Les grands tableaux du Ier Empire

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  • Bonaparte à Arcole

    Artiste(s) : GROS Antoine-Jean (Baron)

    Le général Bonaparte au pont d’Arcole, 17 novembre 1796
    Versailles, musée national du château

    Première image emblématique du mythe napoléonien, ce tableau exalte les vertus du chef militaire, celles qui s’incarnent dans le jeune général Bonaparte à la tête de l’armée d’Italie. Dans la réalité, le pont d’Arcole n’a pas été franchi. Qu’importe, l’artiste embellit l’épisode et le fait entrer dans la légende.
    Fougue, courage, volonté émanent tout à la fois de cette peinture nerveuse et passionnée due aux pinceaux de Gros, jeune peintre qui assiste à la bataille d’Arcole et qui, par l’entremise de Joséphine, obtient quelques séances de pose de Bonaparte à Milan. C’est le sauveur providentiel que magnifie Gros, le conquérant héroïque qui entraîne ses troupes, étendard* et sabre à la main, pour arracher la victoire par sa seule bravoure.

    * Il s’agit du drapeau du 2e bataillon de la 51e demi-brigade de ligne (qui portait encore le numéro de la 99e demi-brigade dont la 51e était issue).

  • Bonaparte visitant les pestiférés de Jaffa

    Artiste(s) : GROS Antoine-Jean (Baron)

    Bonaparte visitant les pestiférés de Jaffa, 11 mars 1799
    Paris, musée du Louvre

    Ce chef-d’œuvre qui annonce le romantisme est une commande de Napoléon pour répondre aux rumeurs l’accusant d’avoir fait empoisonner des soldats français atteints de la peste lors de la campagne de Syrie. Réalisée et exposée en 1804, au moment de la création de l’Empire, cette œuvre de propagande prend alors une autre dimension. En touchant les plaies des malades au mépris de la contagion, Bonaparte s’inscrit dans la lignée des rois thaumaturges, guérisseurs d’écrouelles et intercesseurs entre Dieu et les hommes. L’évocation de ce pouvoir divin dans une scène qui se déroule en Terre sainte répond parfaitement à la volonté de Napoléon d’asseoir sa légitimité.

  • Le coup d’État de Brumaire

    Artiste(s) : BOUCHOT François

    Le général Bonaparte au Conseil des Cinq-Cents à Saint-Cloud, 10 novembre 1799
    Versailles, musée national du château

    La représentation la plus connue du coup d’État est une commande du roi Louis-Philippe pour le musée historique de Versailles, institution créée en 1837 dans un esprit de réconciliation nationale. Le tableau met en scène le moment le plus critique de l’événement. Bonaparte, conspué au Conseil des Cinq-Cents, bousculé, menacé, est finalement évacué de la salle des séances par quelques grenadiers. Une intervention militaire est alors nécessaire pour faire aboutir le coup d’État parlementaire.
    L’œuvre, exposée au Salon de 1840, l’année du retour des cendres, témoigne de la résurgence de la légende napoléonienne sous la Monarchie de Juillet.

  • Bonaparte au col du Grand-Saint-Bernard

    Artiste(s) : DAVID Jacques-Louis

    Le Premier Consul franchissant les Alpes au col du Grand-Saint-Bernard
    Musée national du château de Malmaison

    Sans doute le tableau le plus célèbre de la légende napoléonienne. David y glorifie une réalité qui fut bien plus prosaïque. C’est en effet à dos de mulet que Bonaparte franchit le col portant, non ce magnifique manteau flottant au vent, mais une simple redingote grise !
    Véritable personnification du héros romantique, le Premier Consul triomphe sur sa monture cabrée dans une composition en diagonale, symbole même de son irrésistible ascension personnelle. Chef-d’oeuvre de propagande, l’oeuvre fait de Bonaparte l’égal des plus grands conquérants  – Annibal, Charlemagne – dont les noms sont gravés sur les rochers au tout premier plan.
    Il existe quatre autres variantes du tableau original commandé par Charles IV d’Espagne. Réalisées par David et son atelier, elles diffèrent par la couleur du cheval et du manteau.

  • Le sacre

    Artiste(s) : DAVID Jacques-Louis

    Sacre de l’Empereur Napoléon Ier
    Paris, musée du Louvre


    Composition ambitieuse représentant le couronnement du 2 décembre 1804 dans la cathédrale Notre-Dame de Paris, cette toile a nécessité trois années d’un travail minutieux. David, qui depuis 1804  porte le titre de « Premier Peintre de l’Empereur », commémore la cérémonie officielle en réalisant un monumental portrait de groupe où tout concourt à ramener le regard vers la scène centrale. C’est finalement le couronnement de Joséphine, et non celui de Napoléon, qui est choisi comme sujet du tableau. La composition n’en est que plus harmonieuse, s’articulant de part et d’autre de la grande croix d’or centrale.
    Cette gigantesque reconstitution (six mètres de hauteur sur dix mètres de largeur), permet avec un incroyable luxe de détails l’identification de chaque personnage. Même celle de Madame Mère, absente lors de la cérémonie, qui trône au premier plan de la tribune ! Pour exprimer sa satisfaction devant l’oeuvre, Napoléon aura ce mot  : « Ce n’est pas de la peinture, on marche dans ce tableau ».

  • L’Empereur législateur

    Artiste(s) : DAVID Jacques-Louis

    Napoléon dans son cabinet de travail aux Tuileries
    Washington, National Gallery of Art

    Ce portrait en pied, en rupture avec la représentation traditionnelle du souverain en habits d’apparat, s’apparente à une allégorie réaliste évoquant l’oeuvre civile de l’empereur. Napoléon porte l’uniforme bleu à larges revers blancs de colonel des Grenadiers à pied de la Garde, celui qu’il mettait ordinairement le dimanche, réservant l’habit vert des chasseurs à cheval à un usage quotidien. Dans une attitude passée à la postérité, il glisse sa main droite dans son gilet. Les bougies consumées, l’horloge marquant quatre heures sonnées, la plume et les papiers épars sur le bureau, tout indique qu’il a passé la nuit à travailler au Code civil. L’aube se lève et Napoléon s’apprête maintenant à passer ses troupes en revue.
    L’intention du tableau est claire : le chef militaire est aussi un puissant homme d’Etat, un administrateur et un législateur à la force de travail incomparable.

  • La bataille d’Austerlitz

    Artiste(s) : GERARD François (baron)

    Bataille d’Austerlitz, 2 décembre 1805
    Versailles, musée national du château

    Commandée pour commémorer la plus célèbre bataille de la Grande Armée et exposée au Salon de 1810, cette gigantesque toile était à l’origine destinée à la décoration du plafond de la salle du Conseil d’Etat. L’oeuvre met en scène l’instant solennel de la victoire, celui où le général Rapp vient présenter à un Napoléon olympien les drapeaux pris à l’ennemi. La composition, ample et équilibrée, reste cependant compliquée voire encombrée et Gérard montre là ses limites de peintre d’histoire. Mais le « Soleil d’Austerlitz » irradie toute la scène d’une lumière quasi-surnaturelle qui correspond bien au caractère symbolique que revêt la date du 2 décembre dans l’épopée napoléonienne.

  • La bataille d’Eylau

    Artiste(s) : GROS Antoine-Jean (Baron)

    Napoléon visitant le champ de bataille d’Eylau, 9 février 1807
    Paris, musée du Louvre

    Le sujet de ce tableau fut mis au concours en mars 1807, moins d’un mois après la terrible bataille qui fit plus de quarante mille victimes françaises et russes. Tout en confirmant la victoire française, il s’agissait surtout d’exprimer l’émotion de Napoléon face à l’horreur d’un tel carnage. « Si tous les rois de la terre pouvaient contempler un pareil spectacle, ils seraient moins avides de guerres et de conquêtes », avait déclaré l’Empereur.
    Gros, vainqueur du concours, atteint ici le sommet de son art. Il élève la peinture d’histoire à un niveau jamais égalé. Sous un jour lugubre, le visage blême, le regard empli d’une immense pitié, Napoléon traverse le champ de bataille où gisent les cadavres. Face à la sombre silhouette de Murat, inquiétante personnification du guerrier, l’Empereur incarne une figure toute d’humanité, de compassion. C’est ici l’envers de la victoire qui, pour la première fois, est dépeint dans sa cruelle réalité.

  • L’Impératrice et le roi de Rome

    Artiste(s) : GERARD François (baron)

    Marie-Louise Impératrice des Français et le roi de Rome
    Versailles, musée national du château

    Surnommé par ses contemporains le « peintre des rois et le roi des peintres », Gérard fut le portraitiste attitré de Napoléon, de la famille impériale et des grands dignitaires du Premier Empire. Cette spécialisation lui valut tous les honneurs. Chevalier de la Légion d’honneur en 1802, premier peintre de l’impératrice Joséphine en 1806, professeur aux Beaux-Arts en 1811, membre de l’Institut en 1812, il poursuivit sa brillante carrière après la chute de l’Empire en devenant premier peintre de Louis XVIII en 1817.
    S’inscrivant dans la tradition du grand portrait de cour, Gérard peint des effigies officielles qui, notamment dans les représentations féminines, se teintent souvent de charme. La grâce du dessin, la richesse des coloris, les décors évoquant le cadre de vie de chacun, produisent cette impression d’intimité qui nous les rend plus proches.

  • La retraite de Russie

    Artiste(s) : CHARLET Nicolas-Toussaint

    Episode de la retraite de Russie, 1812
    Lyon, musée des Beaux-Arts

    C’est la génération romantique, ces « enfants du siècle » se nourrissant avec nostalgie de l’épopée napoléonienne, qui illustre en peinture le désastre de la retraite de Russie. Charlet, un élève de Gros essentiellement connu pour ses lithographies, présente au Salon de 1836 cette toile d’une poignante intensité dramatique. On y voit les restes de la Grande Armée, troupes débandées et anonymes, sombrer peu à peu sous les rafales de neige. Musset, bouleversé par l’oeuvre, écrivit : « C’est la misère humaine, toute seule, sous un ciel brumeux, sur un sol de glace, sans guide, sans chef, sans distinction, c’est le désespoir dans le désert ».

  • La campagne de France

    Artiste(s) : MEISSONIER Ernest

    La campagne de France, 1814
    Paris, musée d’Orsay

    Source d’inspiration pour les romantiques, l’épopée napoléonienne le fut aussi pour les peintres académiques. L’oeuvre de Meissonier, une des gloires artistiques du Second Empire et de la Troisième République, en témoigne largement. « Que de fois j’ai vu l’Empereur en rêve ! » avoue ce peintre né en 1815 quelques mois avant Waterloo. Il conçut un « cycle napoléonien » composé de cinq grandes pages : « 1796 », « 1807 », « 1810 », « 1814 » et « 1815 ». Seuls « 1807 » et « 1814 » seront achevés, ainsi que deux autres toiles en marge du cycle, « 1805 » et « 1806 ».
    Meissonier a parfaitement résumé ce tableau : « La campagne de France. Ciel bas, sol ravagé, état-major accablé, armée épuisée. L’Empereur marche en avant, monté sur son cheval blanc. Plus que la déroute des armées, c’est l’attitude de Napoléon Ier à cette heure critique qui importe ».

  • La mort de Napoléon

    Artiste(s) : VERNET Horace

    Napoléon sur son lit de mort
    Collection particulière

    L’épopée napoléonienne et ses rêves de gloire ont bercé l’enfance d’Horace Vernet qui, tant par tradition familiale que par vocation, choisit très tôt la carrière de peintre d’Histoire. Sous la Restauration, son atelier accueille volontiers les fidèles de l’empereur et lui-même témoigne de sa fervente admiration pour Napoléon dans des tableaux qui contribuent à diffuser la légende. Cette petite toile, émouvante par sa simplicité, se concentre sur le visage de l’empereur défunt. Seule une couronne de lauriers vient rappeler qu’il s’agit, plus que d’un hommage posthume, d’une véritable glorification.

    Sélection et textes : Karine Huguenaud

    Pour plus d’information, retrouvez ces tableaux dans la partie Iconographie de la Galerie.

    Crédits photographiques : RMN, CGFA, The Artchive, Fondation Napoléon.