Cet article de Claire Bommelaer, paru dans Le Figaro du 14 mai 2013, revient sur la presse à sceaux dite « machine Cambacérès ». Voici le contenu de l’article.
« Pour les besoins d’une exposition, le ministère de la Justice a prêté la machine à sceller, dite machine Cambacérès du nom de son commanditaire.
La machine, commandée par Cambacérès en 1810, n’était jamais sortie du ministère de la Justice. Pour l’exposition «Le Pouvoir en acte» organisée par les Archives nationales, la presse à sceller a tout de même traversé quelques arrondissements parisiens sous haute surveillance. Jusqu’au 24 juin, elle trônera en majesté aux Archives, rappelant que, depuis des siècles, le pouvoir et l’autorité des rois, des empereurs ou de la République furent et sont matérialisés par des actes scellés à l’argile, puis à la cire. Jusqu’au XVIe siècle, tous les grands actes sont marqués, et donc authentifiés, grâce à un sceau. Childebert, roi mérovingien, était même allé jusqu’à mettre un de ses cheveux dans l’un d’entre eux, en gage d’authenticité. La cire, une fois chauffée, est très malléable – elle est un des symboles de la chair. Une fois sèche, elle est supposée infalsifiable et traverse les années sans s’altérer.
L’imagerie populaire la veut rouge, comme les cachets des lettres que l’on voit dans les films. Mais c’est une erreur: les sceaux importants sont de couleur neutre, voire verte. Depuis le XIIe siècle, ils pendent en bas du document officiel – l’important étant de faire ressortir la figure du roi, de l’empereur et, plus tard, de la République.
Rite très cadré La machine Cambacérès, décorée d’un serpent doré, fut construite afin de marquer l’autorité et le faste de l’empereur Napoléon Ier. «À l’époque, déjà, la signature d’un puissant en bas d’un document officiel avait une aussi grande valeur de preuve. Mais l’Empereur voulait accentuer le cérémonial de l’Empire», explique Elsa Marguin-Hamon, conservateur et commissaire de l’exposition. Aujourd’hui, on ne scelle plus que les constitutions et les traités, selon un rite très cadré. Le sceau officiel républicain est grand (12,5 cm de diamètre), et sa matrice précieusement conservée aux Archives. D’un côté, la figure de la Liberté, assise, près d’une urne symbolisant le suffrage universel. De l’autre, une couronne de chêne et d’olivier, liée par une gerbe de blé.
La presse détenue par la Chancellerie a été utilisée pour la dernière fois en 2008, par Nicolas Sarkozy, lors du scellement de la loi du 23 juillet 2008, dite «de modernisation des institutions de la Ve République». La fois précédente, on s’en servit devant Charles de Gaulle, pour la cérémonie de scellement du texte de la Ve République. »
► Consultez notre Dossier thématique consacré à Jean-Jacques Régis de Cambacérès (1753-1824)