Habit de grand uniforme de général de division du général comte Bertrand

Période : Directoire-Consulat-Ier Empire/Directory-Consulate-1st Empire
Artiste(s) : Anonyme
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Cet uniforme, déposé par le musée de l’Armée au musée de l’Empéri, à Salons-en-Provence, fait partie à l’origine de la collection privée Brunon, collection majeure dans le domaine de l’histoire de l’armée française, de l’Ancien Régime à la Grande Guerre. Il appartenait au général Bertrand, compagnon dans les guerres et dans l’exil de Napoléon Ier.

Habit de grand uniforme de général de division du général comte Bertrand
Habit de grand uniforme de général de division du général comte Bertrand © Musée de l'Empéri/Musée de l'Armée

Bertrand, militaire chevronné et grand maréchal du Palais

Henri Gatien Bertrand est un fidèle de Bonaparte depuis la première campagne d’Italie. Appréciant ses capacités dans le domaine du génie – Bertrand est un mathématicien très compétent en particulier dans le domaine de la géométrie -, le futur empereur se l’est attaché tout au long des grandes campagnes qu’il mène en Europe et se repose souvent sur cet homme discret et brillant pour des missions de reconnaissance.
Lorsque le général Duroc, duc de Frioul, meurt en mai 1813, atteint par un boulet de canon lors de la dernière campagne d’Allemagne, Napoléon nomme Bertrand le 18 novembre suivant pour le remplacer dans sa fonction de maréchal du Palais, tâche requérant un homme proche et indispensable. Désormais Bertrand ne quittera plus l’Empereur, jusqu’à son dernier souffle.

Lors des exils successifs de Napoléon, à Elbe comme à Sainte-Hélène, le grand maréchal du Palais veille toujours à l’ordre et au bon maintien de la Maison de l’Empereur. Le souverain déchu tient en effet énormément à ce que l’étiquette de la cour soit respectée, même dans sa dernière demeure, Longwood House, et ce, parmi un entourage pourtant fort réduit. Suivant le protocole et le cérémonial instaurés en 1808, à l’apogée de l’Empire, Bertrand s’exécute, tant bien que mal, dans une atmosphère à mille lieues des dorures des grands palais napoléoniens.
En parallèle, bien que tenant à protéger sa vie de famille dans un huis-clos parfois étouffant, le grand maréchal du Palais s’astreint à rédiger à partir de 1816 des cahiers où il prend note des événements au jour le jour se déroulant à Sainte-Hélène. La routine de la vie quotidienne sur l’île aura raison de la tenue régulière de ces écrits, malgré le caractère d’ordinaire très scrupuleux de leur rédacteur. Bertrand ne reprendra ce travail que quand il sentira la fin de la vie de Napoléon approcher, au début de l’année 1821. Il n’en parlera que dans les derniers jours à l’Empereur, comme le souligne François Houdecek :

Ce travail de mémorialiste qu’il s’est assigné seul, Bertrand l’a tenu secret de Napoléon et de ses compagnons d’exil. Ce n’est que le 30 avril 1821 qu’il confessa son travail à l’Empereur, qui n’était plus que l’ombre de lui-même : « J’aurais à vous parler d’une chose que je ne puis dire qu’à vous, si Votre Majesté peut m’entendre. – Eh bien, dites. – J’ai tenu note de vos conversations, comme Votre Majesté a semblé le désirer. J’ai fait un journal de ces cinq à six ans. Ce sont des notes très curieuses pour la postérité, de vos conversations sur les événements, les hommes, les ouvrages que vous avez lus, la nation, une grande variété d’objets. […] Il a dit : “Ah !”, a regardé avec un œil assez égaré, a fermé les yeux et n’a plus répondu. » Il était trop tard…

► Découvrir les Cahiers de Sainte-Hélène du général Bertrand, publication intégrale inédite présentée par François Houdecek (Perrin, 2021)

Au décès de Napoléon, c’est à Bertrand, en tant que grand maréchal du Palais, que revient la tâche d’organiser les funérailles de l’Empereur. Il s’y attache avec l’aide du comte de Montholon, premier exécuteur testamentaire ; tous deux se heurtent à la volonté du gouvernement britannique de limiter tout honneur funèbre à Napoléon à celui d’un « officier général du plus haut rang ».

De retour en France en octobre 1821, Bertrand se retire à Châteauroux, sa ville natale, et se consacre à la mise en forme de ses Cahiers, notamment pour se défendre dans des affaires qui l’opposent à la famille impériale au sujet du testament de Napoléon. Nommé commandant de l’École polytechnique – école dont il a contribué à la fondation – par Louis-Philippe en 1830, il participe à l’aventure du retour des Cendres : il place l’épée d’Austerlitz sur le cercueil de l’Empereur. Après son décès le 31 janvier 1844, sa dépouille est placée trois ans plus tard aux Invalides, au seuil du tombeau de Napoléon Ier.

Un uniforme pièce maîtresse d’une collection exceptionnelle

En 1967, Jean Brunon fait don de sa collection, dont fait partie cet uniforme de Bertrand, à l’État et à la ville de Salon-de-Provence ; elle est d’abord dévolue au musée de l’Armée. Elle rejoint le cadre du château de l’Empéri en 1976. Le musée de l’Empéri consacre ainsi aujourd’hui huit de ses vingt-sept salles à l’armée du Premier Empire, ce qui en fait le plus grand ensemble napoléonien rassemblé par un collectionneur privé. Au décès de Jean Brunon en 1982, son fils Raoul a poursuivi la mise en valeur de la collection au château de l’Empéri.

Marie de Bruchard, avril 2021

► Cet uniforme est visible au musée de l’Armée, le temps de l’exposition Napoléon n’est plus (jusqu’au 31 octobre 2021). Le catalogue de l’exposition, dont est tirée la photographie de l’uniforme, est publié par Gallimard.

Date :
Vers 1807-1815
Technique :
Drap de laine. soie, cannetille et broderie d'or, métal doré
Lieux de conservation :
Salon-de-Provence, musée de l'Empéri (dépôt du musée de l'Armée), anciennes collections Jean et Raoul Brunon
Crédits :
© Musée de l'Armée
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