Ce manuscrit de 4 volumes et de près de mille pages rédigé par le maréchal des logis Chevalier est l’oeuvre d’une vie. L’auteur débute sa rédaction vers 1830 et pendant prés de vingt année il met en forme ses notes accumulées au cours de sa carrière et illustrées de sa main. Il nous indique d’ailleurs dans son introduction, qu’il rédige ses mémoires dans le but de les éditer. Le récit s’articule selon 3 thématiques qui se confondent dans le texte ; tout d’abord les « Mémoires » qui relatent la vie de l’auteur en dehors de ses campagnes militaires; ensuite les « Voyages » qui livrent les observations de Chevalier sur les pays traversés, leurs habitants et leurs mœurs ; enfin, les « Campagnes en Europe » qui relatent sa carrière militaire avec force de détails et d’anecdotes ; cette dernière partie est d’ailleurs la seule à avoir jamais été éditée*.
En 1795, à l’âge de quinze ans, Jean Michel Chevalier entre comme ouvrier armurier à la Manufacture Nationale d’armes de Versailles. En septembre 1800, il s’engage au sein de la 7e demi-brigade d’artillerie de marine puis après maintes péripéties, en janvier 1801, il rejoint le 9e régiment de chasseurs à cheval. Il s’en suit six mois d’entraînement au dépôt du régiment à Vienne (en Isère) et un rapide départ pour l’Italie ou il sert six longues années. Il va rapidement monter en grade et ainsi disposant d’informations plus précises et de plus de temps, il commence à prendre des notes et faire des croquis.
En 1806, Chevalier et son régiment participent à la campagne de Naples et combattent l’insurrection calabraise, il y est blessé et remarqué pour sa bravoure. L’auteur nous livre un témoignage exceptionnel sur le quotidien des troupes françaises lors de cette période et particulièrement sur la cruauté de cette guerre. Ayant perdu ses dessins en Calabre, il se peut que les portraits d’insurgés reproduits ici aient été exécutés a posteriori, rien ne distingue en effet ces hommes et ces femmes, des brigands calabrais qui fascinent artistes et écrivains tout au long du XIXe siècle, de Géricault à Hébert et de Stendhal à Hugo.
Le 3 novembre 1808, Chevalier est promu au régiment des chasseurs à cheval de la Garde Impériale. Il sert en Autriche et participe aux batailles d’Essling et de Wagram, qu’il décrit avec précision. En 1810 et 1811, son régiment escorte l’Empereur dans ses voyages diplomatiques à travers l’Europe, chevalier nous livre alors de nombreux détails sur les pays qu’il traverse. En 1812, il participe à la tragique campagne de Russie, de la marche sur Moscou jusqu’à la retraite il nous livre une grande quantité de détails, même si nous pouvons affirmer qu’il n’était pas présent à tous les événements qu’il décrit. Il combat ensuite en Prusse en 1813 et a l’honneur de porter l’aigle du régiment aux batailles de Lepizig et de Hanau. Pendant la campagne de France, il est à La Rothière, à Montmirail, à Arcis-sur-Aube… En 1815, il suit l’Empereur à Waterloo, puis est mis en retraite au retour des Bourbons. Il se fixe à Choisy-le-Roi puis se marie en 1818 avec Henriette Pasquier dont il aura trois fils. En 1842, il vient se fixer à Paris où il fréquente les anciens soldats de l’Empereur et participe aux réunions de la Société des débris de l’armée impériale.
Il devient veuf en 1853, sollicite une place aux Invalides, ou il est admis en 1857. Il s’y éteint en 1865 à l’âge de 85 ans.
*Seule une publication partielle a été réalisée par Jean Mistler et Hélène Michaud, conservateur de la Bibliothèque Thiers et du Musée Masson.
Thierry Vette, juillet 2013
À voir, deux documents issus de ces mémoires :
– Costume des guides chasseurs à cheval de la Garde impériale
– Sous-Officier des guides chasseurs à cheval de la Garde impériale
Manuscrit présenté au Musée de l’Armée, Paris, pour l’exposition Napoléon et l’Europe. (27 mars-14 juillet 2013)
► consultez le dossier thématique « Vivre et mourir dans la Grande Armée » (2023)