Les grands tableaux du 2nd Empire

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  • La Deuxième République

    Artiste(s) : MEISSONIER Ernest

    La barricade rue de la Mortellerie, juin 1848 dit Souvenir de guerre civile
    Paris, musée du Louvre

    Enrôlé en tant que capitaine d’artillerie de la Garde nationale, Meissonier a vécu de près les journées de  juin 1848 pendant lesquelles les troupes du général Cavaignac écrasèrent les insurgés parisiens. Il en a  livré un témoignage quasi journalistique dans cette petite toile. Son observation d’un réalisme implacable a l’objectivité d’un daguerréotype.  « C’est horrible de vérité », commente Delacroix.
    Les nombreuses déceptions apportées par la révolution de 1848 et la  IIe République vont permettre à Louis-Napoléon Bonaparte de jouer un rôle sur la scène politique française. Il rallie à sa cause la bourgeoisie effrayée par les désordres révolutionnaires, la paysannerie plutôt hostile à la République mais aussi une partie du monde ouvrier confiant en son programme social. Le 10 décembre 1848, il est élu président de la République. Mais la barricade de Meissonier préfigure une autre répression brutale, celle qui suit le coup d’Etat du 2 décembre 1851, marquant d’une souillure originelle le futur régime impérial.

  • Napoléon III Empereur des Français

    Artiste(s) : FLANDRIN Jean-Hippolyte

    Portrait en pied de Napoléon III, en uniforme de général de brigade, dans son Grand Cabinet aux Tuileries
    Versailles, musée national du château

    Le prince-président est devenu empereur des Français sous le nom de Napoléon III. Dès 1853, il confie l’exécution de son portrait à Hippolyte Flandrin, un élève d’Ingres spécialisé dans la peinture religieuse. Flandrin brosse un admirable portrait psychologique qui, en dépit de son caractère officiel, révèle de façon pénétrante la personnalité complexe de l’homme. L’artiste a même su saisir le regard trouble de l’empereur. « C’est assurément le premier portrait « vrai » que nous ayons de S.M. » déclare T. Gautier.  Cette vérité déplut à Napoléon III au point que la commande fut annulée. L’empereur préférait le portrait en pied de Winterhalter, tableau aujourd’hui disparu, à l’allure plus noble et à l’idéalisation flatteuse. Napoléon III finit par accepter la toile de Flandrin. Présentée à l’Exposition universelle de Londres en 1862 puis au Salon de 1863, elle rencontra un grand succès auprès du public.

  • L’impératrice Eugénie

    Artiste(s) : WINTERHALTER Franz-Xaver

    L’impératrice Eugénie entourée de ses dames d’honneur
    Compiègne, musée du Second Empire

    Portraitiste attitré des cours européennes, Winterhalter devint le peintre favori du couple impérial. Dans cette  célèbre composition, il s’inspire des scènes bucoliques du XVIIIe siècle et installe la souveraine et ses suivantes dans une clairière ombragée. En dépit du caractère champêtre de la scène, ces dames sont revêtues de leurs plus belles toilettes de bal, donnant ainsi prétexte à un traitement virtuose des étoffes. Soie, tulle, mousseline, taffetas, dentelles et rubans semblent les véritables sujets de cette peinture à la gloire des crinolines. Mais si les portraits manquent de profondeur psychologique, l’oeuvre donne une idée précise du faste affiché à la cour. C’est ce même faste qui préside à l’organisation à Paris de l’Exposition universelle de 1855, première grande manifestation officielle du régime impérial et étape décisive vers sa reconnaissance internationale. Exposé dans le salon d’honneur, le tableau de Winterhalter y est, censure oblige, discrètement vilipendé par la critique, mais son succès populaire est énorme et jamais démenti depuis lors.

  • La guerre de Crimée

    Artiste(s) : PILS Isidore

    Débarquement des troupes alliées en Crimée en 1854
    Ajaccio, musée Fesch

    Encouragé par le gouvernement, les peintres d’histoire du Second Empire se font les chroniqueurs des campagnes militaires. La Crimée, l’Italie, l’Algérie, le Mexique constituent pour eux des terrains d’études privilégiés et leurs oeuvres, que le public vient contempler au Salon, ont une forte dimension documentaire. Au Salon de 1857, l’une des salles d’honneur est entièrement occupée par les épisodes de la guerre de Crimée. Toutes ces toiles mettent moins en scène les actes d’héroïsme isolés que la complexité de la logistique et des nouvelles techniques de combat. Ici, Pils évoque la vie quotidienne des armées. Tandis que la flotte débarque au loin, les chefs militaires parmi lesquels figure le prince Napoléon, le fils de Jérôme, sont traités par le peintre sur un rang d’égalité avec les simples soldats.

  • L’Empereur à Solférino

    Artiste(s) : MEISSONIER Ernest

    Napoléon III à la bataille de Solférino, 24 juin 1859
    Compiègne, musée du Second Empire

    Dans les premières années du Second Empire, Meissonier n’était connu que pour des scènes de genre pastichant la peinture hollandaise. En lui achetant un tableau qu’il offre à la reine Victoria en 1855, Napoléon III consacre sa gloire. Meissonier est attaché à l’Etat-major impérial en Italie en 1859 et suit toutes les opérations de Magenta et de Solférino. Il se lance alors dans la peinture d’Histoire.
    Ce Napoléon III à Solférino est le fruit d’un long travail. Celui que l’on surnomme le «génie de l’infiniment petit » prépare aussi minutieusement ses tableaux qu’il les réalise. Il retourne sur les lieux de la bataille et passe une année à portraiturer les militaires de l’escorte impériale. Ce n’est qu’au Salon de 1864 qu’il expose enfin la toile. D’une exactitude photographique, elle semble ignorer la bataille pour se concentrer sur l’empereur qui contemple le combat « comme un joueur étudie de sang froid son échiquier ».

  • Napoléon III et Haussmann

    Artiste(s) : YVON Adolphe

    Napoléon III remet au baron Haussmann le décret d’annexion à Paris des communes suburbaines
    Paris, musée Carnavalet

    À Paris, la politique de Napoléon III en matière d’aménagement urbain fut ambitieuse. Il réussit à la mettre en œuvre grâce à un auxiliaire de talent, le baron Haussmann, préfet de la Seine. Le 1er janvier 1860, 11 communes sont annexées : Auteuil, Passy, Les Batignolles, Montmartre, La chapelle, La Villette, Belleville, Charonne, Bercy, Vaugirard et Grenelle. La capitale française passe de 12 à 20 arrondissements et de 3 288 à 7 088 hectares.
    Commandé par le Conseil municipal pour commémorer l’événement, ce tableau n’eut pas l’heur de plaire et fut refusé pour son manque de grandeur. Yvon exécuta une seconde toile mettant en scène le couple impérial, le préfet et le Conseil municipal en tenue de cour. L’œuvre ayant brûlé dans l’incendie de Tuileries en 1871, c’est la version refusée qui témoigne aujourd’hui de l’événement.

  • Les grands travaux

    Artiste(s) : NITTIS Giuseppe de

    Percement de l’avenue de l’Opéra
    Paris, musée Carnavalet

    Les transformations entreprises par Haussmann ont complètement remodelé la capitale. La société du Second Empire assiste à la disparition  du vieux Paris au profit d’une ville aérée, moderne, percée de larges artères ouvrant comme ici de belles perspectives sur les monuments nouvellement édifiés (la silhouette de l’Opéra se détache à gauche, dans le lointain).  Cette toile datée de 1878 illustre bien l’ampleur des travaux qui continuèrent après la chute de l’Empire. Si la construction du chef-d’oeuvre architectural de Garnier fut décidée en 1860,  la façade ne fut officiellement inaugurée que le 15 août 1867 et l’ensemble du bâtiment après la chute de l’Empire en 1875. De même, le percement de l’avenue de l’Opéra (alors dénommée Napoléon), débuté en 1864, ne s’acheva que quinze ans plus tard.

  • La "fête impériale"

    Artiste(s) : CARPEAUX Jean-Baptiste

    Bal aux Tuileries
    Compiègne, musée du Second Empire

    Les Expositions universelles de 1855 et de 1867 ont fortement contribué à répandre une image prestigieuse de la France impériale. En 1867, tous les souverains d’Europe sont rassemblés à Paris, Alexandre II, François-Joseph, Louis II de Bavière, Guillaume Ier de Prusse… Carpeaux réalise alors  une série de peintures évoquant les fêtes et les bals donnés à cette occasion. Familier des souverains dont il exécute d’admirables bustes, Carpeaux n’est pas juste un grand sculpteur ; il est aussi un peintre d’une étonnante liberté.  Brossant de rapides esquisses inspirées par des sujets contemporains, Carpeaux révèle son goût de la matière par le travail d’une pâte épaisse et expressive.
    Ici, l’impératrice Eugénie fait son entrée au bras du tsar. C’est un éblouissement visuel, une sorte d’instantané où la vibration de la lumière et les violentes notes de couleur traduisent à merveille l’atmosphère de fête. L’aspect inachevé, le refus d’une description trop précise des personnages et des lieux renforcent cette impression de vision onirique et fugitive.

  • L’exécution de Maximilien

    Artiste(s) : MANET Edouard

    L’exécution de Maximilien
    Manheim, Stadtisch Kunsthalle

    Tandis que l’Exposition universelle de 1867 triomphe à Paris, une nouvelle terrible vient assombrir la fête. C’est le 1er juillet, le jour même de la distribution des récompenses par le couple impérial, que parvient l’annonce de l’exécution de Maximilien, empereur fantoche mis sur le trône du Mexique par Napoléon III. Comme beaucoup de ses contemporains, Manet est très impressionné par l’événement. S’essayant au genre historique, il opte pour ce sujet d’actualité peu traité par les artistes en raison de la censure. S’inspirant directement du Tres de Mayo de Goya, condamnation sans appel d’une autre guerre napoléonienne, Manet choisit le moment où la tension dramatique est à son paroxysme : la mise à mort de Maximilien et des deux généraux Mejia et Miramon. Très attaché à ce tableau, Manet ne parviendra pas à l’exposer en public sous le Second Empire. La censure l’interdira.

  • L’inauguration du canal de Suez

    Artiste(s) : RIOU Edouard

    L’inauguration du canal de Suez
    Association du Souvenir de Ferdinand de Lesseps et du canal de Suez

    En novembre 1869, l’impératrice Eugénie se rend en Egypte pour présider les cérémonies d’inauguration du canal de Suez. Cousine de Ferdinand de Lesseps, Eugénie l’a soutenu durant toute la réalisation de ce gigantesque projet, défendant sa cause auprès de Napoléon III, et s’imposant tout naturellement comme la marraine du canal lors de l’inauguration. Lesseps l’avait surnommée  » l’ange-gardien du canal ».
    En peinture, l’orient est à la mode et, pour une fois, l’actualité permet d’évoquer sa magie. C’est à Port-Saïd que se déroule l’oecuménique cérémonie religieuse de la bénédiction. Trois tribunes sont dressées entre ciel, terre et mer. Le lendemain, le navire de l’impératrice prend la tête de la flottille pour la traversée du canal. A travers cette prestigieuse manifestation, la France impériale brille de ses derniers feux.

  • La chute du Second Empire

    Artiste(s) : MEISSONIER Ernest

    Les ruines des Tuileries
    Compiègne, musée du Second Empire

    Cette toile résume avec éloquence les événements historiques de 1870 et de 1871 : la chute du Second Empire, le siège de Paris et la Commune. Passant devant le palais des Tuileries incendié pendant la « semaine sanglante », Meissonier est saisi par les décombres de la salle des Maréchaux. Il distingue des inscriptions mutilées sur des restes de dorure : « rayonnants et intacts, les noms des deux victoires incontestées…Marengo !…Austerlitz ! ». Véritable vision d’apocalypse, le tableau qu’il exécute ensuite montre la destruction du palais officiel des rois et des empereurs français. A travers l’édifice éventré, le quadrige de l’arc de triomphe du Carrousel se détache au loin. « C’est la victoire qui s’en va sur son char qui nous abandonne ».

  • L’exil de la famille impériale

    Artiste(s) : FLAMANT E.

    La famille impériale à Chislehurst
    Fondation Napoléon, collection Martial Lapeyre

    La photographie prend un tel essor sous le Second Empire que beaucoup y voient une rivale de la peinture. Certains genres comme le portrait sont en effet sérieusement menacés par cette nouvelle technique. Le couple impérial continue à faire exécuter ses représentations officielles par des peintres mais, à partir de 1856 date de la naissance du prince impérial, il pose à maintes reprises pour les photographes.  Reproduits et diffusés en grand nombre, ces clichés sur lesquels les souverains sont le plus souvent figurés dans leur intimité, jouent un rôle efficace dans la propagande officielle.
    Après la chute de l’Empire, les membres de la famille impériale exilée en Angleterre continuent à « se faire tirer le portrait ». Un célèbre photomontage réalisé à partir de trois photographies individuelles les montre réunis dans un intérieur garnis de souvenirs napoléoniens.


    Sélection et textes : Karine Huguenaud

    Pour plus d’information, retrouvez ces tableaux dans la partie Iconographie de la Galerie.

    Crédits photographiques :
    RMN, CGFA, The Artchive, Fondation Napoléon.