La mélodie et les paroles auraient été écrites par le catholique britannique John Wade (d. 1786), vers 1750, mais en Europe continentale, à Douai, la ville vers laquelle Wade s’était enfui après l’échec de la rébellion de 1745 de Bonny Prince Charlie en Écosse. La mélodie de la ligne solo (écrite en notation plain-chant) et les mots latins ont été imprimés peut-être en 1751.
Le compositeur britannique de la fin du XVIIIe siècle, Samuel Webbe (un ami de Wade) a publié l’hymne à Londres en 1782 dans une version harmonisée dans An Essay or Instruction for learning the Church Plain Chant.
Presque simultanément à Londres, cette pièce était appelée « Hymne portugais » parce qu’elle avait été entendue à la chapelle de l’ambassade du Portugal dans les années 1780. Quant à la version française (Peuple fidèle), elle a été écrite en 1790 par le prêtre réfractaire Jean-François Borderies, soit à Anvers, soit à Londres.
Mais pourquoi tout cela est-il pertinent pour les passionnés de Napoléon ?
À l’insu de la plupart, l’Hymne portugais faisait partie du répertoire funéraire standard pour les fanfares militaires britanniques et américaines dans la première moitié du XIXe siècle : ainsi, il a été joué aux funérailles du duc de Wellington en 1852. Bien que cela puisse sembler étrange qu’un air si joyeux fut employé à des fins funèbres, le goût musical des gens d’autrefois est souvent mystérieux pour ceux qui adviennent après ! Le soldat britannique Francis J. Bellew, racontant son service militaire en Inde dans les années 1820, évoquait « les airs solennels de l’Adeste Fideles ou Hymne portugais, un air chantant, admirablement adapté à de telles occasions, et qui respire l’âme même. de mélancolie.” (“Memoirs of a Griffin”, in The Asiatic Journal or Monthly Register for British and Foreign India, China, and Australasia, vol. xxxviii New Series, May-August, 1842, p. 215.)
Un récit contemporain de Sainte-Hélène de l’exhumation du corps de Napoléon (1840) rapporte la deuxième procession funéraire de Napoléon comme suit :
« Vers quatre heures moins le quart, un coup de canon, tiré de l’Alarm House, indiqua que la procession quittait la tombe en route pour la ville. […] Vers cinq heures de l’après-midi, la procession atteignait la ville, […] La ville présentait une apparence très frappante à ce moment. Les enseignes anglaises hissées à Ladder Hill et James Town, et les drapeaux nationaux aux consulats étrangers flottant à mi-hauteur des mâts. […] Soudain, des airs de musique solennelle vinrent flotter dans l’air, et la procession entra lentement en ville […] L’orchestre de la Milice locale de Sainte-Hélène, joua[i]t la marche funèbre (Hymne portugais) […]. »(NARRATIVE OF PROCEEDINGS CONNECTED WITH THE EXHUMATION AND REMOVAL OF THE REMAINS OF THE LATE EMPEROR NAPOLEON / BY A RESIDENT printed for the proprietor by William Bateman. St. Helena – 1840, page 17-18)
Cette partition manuscrite d’un arrangement de cette pièce figurait parmi les souvenirs que le valet de chambre de Napoléon, Marchand, rapporta de l’expédition envoyée à Sainte-Hélène en 1840 pour rapatrier la dépouille de Napoléon en France lors du Retour des Cendres. (Ecoutez cette arrangement joué au piano).
À Paris, deux mois plus tard, le Requiem de Mozart accompagne l’Empereur jusqu’à sa dernière demeure, sous le Dôme des Invalides.
Joyeux Noël Napoléonien !
Peter Hicks
Décembre 2021
Peter Hicks est chargé d’affaires internationales à la Fondation Napoléon.
Écoutez cet arrangement de « l’Hymne Portugais », joué au piano par Peter Hicks, et découvrez des images du départ de Sainte-Hélène en octobre 1840, lors du Retour des Cendres.