissement auquel cette monarchie a été réduite, la conduite du cabinet britannique a singulièrement changé. Mylord Hutchinson, parti de Londres le 21 novembre, a remis à S.M. le Roi une lettre de son souverain du 14 octobre conçue dans des termes uniquement banals, et sans avoir rien articulé au sujet des subsides dont il a été question avant son départ entre le lord Howick et le baron de Jacobi ; il n'a pas même répondu jusqu'à ce moment sur le projet de traité qui lui a été remis le 28 décembre. Quelle espérance peut-on par conséquent tirer d'un tel procédé, et ne prouve-t-il pas suffisamment qu'étant dénué des moyens de continuer la guerre avec vigueur, ce plénipotentiaire tâche maintenant de décliner l'article des subsides, et il est même à savoir s'il y aura moyen de s'arranger avec lui au sujet d'un emprunt. D'après toutes ces considérations, il est évident que les chances les plus avantageuses qui pourraient résulter de la continuation de la guerre, à moins que d'autres puissances et surtout l'Autriche n'y entreviennent, ne produiraient toujours d'autre résultat pour la Prusse que de la ramener aux conditions déjà énoncées par Napoléon. »
(14) Voir Hall, op. cit., p. 137.
(15)Dans l'article 10 de son projet pour le traité de Charlottenburg, du 16 novembre, “S.M. le Roi de Prusse renounce à tout traité offensive qu'il aurait fait avec les puissances ennemies de la France et au traité éventuel qui aurait été fait avec l'Angleterre. » (italique par l'auteur de cet article)
(16) Correspondance, n° 11213.
(17) Cité in . J. Tranié, et J.C. Carmigniani, Napoléon et la Russie : les années victorieuses, 1805-1807, [Paris]: Copernic, 1980, p. 151.

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