Boussole de Napoléon Bonaparte à l’École royale militaire de Brienne

Période : Ancien Régime/Ancien Regime
Artiste(s) : Anonyme
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Boussole de Napoléon Bonaparte à l’École royale militaire de Brienne
Boussole de Napoléon Bonaparte à l'Ecole royale militaire de Brienne
© RMN-Grand Palais (musée des châteaux de Malmaison et de Bois-Préau) - Mathéus

Depuis son introduction sur le continent européen par les Arabes durant le Moyen-Âge, la boussole devient rapidement un objet essentiel aux expéditions maritimes et militaires bien qu’entourée d’une aura surnaturelle, presque magique. Au XIIIe siècle, le scientifique Pierre de Mauricourt étudie attentivement les principes physiques des aimants ; il est le premier à établir un lien entre la boussole et le magnétisme terrestre. En effet, Mauricourt découvre que l’aiguille de la boussole dessine des courbes longitudinales convergeant aux pôles lorsqu’elle est placée à proximité d’une pierre magnétisée. Les recherches n’ayant que peu évolué au cours des siècles suivants, l’utilisation de la boussole, jointe à celle des cartes – qui, elles, sont toujours plus précises –, s’avère cruciale pour tout navigateur ou militaire en quête de succès sur le terrain.
Au XVIIIe s., son usage est donc tout naturellement enseigné depuis longtemps dans les écoles militaires du royaume de France. Bonaparte en fait l’apprentissage à l’École royale militaire de Brienne à partir de 1779, à travers ses cours de fortification et de dessin de cartes. D’une conception relativement sommaire, fait de simples matériaux – bois, cuir et cuivre –, le modèle reçu par le jeune corse est similaire à celui distribué à tous les pensionnaires de l’école, à leur entrée dans l’établissement royal.

Le jeune Napoléon arrive à Brienne-le-Château le 15 mai 1779 alors qu’il est âgé d’à peine 9 ans, en vue de préparer le concours d’entrée à l’École militaire de Paris. Il doit son admission à Brienne à son père, Charles Bonaparte, qui, ayant réussi à faire reconnaître ses lettres de noblesse en 1771, obtient une bourse pour lui. La caution d’un membre de la haute noblesse étant également nécessaire à cette admission, Napoléon peut se prévaloir de celle du comte de Marbeuf, gouverneur de la Corse, ami de Charles et protecteur des Bonaparte.
Les conditions d’accueil sont très rudimentaires et l’encadrement tout aussi strict. Les seules visites autorisées par l’administration ont lieu au parloir. En dehors de ce seul échange direct avec l’extérieur, les pensionnaires se voient interdire de quitter l’école, exception faite des sorties collectives du dimanche lors de la belle saison.

De ces cinq années de Napoléon à Brienne, très peu de témoignages fiables sont parvenus jusqu’à aujourd’hui, si bien que sa scolarité champenoise constitue l’une des périodes les plus méconnues de sa vie. Beaucoup de récits affabulateurs, mots apocryphes et autres anecdotes panégyriques, rédigés sous le Consulat et l’Empire, rendent difficile la distinction entre vrai et faux.
Une fois les éléments légendaires mis de côté, il apparaît que le jeune Napoléon connaît quelques difficultés d’intégration. Au bonheur de la chaleureuse liberté méditerranéenne de Corse succèdent les froides et austères cellules de Brienne… Rapidement, il subit les brimades insistantes de ses camarades sur son accent et son français, toujours empreint de nombreux italianismes. Lorsqu’on lui demande de se présenter, par exemple, il répond qu’il se prénomme « Napolioné », que ses condisciples transforment en « la paille au nez » (Louis Antoine Fauvelet de Bourrienne, son condisciple à Brienne, le rapporte dans ses mémoires). Son amour pour son île natale, son appétit insatiable pour la lecture ainsi que son esprit parfois bagarreur font de lui un élève aussi solitaire que taciturne.

Napoléon, devenu empereur des Français, conservera toutefois toute sa vie un souvenir tendre empli de reconnaissance pour l’école militaire et la petite ville de Champagne. Preuve en est la somme faramineuse d’un million de francs qu’il décide de lui léguer dans son testament rédigé à Sainte-Hélène.
La ville de Brienne-le-Château, où il a failli tomber, pris à partie par un détachement de cosaques lors de la fatidique campagne de France de 1814, est ainsi inéluctablement liée au destin de l’Empereur, de sa construction intellectuelle d’adolescent jusqu’à la chute de son Empire.

Eymeric Job
Juin 2019

Cette notice fait également partie du dossier thématique « 1769-1793 : la jeunesse de Napoléon Bonaparte »

Date :
vers 1779
Technique :
Bois, cuir, cuivre et fer
Lieux de conservation :
musée des châteaux de Malmaison et de Bois-Préau
Crédits :
© RMN-Grand Palais (musée des châteaux de Malmaison et de Bois-Préau) - Mathéus
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