+
10 ans
Jeunes
historiens

1814 – La campagne de France

Ernest Meissonier peint en 1864 un tableau de la campagne de France dont l’atmosphère lourde en fait une représentation emblématique de la situation dans laquelle Napoléon et sa Grande Armée se trouvent, en 1814. Chassé de Russie et poursuivi à travers les terres allemandes, Napoléon a fini par être encerclé en France qui finit par être envahie. Malgré une performance militaire indéniable jusqu’en mars, l’empereur des Français est finalement contraint à l’abdication et à l’exil.

Partager
1814 – La campagne de France
Campagne de France, 1814, par Ernest Meissonier (musée d'Orsay)
© RMN-Grand Palais / Tony Querrec

I. Meissonier : La campagne de France
Ernest Meissonier peint en 1864, cinquante ans après la campagne de France, ce petit tableau. L’Empereur y figure à la tête de ses troupes, dans un paysage d’hiver boueux et mort. Il avance, l’air à la fois déterminé et sombre. Ses hommes, parmi lesquels on reconnaît certains de ses maréchaux, ont l’air fermés et épuisés.

Le peintre, qui connaît l’issue de cette campagne, a voulu rendre par des couleurs froides, et un ciel bas et pesant, l’atmosphère de cette fin de campagne. Il s’agit bien de la chute de l’Empire…

II. Rappel historique : qu’est-ce que la campagne de France ?

L’ennemi : la Grande-Bretagne, la Russie, la Prusse, l’Autriche et d’autres états allemands de la Confédération du Rhin
Pour une série de raisons complexes, la Révolution française s’est révélée un facteur de perturbation dans les relations internationales européennes et mondiales. Cette perturbation, combinée avec la lutte séculaire pour la domination du monde entre la France et la Grande-Bretagne, a créé des antagonismes qui ont conduit la France, la Grande-Bretagne, l’Autriche, la Russie, la Prusse, les pays scandinaves, les terres actuellement occupées par la Belgique et les Pays-Bas, mais aussi l’Espagne, le Portugal, la péninsule italienne et la Sicile -, et même les jeunes  États-Unis ! – dans un conflit armé avec la France. Ce conflit est mené par les différents alliés, dans des combinaisons variées, pour la plupart dirigées ou financées par la Grande-Bretagne, contre la France et ses alliés.
Entre 1805 et 1814, la France se trouve ainsi dans des conflits armés à plusieurs reprises contre une partie de l’Europe. Elle a rarement combattu seule. A Austerlitz, le 2 décembre 1805, elle a combattu les alliés avec certains États du sud de l’Allemagne contre l’Autriche et la Russie (financés, eux, par la Grande-Bretagne). De même, toujours en 1805, mais sur la mer, elle s’allie à l’Espagne contre l’Angleterre. En 1806, la France lutte contre la Prusse, un allié récent de la Russie et de l’Autriche depuis 1805. En 1807, la France se bat contre la Russie (toujours financée par la Grande-Bretagne) et obtient de signer le traité de paix de Tilsit avec la Russie et une alliance franco-russe contre la Grande-Bretagne. En 1809, la France combat à nouveau l’Autriche, mais cet affrontement se conclut par une alliance scellée par le mariage de Napoléon avec la fille de l’empereur d’Autriche, Marie-Louise. En 1812, après l’effondrement de l’alliance franco-russe, la France alliée à une bonne partie de l’Europe continentale, envahit la Russie. En 1813 et 1814, les alliés de la France (Prusse, la Bavière, la Confédération du Rhin, les Pays-Bas, Espagne, Italie) se détachent progressivement d’elle ; la France finit par être attaquée par une nouvelle alliance menée par la Russie, puis par la Russie et la Prusse, puis par la Russie, la Prusse et l’Autriche (le tout financé… par la Grande-Bretagne).
Dans la période 1807-1813, la Grande-Bretagne combat en permanence la France, avec ses alliés espagnols et portugais dans la péninsule ibérique.

Au début de 1814, la France est envahie dans le sud et à l’est par une alliance composée de la Grande-Bretagne, la Russie, la Prusse, d’autres états allemands de la Confédération du Rhin et en Autriche. C’est la 6e coalition.

C’est la première guerre sur le territoire français sous le règne de Napoléon
Après l’échec de la campagne de Russie de 1812 et de la campagne d’Allemagne en 1813, le territoire même de la France est donc menacé, sur toutes ses frontières.

– Au sud : l’Espagne et l’Italie du Sud font sécession avec l’Empire. Les troupes britanniques, espagnoles, portugaises sous le commandement du duc de Wellington rentrent dans les Pyrénées atlantiques en février 1814. Murat, roi de Naples et beau-frère de Napoléon, soutient la coalition officiellement à partir de janvier 1814. Les troupes autrichiennes et les siennes empêchent Eugène, vice-roi d’Italie et fils adoptif de l’Empereur, de protéger la frontière franco-italienne.

– À l’est et au nord : les troupes prussiennes, russes et autrichiennes des alliés franchissent le Rhin dès janvier 1814 et progressent vers Paris. C’est sur ce front que Napoléon Ier va se concentrer afin de sauver la capitale, de janvier à mars 1814. Même si les soldats de l’Empereur remportent des victoires, à Montmirail (11 février 1814) ou à Reims (13 mars), ils sont beaucoup moins nombreux que ceux de la coalition. Napoléon connaît aussi des défaites, comme à Arcis-sur-Aube le 20 mars. Il ne peut pas empêcher ses adversaires de marcher sur Paris.

Paris capitule
Les alliés avancent vers Paris et s’établissent le 25 mars à Bondy, à une dizaine de kilomètres de Paris, dans la banlieue nord-est. Dès le 30 mars, la bataille de Paris commence : plusieurs portes au nord de la capitale sont attaquées en même temps. L’un des plus célèbres affrontements est celui de la barrière de Clichy. Les coalisés finissent par pénétrer dans la ville. Un armistice est signé dans la soirée et les troupes françaises évacuent la capitale.
Napoléon apprend la nouvelle de la capitulation et arrête sa progression vers Paris pour s’établir au château de Fontainebleau.

Napoléon Ier abdique le 11 avril 1814
L’empereur espère négocier son abdication en faveur de son fils, le roi de Rome, âgé de 4 ans. Mais le Sénat ne reconnaît plus Napoléon comme empereur et proclame sa déchéance le 1er avril, et les coalisés souhaitent le rétablissement de la dynastie des Bourbon. Le 11 avril, Napoléon est contraint de signer une abdication sans pouvoir imposer ses conditions. Il a constaté qu’il a perdu le soutien de ses maréchaux et d’une partie de la population, épuisée par des années de guerre. La dernière bataille de la campagne de France a lieu à Toulouse le 10 avril : l’Empire est mis en échec définitivement.
Les détails de cette abdication sont discutés. Napoléon songe à se suicider puis finit par signer le 13 avril les exigences de la coalition : ce sera le traité de Fontainebleau. Avant de se rendre sur le lieu d’exil choisi par la 6e coalition, l’Empereur passe en revue le 20 avril les derniers soldats qui sont restés à ses côtés : on appelle cet épisode de l’histoire napoléonienne les adieux de Fontainebleau.

L’exil sur l’île d’Elbe
C’est sur la petite île méditerranéenne d’Elbe qu’est contraint de se rendre Napoléon. Il est accompagné de quelques proches et de quelques centaines de soldats. Il est escorté par les alliés victorieux jusqu’à Saint-Raphael le 28 avril, puis il embarque sur un bateau britannique, l’Undaunted, qui le mène jusqu’à la ville du nord de l’île d’Elbe, Portoferraio, le 3 mai.

Napoléon restera dix mois en exil : le 1er mars 1815 il débarque à Golfe Juan, avec une poignée de soldats, pour tenter de rejoindre Paris et reprendre son trône. Il y parviendra, pendant Cent-Jours ! Mais c’est une autre histoire…

Marie de Bruchard, 19 mars 2014. Revu en août 2014

Partager