Portrait de Napoléon (1809)

Artiste(s) : LEFEVRE Robert
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Parmi les peintres officiels de l’Empereur, de très célèbres noms font immédiatement écho à nos oreilles du XXIe s. Jacques-Louis David, le baron François Gérard, Jean-Auguste-Dominique Ingres ou encore le baron Antoine-Jean Gros se partagent la tête d’affiche. Mais il est un peintre quelque peu oublié de nos mémoires malgré ses nombreux portraits : Robert Lefèvre (1755-1830). Élève de Jean-Baptiste Régnault (peintre de La Liberté ou la Mort et, plus tard, de la représentation du mariage de Jérôme Bonaparte), il s’essaie d’abord à la peinture d’Histoire avant de se consacrer davantage aux portraits. Grâce à ses participations remarquées aux Salons, où il y expose dès 1791, il est très rapidement contacté, dès 1800, par Bonaparte pour exécuter les représentations du Premier Consul.

Portrait de Napoléon (1809)
Portrait de Napoléon, par Robert Lefèvre (1809) © Fondation Napoléon / Thomas Hennocque

Au tournant du siècle, Lefèvre s’oppose au pastelliste Joseph Boze sur un différend important. Ce dernier revendique l’entière paternité des réalisations pour lesquelles les deux artistes ont collaboré. L’analyse a posteriori des styles d’exécution permet aujourd’hui d’authentifier avec certitude la main de Robert Lefèvre. Mais à l’époque, cette controverse fait l’objet de débats par articles interposés dans le Moniteur universel, se concentrant plus particulièrement sur le portrait de Mirabeau (aujourd’hui conservé au Musée Granet d’Aix-en-Provence) et sur le tableau représentant Le général Bonaparte et son chef d’état-major, le général Berthier, à la bataille de Marengo (appartenant aux collections de la Fondation Napoléon et actuellement déposé au musée de l’Armée).
À partir de 1803, Lefèvre bénéficie de l’appui de Vivant Denon, alors directeur général des Musées et administrateur des manufactures d’art impériales. En tout, Denon lui commandera plus de quarante portraits distincts de Napoléon ! Robert Lefèvre peint l’Empereur en pied ou en buste, principalement de trois-quarts et en uniforme. De la main de l’artiste, il existe néanmoins quelques portraits officiels en costume de Sacre (dont un est conservé au château de Versailles). Napoléon apprécie particulièrement les traits et la technique utilisés par Lefèvre : il trouve ses représentations très ressemblantes. L’enthousiasme de l’Empereur confère au peintre un statut privilégié de peintre de la cour. Bientôt, d’autres membres de cette dernière lui passent commande dans la foulée de Napoléon : Madame Mère, Pauline Borghèse ou encore François-Nicolas, comte de Mollien, … Leurs portraits, parmi les plus beaux exécutés par Lefèvre, sont tous les trois conservés au château de Versailles. La richesse des détails des vêtements portés ainsi que l’authenticité des traits des sujets témoignent d’un souci de précision remarquable de la part de l’artiste.

Le portrait de Napoléon, conservé dans les collections de la Fondation Napoléon, a été effectué en 1809. À cette date, l’empereur a quarante ans. Ses traits, son regard témoignent de sa pleine maturité et de sa volonté. Représenté en buste, tourné aux trois-quarts droit, il porte l’uniforme bleu reconnaissable de colonel des grenadiers à pied de la Garde impériale. Un gilet blanc complète sa tenue. Il arbore fièrement sur sa poitrine le ruban de la Légion d’honneur, ainsi que la croix et la plaque de l’ordre qu’il a créé en 1802 lorsqu’il était Premier Consul. Le fond du tableau est uni et d’une grande sobriété, pour mieux laisser la prépondérance au visage de Napoléon.

Un tableau similaire peint par l’artiste est conservé au château de Versailles. L’Empereur y est présenté dans la même posture, en buste. L’unique différence tient à l’absence du ruban rouge de la Légion d’honneur sur cette version.
Il est par ailleurs possible de rapprocher ce portrait des collections de la Fondation Napoléon de celui peint par Lefèvre pour l’Hôtel de ville de Paris, aujourd’hui conservé au musée Carnavalet. Napoléon y porte l’uniforme vert de colonel de chasseur à cheval de la Garde impériale, se trouve représenté dans la même position, mais cette fois en pied. Aux distinctions présentes sur notre portrait s’ajoutent la décoration de la Couronne de fer et son ruban orange. Napoléon adopte une posture dynamique, de chef de guerre : l’épée à son côté est mise en avant, son pied droit s’avance et sa main droite est posée sur des cartes, comme s’il allait donner un ordre stratégique. Sur la table de travail, on devine également son célèbre chapeau réalisé par Poupard, ainsi que sa paire de gants en fine peau d’une couleur claire. Il semble prêt à enfourcher son cheval, ce qui ajoute du dynamisme à ce portrait. Enfin, Napoléon se tient devant l’un de ses célèbres trônes réalisés par l’ébéniste Jacob Desmalter. Grâce à son souci de la précision et de l’authenticité, la réputation de Robert Lefèvre ne fait que croître tout au long de l’Empire et au-delà, sous la Restauration, période à laquelle il obtient la Légion d’honneur (en 1820), et le titre de premier peintre du roi Louis XVIII puis du roi Charles X.

Elodie Lefort, responsable des collections de la Fondation Napoléon
mars 2021

► Dans le cadre du bicentenaire de la mort de Napoléon Ier, cette œuvre est exposée aux Archives nationales durant l’exposition « Dessiner pour Napoléon. Trésors de la secrétairerie d’État impériale », du 10 mars au 19 juillet 2021, une exposition avec le label « 2021 Année Napoléon ».

► Consultez le catalogue des œuvres des collections de la Fondation Napoléon.

Date :
1809
Technique :
Huile sur toile
Lieux de conservation :
Fondation Napoléon, INV 91
Crédits :
© Fondation Napoléon / Thomas Hennocque
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