Portrait de l’Empereur Napoléon Ier en costume de sacre

Artiste(s) : GÉRARD François (atelier de)
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En 2021, en parallèle des nombreuses commémorations autour du bicentenaire de la mort de Napoléon Ier, la Fondation Napoléon a enrichi ses collections de plusieurs acquisitions exceptionnelles. Parmi ces chefs-d’œuvre, ce Portrait de l’Empereur Napoléon Ier en costume de sacre, datant du début du XIXe siècle et issu de l’atelier du peintre François Pascal Simon Baron Gérard.

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Portrait de l’Empereur Napoléon Ier en costume de sacre
Portrait de l’Empereur Napoléon Ier en costume de Sacre,
atelier du baron Gérard © Fondation Napoléon/Rebecca Young

Né en 1770 à Rome, François Pascal Simon Baron Gérard reçoit sa formation artistique à Paris auprès du sculpteur Augustin Pajou, puis du peintre Nicolas-Guy Brenet et enfin de Jacques Louis David. Grâce à la protection de ce dernier, il expose au Salon dès 1791. Rapidement, il obtient un atelier au Louvre et peut ainsi se consacrer pleinement à son art.

Il est remarqué en 1800 par les Bonaparte qui lui passent commande. Alors que Jacques Louis David est chargé de représenter le Premier Consul franchissant le col du Grand-Saint-Bernard, image officielle d’un Napoléon victorieux, Gérard s’illustre dans des œuvres relevant davantage de la sphère intime. Il répond ainsi aux commandes de Madame Mère, Joachim Murat et son épouse Caroline, et expose au Salon un portrait en pied de Joséphine en toilette d’intérieur.

En 1805, il acquiert le rang de portraitiste officiel de l’Empire et livre quelques peintures d’histoire, mais surtout des portraits et des effigies officielles de la famille impériale puis des dignitaires européens, ce qui lui vaut le surnom de « peintre de rois, roi des peintres ».

La capacité de Gérard à rendre compte de la personnalité de ses modèles, tout en s’attachant à la finesse du trait et à la retranscription illusionniste des matières contribuent à son succès. Le décor, tantôt intime, tantôt grandiose, occupe très souvent une place symbolique et presque aussi importante que le sujet.

Parmi les commandes prestigieuses qui lui sont passées, Gérard obtient en 1804 le privilège de peindre le portrait officiel de l’Empereur en costume de sacre. En effet, dès le couronnement, Napoléon veut diffuser sa nouvelle image d’Empereur. Il se tourne alors vers les artistes prestigieux de son époque : Jean-Auguste-Dominique Ingres, Robert Lefèvre, et François Gérard. Les résultats diffèrent d’un portrait à l’autre, chaque artiste livrant son interprétation du nouveau régime en place. La version de Gérard, commandée pour orner l’hôtel de Talleyrand alors ministre des Relations extérieures, achevée en 1805, est choisie par Napoléon pour en faire son portrait officiel. Ainsi, dès le 22 décembre 1804, le ministre de l’Intérieur Champagny commande une série de répliques destinées aux membres de la famille impériale, aux dignitaires du régime, aux résidences diplomatiques ou consulaires à l’étranger, ainsi que pour servir de modèle aux manufactures des Gobelins et de Sèvres pour créer des tapisseries ou des céramiques. Les copies sont effectuées par Gérard lui-même et les collaborateurs de son atelier, le plus souvent des élèves. Le format et le cadrage diffèrent selon la destination et l’usage : en pied, en buste ou encore à mi-jambe. L’exemplaire acquis par la Fondation Napoléon fait partie de cette dernière catégorie.

Entre la version d’Ingres qui donne à voir un Napoléon quasi olympien et le traitement assez maladroit de Lefèvre, Gérard nous donne une image d’un empereur solennel mais incarné. Ce portrait est d’autant plus réussi que l’on sait que Napoléon ne posait pas. Les artistes devaient donc s’inspirer des gravures ou des portraits existants. Gérard a travaillé sur des modèles, mais il a su malgré tout donner une dimension humaine et noble au nouvel Empereur. L’équilibre entre sacré et réalité est respecté par Gérard, raison pour laquelle sa version sera préférée aux autres. Sur le portrait en pied, l’Empereur adopte une pose de trois quarts, héritée des portraits des rois Bourbons, à l’instar du Portrait de Louis XIV en costume de sacre, peint par Hyacinthe Rigaud en 1701. Bien que le cadrage soit resserré à mi-corps sur cette version, on retrouve tous les éléments qui ont fait le succès de ce portrait. Napoléon porte le grand costume de sacre dessiné par Jean-Baptiste Isabey et Charles Percier, composé d’une longue robe de satin ivoire brodé de frises végétales en fil doré et d’un grand manteau en velours pourpre doublé d’hermine, lui aussi brodé d’or. Ce « grand habillement » se distingue de la tenue des monarques de l’Ancien Régime. En effet, la couleur pourpre du manteau remplace le bleu royal et se rattache à la tradition des empereurs romains. Sur ce manteau, on distingue ainsi l’abeille, des branches d’olivier, de chêne et de laurier entrelacées et encerclant le chiffre N. Les regalia, symboles traditionnels de la monarchie sont réadaptés et cohabitent avec les nouveaux insignes du pouvoir. Ces ornements sont l’œuvre des plus grands orfèvres du début du XIXe siècle. La couronne de lauriers d’or -elle aussi héritée de l’iconographie antique-, le grand collier de la Légion d’honneur, le sceptre, la main de justice et le globe impérial posés sur le coussin à l’arrière-plan, ont tous été conçus par Martin-Guillaume Biennais, orfèvre officiel de l’Empereur. L’épée du sacre, dont la lame fut réalisée par la manufacture d’armes de Versailles dirigée par Nicolas-Noël Boutet, est sertie par Marie-Etienne Nitot de pierres précieuses. Sur la coquille, retrouve le célèbre diamant le Régent. La poignée et les garnitures d’or du fourreau d’écaille ont été confiés à l’orfèvre Jean-Baptiste-Claude Odiot. Au second plan, on distingue le dossier du trône créé par l’ébéniste Jacob-Desmalter sur un dessin de Percier et Fontaine pour le palais des Tuileries.

Portant une très grande attention aux détails et utilisant la technique du glacis, Gérard retranscrit parfaitement les volumes et la noblesse des matières : le raffinement des étoffes qui composent le grand costume, les reflets dans le globe, la brillance du Régent. Tous ces éléments concourent à créer une composition qui auréole Napoléon Ier d’un prestige hérité des plus grands rois de France, tout en lui donnant une symbolique nouvelle.

D’autres versions issues de l’atelier de Gérard sont conservées dans plusieurs musées européens mais également dans des collections privées. En France, cinq exemplaires sont conservés dans les collections publiques et visibles au musée du Louvre, au château de Malmaison, au château de Fontainebleau, au château de Versailles ainsi qu’au Palais Fesch à Ajaccio.

Quelques photos de son passage à la Fondation Napoléon en janvier 2022

Camille Ubertini

Février 2022

Date :
après 1804
Technique :
Huille sur toile
Dimensions :
H = 168 cm, L = 135 cm
Lieux de conservation :
Fondation Napoléon
Crédits :
© Fondation Napoléon / Rebecca Young
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